Société | | 06/01/2012
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Plan de prévention des risques argile : mode d’emploi et conséquences

Plan de prévention des risques argile : mode d’emploi et conséquences

Un plan de prévention des risques de mouvement de terrain (PPRMT) est actuellement soumis à enquête publique dans tout le Val de Marne. Quelles nouvelles obligations va-t-il imposer aux propriétaires de maisons individuelles ? Quelle conséquence sur l’indemnisation des assurés en cas de sécheresse ou inondation ? Comment ça marche ? Comment ce plan est accueilli par les villes du département ? Le point sur la question.

Rappel du contexte

Le Val de Marne est le troisième département le plus touché par les conséquences sur le bâti des mouvements de terrain liés aux sécheresses. Entre 1989 et 2003, 78 arrêtés inter-ministériels reconnaissant l’état de catastrophe naturelle ont été pris pour ce seul aléa.

Concrètement, le phénomène est le suivant : le sol, particulièrement argileux dans le département, se rétracte fortement lors des sécheresses avant de se gonfler au contraire lors des pluies qui suivent, provoquant des mouvements du terrain qui peuvent occasionner des fissures dans les immeubles et pavillons. D’autres facteurs renforcent ce phénomène comme la présence de certaines plantes qui consomment beaucoup d’eau à proximité des habitations ou encore le type d’écoulement des eaux pluviales.

Dans un contexte national de réflexion pour mieux associer prévention et indemnisation, accompagné de la mise en place de plans de préventions de risques (PPR) au niveau local, un plan a été élaboré ces dernières années par la direction départementale de l’équipement du Val de Marne (DDE), en s’inspirant d’un modèle développé par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM).
Ce plan concerne 33 communes (liste en bas de page). Un premier jet a été présenté aux villes en avril 2008 suivi de trois avant-projets successifs jusqu’en juin 2009. Un projet définitif a vu le jour en février 2010, voté ensuite dans chaque conseil municipal des villes concernées. 20 communes ont émis un avis favorable, 16 un avis favorable avec réserves, 2 ont émis des réserves sans avis (Créteil et Ormesson) et une ville a émis un avis défavorable (Bry sur Marne). (lire plus loin le détail des réserves). Alors que toutes les communes se sont prononcées, le plan est désormais soumis à enquête publique jusqu’au 11 février. Chacun, particulier, association ou autre organisme, peut venir donner son avis durant cette période. Un commissaire enquêteur rendra ensuite un avis à l’issue de l’enquête avant que soit définitivement entériné ce plan. (voir le détail de l’enquête publique et les lieux d’accueil du public dans chaque ville)

Comment ça marche ?

Le PPRMT est basé sur une carte des zones à risque (établie par le BRGM) qui a distingué trois zones en fonction de leur niveau d’exposition aux risques de mouvement de terrain (bleu foncé pour la zone fortement exposée, bleu claire pour la zone moyennement exposée et vert pour la zone faiblement exposée) (voir carte d’Ormesson ci-contre pour exemple). Les règles proposées diffèrent d’une zone à l’autre. Sont également distinguées d’une part les constructions existantes et les constructions nouvelles, d’autre part les maisons individuelles et les habitations collectives. Les prescriptions étant globalement moins contraignantes pour les constructions existantes ainsi que pour les maisons individuelles. (toutes les cartes par ville sont disponibles sur le site de la préfecture)

Quelles conséquences pour les indemnisations par les assurances ?

Dans chacune des zones et types de bâtiments concernés, un ensemble de préconisations sont indiquées. Ces règles sont de trois types : les interdictions et les prescriptions revêtent un caractère obligatoire, leur non application peut entraîner une suppression de l’indemnisation par l’assurance, même en cas de catastrophe naturelle reconnue. Les recommandations n’ont pas de caractère obligatoire et n’entraînent pas de risque vis-à-vis de l’assureur, elles sont simplement conseillées.

Les types de préconisations

Concernant les constructions, les recommandations concernent en amont la réalisation d’études géotechniques pour évaluer les risques spécifiques, ainsi que des précautions dans la construction comme l’exigence d’une profondeur minimum des fondations, la réalisation d’un plancher porteur sur vide sanitaire, le chaînage horizontal et vertical des murs porteurs, l’interdiction de planter des arbres à une distance inférieure de la maison correspondant à leur hauteur de coupe -si l’arbre fait 2 mètres de haut, il doit être à deux mètres de l’habitation- ou la mise en place d’écrans anti-racines entre les plantations et la maison, la récupération des eaux de pluie aux abords immédiats de la maison… Voir le détail complet par type d’habit et de zone sur le document officiel de PPRMT.

Les réserves formulées par les communes

Au cours des différents échanges entre les villes concernées et la DDE pour élaborer les avant-projets, un certain nombre de réserves ont été émises par les communes, qui ont donné lieu à des réponses ou amendements. Pour travailler en commun, un certain nombre de communes se sont réunies au sein de l’association ASSEC 94, présidée par le maire de Valenton et créée à l’occasion de la sécheresse de 2003 pour aider les communes à obtenir l’arrêté de catastrophe naturelle. Malgré les réponses de la DDE, certaines craintes ou demandes de précision ont néanmoins persisté et se sont retrouvées dans les votes avec réserves des différents conseils municipaux. Un seul vote a néanmoins été défavorable à Bry tandis que Créteil et Ormesson ont émis des réserves sans avis et que seize villes ont voté favorablement avec réserves (voir tableau ci-contre).

Les points qui coincent

Responsabilité des communes
Le plan prévoit que les communes contrôlent la conformité des chantiers (recolement). Un point qui a suscité de leur côté une grande réserve. Ces dernières ne souhaitent en effet pas être tenues pour responsables d’un audit dont elles ne disposent pas des moyens techniques pour le mener à bien. Sur ce point, la réponse de la DDE a été que le récolement ne s’opère qu’au regard des règles sanctionnées par le permis de construire et que les villes ne sont pas responsables au-delà. Elles peuvent visiter le site si nécessaire et exiger tous les documents utiles.

Préservation de la trame végétale
Les élus se sont aussi inquiétés des conséquences des mesures préconisées par le plan (invitant notamment à éviter la plantation de certains types de végétaux à proximité des maisons) sur la végétation. Dans certaines villes comme Bry sur Marne, ce plan est ainsi en contradiction avec l’esprit du PLU. Sur ce point, il a été répondu que les préconisations ne concernaient que des futures plantations. Par rapport à la contradiction avec le plan d’urbanisme, il est indiqué qu’il ne s’agit essentiellement que de préconisations, sauf en cas d’aléas forts, et que les plantations restent possibles assorties d’un écran anti-racines de deux mètres de profondeur le séparant de l’habitation.

Certaines préconisations trop floues
Parmi les reproches également : un trop grand flottement dans certaines recommandations, comme par exemple la liste non exhaustive des plantes à proscrire (seules quelques espèces sont citées parmi les plantes gourmandes en eau, laissant le soin au propriétaire d’apprécier si telle ou telle plante doit ou non être proscrite).

Evacuation des eaux pluviales
Afin d’éviter que l’eau ne vienne trop directement sur les fondations de l’immeuble en cas de fortes pluies, il est prévu d’imposer dans les zones à risque un rejet des eaux de pluie à au moins 5 mètres du bâtiment ou d’utiliser le réseau des pluviales des égouts. Une mesure dont certaines villes ne veulent pas en raison de la taille insuffisante des parcelles. En outre, la préconisation de rejeter les eaux de pluies directement dans les eaux pluviales des égouts est contraire à la loi sur l’eau qui prévoit au contraire de favoriser l’infiltration des eaux dans chaque parcelle, risquant d’engorger les réseaux.

Recommandations ou obligations ?
Parmi les principales inquiétudes encore, figure la nécessité de bien distinguer ce qui est de l’ordre de la recommandation et de l’obligation, ceci afin d’éviter aux propriétaires de se voir refuser la prise en charge de leur sinistre par l’assurance au motif que les simples recommandations n’auraient pas été prises en compte. Sur ce point de réserve, la réponse de la DDE a été très claire, qui précise que les recommandations n’ont pas de caractère obligatoire et que leur non-respect est sans incidence sur la responsabilité du propriétaire. Sont en revanche obligatoires les prescriptions et interdictions.

Urgence ou pas à faire les travaux ?
A quel moment les constructions existantes doivent-elles se mettre aux normes ? lors des travaux ou d’une vente, se demande la commune de Bry sur Marne. Réponse : dès que possible…

Qui va payer le surcoût des mises aux normes du plan ?
Aucun financement n’est prévu pour mettre les propriétés aux normes du PPR (mise en place d’écran anti-racine, géo-membranes, terrasse étanche, système de récupération des eaux pluviales…). Sur ce point, il est rappelé qu’aucun délai ne s’impose aux constructions existantes, c’est pourquoi il n’est pas possible de bénéficier d’une subvention du Fonds de prévention des risques naturels majeurs. La DDE insiste néanmoins sur le fait que la réalisation des mesures coûtera toujours moins cher que la réparation a posteriori, d’autant que la franchise pratiquée par les assurances peut être modulée en cas d’absence de PPR. (l’estimation indiquée est de 6000 €). Concernant le surcoût de cette mise aux normes pour les nouvelles constructions, il est estimé entre 3 % et 8 % pour les maisons individuelles. Le surcoût devrait en revanche être plus faible pour les constructions de plus de 170 m2 qui nécessitent de toutes les façons le recours à un architecte et la réalisation d’études géotechniques, sondages…

Information des publics concernés
Les communes ont aussi demandé à ce que soit organisée de manière systématique l’information auprès des publics concernés.

Voir le détail des débats, réserves et réponses (document intitulé Bilan de la concertation).

Voir également le débat sur cette question à Nogent sur Marne

Liste des 33 communes du Val de Marne concernées par le PPRMT

Ablon
Alfortville
Arcueil
Boissy-St-Léger
Bonneuil-sur-Marne
Bry-sur-Marne
Cachan
Champigny-su-Marne
Chennevières-sur-Marne
Créteil
Fontenay-sous-Bois
Fresnes
Hay-les-Roses (l’)
Kremlin-Bicêtre (le)
Limeil-Brévannes
Mandres-les-Roses
Marolles-en-Brie
Nogent-sur-Marne
Noiseau
Orly
Ormesson
Périgny-sur-Yerres
Perreux-sur-Marne (le)
Plessis-Trévise (le)
Queue-en-Brie (la)
Santeny
St-Maur-des-Fossés
Sucy-en-Brie
Valenton
Villecresnes
Villejuif
Villeneuve-S-Georges
Villiers-sur-Marne

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