Faut-il raccourcir la journée des écoliers et la compléter d’activités de loisirs, raccourcir les grandes vacances, allonger celles de la Toussaint, revenir au samedi travaillé ou envisager le mercredi ? Et quel investissement l’Etat est-il prêt à mettre dans de tels projets ? Ces questions ont été débattues mercredi soir à l’occasion d’une réunion organisée par l’Inspection d’Académie du Val de Marne dans le cadre du débat national sur les rythmes scolaires.
Pour en discuter, seize personnes étaient sur le plateau (Gilles Pétréault, inspecteur général de l’Education nationale, Pierre Moya, inspecteur de l’académie de Créteil, Véronique Lefranc, inspectrice de la circonscription, des enseignants et directeurs, une médecin chronobiologiste et trois représentants locaux de parents d’élèves) et une cinquantaine de parents dans la salle, essentiellement élus d’associations de parents d’élèves de Nogent, Le Perreux ou du Val de Marne. Après un préambule de l’Education nationale pour préciser le contexte du débat : évolution de la société et comparaison avec les autres pays, faisant notamment état d’un faible nombre de jours d’écoles par rapport à nos voisins (140 jours au lieu de 184 en moyenne dans les pays de l’OCDE) mais avec des horaires plus chargés, le débat avec la salle a été ouvert durant deux bonnes heures.
Journée allégée ?
Posant quelques jalons, la médecin chronobiologiste invitée sur le plateau a indiqué que, d’après les statistiques à disposition, les enfants étaient plus vigilants le matin entre 9h et 11h – 11h30, et moins aptes entre 8h et 9h et après 11h30. Ils l’étaient ensuite à nouveau après 15h-15h30. «C’est effectivement dommage qu’il n’y ait pas de temps calme après le déjeuner d’autant que les enfants sont nombreux à se presser à la cantine», a souligné Isabelle Chevalier, présidente d’Ecolo Parents Nogent. Quant à un allégement de la journée, pourquoi pas ? Mais n’est-ce pas dommage de s’arrêter quand les enfants commencent à se concentrer ? “Ne faut-il pas repenser la journée en partant des rythmes de l’enfant ?” a suggéré un élu FCPE. Et comment les parents s’organiseront-ils pour récupérer leurs enfants encore plus tôt alors qu’ils travaillent de plus en plus souvent tous les deux et loin de leur domicile ? «J’ai dû me mettre à 80 % pour pouvoir aller chercher mes enfants à l’école le soir mais je ne pourrai pas me libérer à 15h30. Il faut aussi penser au statut de la femme qui travaille», a souligné une élue PEEP. Une piste de réflexion serait de proposer des activités après l’école ou pendant une pause allongée du midi. Une autre maman de la PEEP a ainsi évoqué l’ancienne école de ses enfants à Bruxelles, où les élèves pratiquaient des activités de loisirs de 15h30 à 17h30. «Ce n’était pas de la garderie, ils faisaient vraiment des activités de qualité, qu’il s’agisse de peinture ou de spectacle.» L’encadrement est très important, a repris une directrice d’école : «Il faut du personnel formé pour s’occuper des enfants.» Une question qui pose inéluctablement celle des moyens, comme l’a souligné l’élue Ecolo Parents : «Les ateliers du soir mis à en place à Nogent dépendent de la commune mais toutes les villes n’ont pas les mêmes moyens. Et si ce dispositif doit s’étaler sur une plage horaire plus étendue, qui le financera ? Les communes ou l’Education nationale ?» Un avis partagé par son homologue de la FCPE, Laurent Rouvet : «Restructurer les rythmes scolaires en intégrant d’autres activités et en augmentant le nombre de jours travaillé en contrepartie de leur allègement constitue un projet très ambitieux et un investissement important de la part de l’Education nationale, est-ce bien dans cet esprit que la réflexion est menée ?»
Samedi travaillé ?
La question de la semaine de quatre jours et de la suppression du samedi matin s’est bien-sûr invitée dans le débat, fortement contestée par la FCPE 94, mais soutenue par la majorité de la FCPE Nogent ainsi que la PEEP et Ecolo Parents. A Nogent en effet, il y eu plusieurs longs débats sur cette question car la semaine de 4 jours a été expérimentée pendant neuf ans avant qu’elle ne soit généralisée au niveau national et ce statut particulier faisait l’objet d’une consultation préalable des conseils d’école. Les modalités de cette expérimentation étaient toutefois un peu différentes : les grandes vacances étaient écourtées début juillet et fin aout et il restait 3 samedis travaillés, aucune heure n’était en revanche supprimée car l’aide personnalisée n’était pas encore instaurée. «Il est curieux que deux des trois réunions sur les rythmes scolaires organisées dans le département l’aient été dans des villes favorables à la semaine de 4 jours depuis des années : Nogent et Vincennes. Ces communes ne reflètent pas la sociologie du Val de marne, a pointé un représentant de la FCPE 94. La question du samedi travaillé n’a pas été discutée au niveau national. La suppression du samedi a été décidée sans concertation et ce débat nous a été confisqué.» Les détracteurs de la semaine de 4 jours regrettent le temps privilégié du samedi matin, propice aux rencontres entre parents d’élèves et enseignants et considèrent que le fait de ne pas avoir cours durant deux jours crée une rupture trop importante. Un point sur lequel la chronobiologiste leur a donné raison citant des statistiques qui font ressortir une difficulté à se resynchroniser le lundi. Les tenants de la semaine de 4 jours défendent le temps passé en famille et évoquent l’organisation facilitée pour les enfants de couples séparés. Une directrice d’école a regretté l’époque du samedi matin. Une élue FCPE a reconnu, bien qu’étant favorable à la semaine de 4 jours, qu’avoir quelques samedis travaillés (comme cela était le cas du temps de l’expérimentation au niveau de la circonscription) permettait d’organiser les moments de convivialité et d’échanges entre parents et enseignants (réunion de rentrée, remise des évaluations, kermesse …). «Mais rien ne nous empêche aujourd’hui d’organiser des activités le samedi, autant que nous le souhaitons», a pointé Gilbert Coquard, directeur de l’école Guy Môquet.
Mercredi travaillé ?
Concernant le mercredi travaillé, la discussion ne s’est pas attardée sur ce point mais une directrice ayant testé cette formule a témoigné de la fatigue particulièrement importante des enfants le vendredi. Pour Aurore Brieda, présidente de la PEEP Nogent : “ le mercredi matin travaillé risque de bouleverser une bonne partie de l’organisation actuelle des loisirs, notamment de l’enseignement religieux historiquement dispensé ce jour-là, et ceci doit aussi être pris en considération.”
Raccourcir les grandes vacances ?
«Deux mois complets de grandes vacances, c’est long et cela constitue une rupture trop importante dans l’apprentissage, même si cela ne déplaît pas forcément aux enfants», a avancé le président de la FCPE locale. D’autant qu’à ces deux mois, convient-il encore de rajouter plusieurs semaines en juin dans les collèges et lycées où sont avancés les conseils de classe pour cause de passage de brevet ou de baccalauréat dans l’établissement.
Vacances de la Toussaint de deux semaines ?
A propos des vacances de la Toussaint, la chronobiologiste a noté une fatigue plus importante des enfants sur octobre novembre, indiquant que la période avant la Toussaint était assez longue (8 à 9 semaines de cours) et que les vacances de la Toussaint ne duraient que dix jours alors que le minimum pour récupérer complètement est de deux semaines.
Zonage des vacances d’hiver
«La segmentation en zones A, B, C suivant les régions fait que certains enfant se retrouvent en vacances d’hiver quasiment un mois après les vacances de Noël, c’est trop rapproché car cela donne l’impression d’être toujours sur le point d’être en vacances», a souligné une élue FCPE. Une autre représentante de parent d’élève a du reste interpellé l’Education nationale quant à ce zonage propice à l’industrie touristique : «L’école adapte ses dates de vacances pour favoriser l’économie du tourisme mais quelle en est la contrepartie ? Est-ce que les opérateurs de tourisme reversent une commission à l’éducation nationale ?»
Cette réunion de terrain fera l’objet d’un compte-rendu qui sera analysé avec les autres synthèses (des débats ont été organisés partout en France, dont 3 dans le Val de Marne) d’ici le début 2011. Le ministère de l’Education nationale formulera ensuite ses propositions d’évolution des rythmes scolaires.
Voir également le compte-rendu officiel de la réunion qui s’est déroulée à Vincennes.
Voir aussi le site du débat national où il est possible de contribuer en ligne et de trouver de la documentation sur le sujet.
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