Politique locale | | 27/01/2009
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Urbanisme en ville: historique du droit et des enjeux

L’urbanisme citadin, à commencer par celui de la banlieue parisienne, a du gérer la croissance du nombre d’habitants dès le début du XXème siècle, qu’il s’agisse d’assainir les lotissements défectueux de l’entre-deux guerres, de loger la population exponentielle d’après-guerre, puis de repenser l’urbanisme au-delà des grands ensembles et d’intégrer les questions de transport, développement économique, paysage, aux côtés de celle du logement. A chaque nouvelle étape a aussi correspondu la création d’outils pour permettre aux pouvoirs publics de maîtriser l’urbanisme.


Entre les deux guerres : émergence d’une nappe pavillonnaire

La banlieue parisienne s’est véritablement configurée au début du XXème siècle suite à un double mouvement d’exode rural d’une part, de déplacement du centre vers la périphérie d’autre part. Une nappe pavillonnaire qui s’étend progressivement sur des dizaines de milliers d’hectares, fruit d’une expansion anarchique peu qualitative et peu d’équipements et infrastructures. Certaines rues sont des marées de boue. Des premières mesures législatives apparaissent donc dès la fin de la première guerre mondiale.  En 1919, la loi Cornudet instaure les premiers plans d’aménagement, d’embellissement et d’extension (ancêtres du POS puis du PLU). Le permis de construire devient obligatoire dans les communes qui ont un plan et le deviendra pour tous en 1943.  En 1928, la loi Sarraut s’attaque aux lotissements défectueux. La même année, germe le premier plan d’aménagement de la région parisienne et le lancement d’un vaste programme de logements en location ou accession à la propriété, avec la loi Loucheur, qui donne lieu à une série de petits pavillons).
 
Après la seconde guerre mondiale : expansion verticale
Afin d’éviter l’extension des zones pavillonnaires vétustes, fermer les bidonvilles qui jouxtent encore la capitale, et accueillir une population francilienne qui explose (accélération de l’exode rural, rapatriés d’Afrique du Nord), l’urbanisme d’après-guerre privilégie une densification verticale. Le principe des ZUP (Zones urbaines prioritaires) est acté en 1958 afin de  permettre la construction des grands ensembles. Tours et barres se multiplient au gré des grandes opérations d’habitat social. Ces constructions permettent de répondre au besoin massif de logement et offrent un confort moderne encore inédit pour bien des habitants : eau courante, électricité, chauffage, toilettes… Ils constituent aussi le symbole d’un modernisme architectural. Le pic de construction de ces ensembles est atteint dans les années 70 avec un rythme de construction de 500 000 logements par an.

Retour au pavillonnaire
Mais les problèmes liés aux grands ensembles apparaissent rapidement. Les enfants des familles nombreuses grandissent donnant lieu à des bandes de jeunes pas bien perçues de tous. Les mères de famille s’ennuient dans ces cités dortoir… On parle de Sarcellite pour évoquer le mal être des grands ensembles. A la fin des années 60, le pavillonnaire fait son retour. Un premier schéma directeur sur l’ensemble de la région Ile de France est donc institué en 1965, sous l’égide de Paul Delouvrier afin de planifier l’agglomération à une échelle plus large. Cinq villes nouvelles sont créées en dehors de la proche couronne : Saint Quentin en Yvelines, Marne la Vallée, Cergy Pontoise, Evry et Sénart. Ces ensembles de communes doivent rayonner d’elles-mêmes avec non seulement des logements mais aussi des entreprises et équipements publics. Les populations les moins fragiles des barres HLM désertent les tours pour s’installer dans des petites maisons de la périphérie lointaine. Symbole de cette nouvelle extension pavillonnaire, l’initiative de Villagexpo en 1966 à Saint Michel sur Orge (qui propose des pavillons premier prix) ou les Chalandonnettes, lancées par le ministre du logement de l’époque, Albin Chalandon. A signaler du reste que c’est Roland Nungesser, secrétaire d’Etat au logement de 1966 à 1967, et maire de Nogent sur Marne de 1959 à 1995, qui contribue à ce virage pavillonnaire durant son mandat. L’étalement urbain reprend mais l’activité économique (qui évolue avec notamment le passage de l’industrie aux services) n’est pas forcément installée à côté des zones résidentielles, ce qui génère d’autres inconvénients comme la saturation des transports.

Une panoplie d’outils pour maîtriser l’urbanisme
La fin des années 60 voit également se complexifier le droit de l’urbanisme. En 1967, la Loi d’orientation foncière (LOF) complète le portefeuille d’outils d’aménagement local avec le POS (plan d’occupation des sols, qui vient remplacer le plan d’aménagement, d’embellissement et d’extension et sera ensuite remplacé par le PLU) qui définit à l’échelle de la ville les modalités de constructibilité en fonction des différentes zones, le SDAU (Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme remplacé depuis par le Schéma directeur) qui aménage le territoire à l’échelle de plusieurs communes, la taxe locale d’équipement, le Coefficient d’occupation des sols (COS) qui indique le nombre de m2 constructibles par m2 de terrain (en fonction du POS), et encore les ZAC (Zone d’aménagement concerté) qui permettent aux pouvoirs locaux de prendre l’initiative pour aménager une parcelle. En 1975, apparaissent le droit de préemption et les ZIF (Zones d’intervention foncière) qui donneront ensuite lieu au Droit de préemption urbain et permettent aux pouvoirs locaux de préempter des terrains dans le cadre d’une opération d’aménagement. En parallèle, les aides de l’Etat se concentrent directement vers les ménages avec la création de l’APL (Aide personnalisée au logement) en 1977 (loi Barre – D’Ornano). En 1983, dans le cadre de la décentralisation, l’octroi de permis de construire est transféré de la DDE (Direction départementale de l’équipement) aux communes qui ont mis en place un POS. En 2000, la Loi SRU (Solidarité de renouvellement urbains) instaure encore de nouveaux documents,  comme le PLU (Plan local d’urbanisme) en remplacement du POS. Le PLU se réclame à la fois d’une démarche plus globale qui inclut développement durable, déplacements, logements sociaux… et plus simple dans sa segmentation par zones. Les SCOT (schémas de cohérence territoriale) viennent également remplacer des schémas directeurs pour traiter de l’aménagement au niveau de plusieurs communes ou groupements de communes et s’imposent aux PLU. En Ile de France, le schéma qui s’impose est celui de la région, à savoir le SDRIF (Schéma directeur de la région Ile de France).  La Loi SRU impose également aux communes de plus de 3500 habitants de disposer de 20 % de logements sociaux ou de payer une taxe.

En attendant le Grand Paris, à chaque commune ses outils
Aujourd’hui, l’évolution de l’urbanisme de Paris et sa banlieue continue de susciter le débat, intégrant à la fois les problématiques de logements, transports, activité économique, développement durable, rééquilibrage centre-périphérie, Est-Ouest… Des enjeux évoqués dans le cadre des réflexions sur le Grand Paris et auxquels la région (via son nouveau projet de schéma directeur – le SDRIF), l’Etat (qui a mandaté Christian Blanc pour réfléchir aux opérations prioritaires sur la région Paris Capitale) et les municipalités (Paris et les villes voisines dans le cadre du syndicat Paris Métropole) planchent, avec d’autant plus d’intérêt que les élections régionales approchent. (Lire sur ce sujet billets sur le Grand Paris , le Grand Paris Est et Féderer l’Est parisien). En parallèle de cette réflexion sur l’ensemble du territoire francilien, chaque commune tente de maîtriser son urbanisme à son échelle avec le PLU comme principal dispositif d’aménagement global, les ZAC comme outil de transformation d’une zone particulière, ainsi que d’autres instruments spécifiques au contexte comme la ZPPAUP (Zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager).  Des outils qui ne résolvent pas tous les problèmes inhérents à l’aménagement urbain, comme le souligne Jean Harari, architecte urbaniste, venu débattre de la question à l’invitation du Forum politique Nogentaisle 12 janvier dernier : «Le décalage entre la temporalité du mandat d’élu et le rythme d’un projet urbain rend la tâche ardue. Une autre question encore non résolue consiste en la récupération des plus-values foncières par les mairies. Car celles-ci permettent d’augmenter considérablement la valeur d’un terrain en fonction de la constructibilité qu’elles lui accordent ainsi que des équipements et infrastructures publiques qu’elles mettent en place autour celui-ci, sans en percevoir les fruits. Mais la plus-value foncière ne s’effectue qu’au seul bénéfice des propriétaires du terrain.»

Liens utiles
Emissions de France Culture de 2001 (La Fabrique de l’histoire) sur l’engouement pavillonnaire
Conférence d’Annie Fourcaut sur le logement social en France de 1830 à la fin des années 1960 (dans le cadre de l’école normale supérieure Lettres et sciences humaines de Lyon)
Article Wikipedia sur le droit de l’Urbanisme en France avec nombreux liens vers les définitions des différents dispositifs.

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