Ils n’étaient pas très nombreux à manifester ce 27 juillet après-midi devant la préfecture, sous la lancinante pluie d’été, mais la trentaine de membres présents du Collectif des travailleurs sans papier de Vitry, constitué pour beaucoup de Maliens, compensaient par la voix, scandant leurs slogans au rythme des percussions.
Constitué en 2008 sous l’impulsion notamment de membres de RESF (Réseau Education Sans Frontière, association qui aide les enfants scolarisés dont les parents sont menacés d’expulsion) et de la CGT, avec des travailleurs sans papiers issus de deux foyers de Vitry sur Seine, ce collectif se bat pour la régularisation de ses membres, employés dans le bâtiment, la restauration, le commerce de gros à Rungis ou encore le ménage, parfois de manière déclarée et même en CDI, parfois sans aucune trace écrite de leur travail.
«Depuis la loi de 2007, les conditions du regroupement familial se sont durcies et les régularisations à l’ancienneté se font de plus en plus rares dans le département, même pour ceux qui ont passé plus de dix ans en France. Récemment, deux sans papier, qui vivaient ici depuis 16 et 21 ans, ont dû aller au Tribunal administratif de Melun pour avoir gain de cause. Les régularisations par le travail sont plus nombreuses mais très compliquées à obtenir. Il faut que l’employeur accepte de signer une promesse d’embauche, de remplir un papier Cerfa et payer une taxe à l’OFII (Office français de l’immigration et l’Intégration). C’est du reste bien souvent l’employé qui se retrouve, in fine, à payer cette taxe, trop content de pouvoir accéder à des papiers! Déposer un dossier de régularisation est aussi risqué, car lorsqu’il est refusé, le sans papier peut se retrouver avec une OQTF (Obligation à quitter le territoire français), et lorsque tout le dossier est complet, il se perd curieusement assez souvent», expose Christian Schweyer, membre du bureau du collectif.
Un collectif créé à Vitry
Après quelques premières participations à des manifestations, le collectif des travailleurs sans papiers de Vitry a réalisé son premier coup d’éclat en octobre 2009, occupant le centre des impôts de leur ville, d’abord à l’intérieur, puis, une fois vidés des lieux, en organisant un siège de plusieurs semaines à l’extérieur. Le groupe a également occupé le centre des impôts d’Ivry sur Seine en janvier 2011.
Au-delà de ces actions de démonstration, ce syndicat de sans papiers a aussi déposé des demandes de régularisation en préfecture. Une centaine de dossiers ont ainsi été déposées en 2010, qui ont donné lieu à 80 OQTF (Obligation à quitter le territoire) et 12 régularisations (suivies ensuite de quelques autres).
En juillet dernier, le Collectif a symboliquement occupé une partie de la Direction départementale du Travail du Val de Marne (service déconcentré du Ministère du Travail), situé dans l’Immeuble Pascal, à Créteil. L’occasion de nouer des relations avec quelques inspecteurs du Travail, dans le cadre d’une assemblée générale commune avec les syndicats Sud et CGT. Pour les inspecteurs du travail, la situation des travailleurs sans-papier pose en effet des cas de conscience, ces derniers se retrouvant parfois à fermer les yeux devant certaines illégalités pour éviter aux employés sans papiers de perdre leur job.
C’est cette hypocrisie que dénonce le collectif. «Nous constituons un second marché de la main-d’œuvre qui invite les employeurs à fouler au pied le code du travail. Nous dénonçons le double langage du gouvernement qui, au-delà des proclamations populistes contre la main-d’œuvre étrangère, est complice et organisateur de notre surexploitation», lit-on sur l’un de leurs tracts. Le discours est aussi politique, clairement ancré dans la gauche radicale et la lutte des classes. Même si pour l’instant, les objectifs des syndicats sur la question des travailleurs sans papiers restent en deçà de ceux des militants engagés dans cette lutte.
Pas de réception le 27 juillet
En ce 27 juillet devant la préfecture, les sans papier venaient aussi dénoncer les dernières arrestations de sans papier membres du collectif, l’un d’entre eux étant actuellement détenu au Centre de rétention administrative du Mesnil Amelot, en Seine et Marne. Après une heure et demie à piétiner devant les grilles de la préfecture, les manifestants sont repartis bredouilles, sans avoir été reçus. “On nous a fait savoir que notre occupation de la Direction départementale du travail au mois de juin avait choqué car la Préfecture avait commencé à négocier. Ce que nous n’avions pas tout à fait perçu comme tel. Certes, il y avait eu quelques échanges, mais les dossiers qui étaient en cours de traitement étaient toujours en suspens et la situation n’avançait pas”, conteste Christian Schweier.
Hypocrisie, c’est bien le mot. De deux chose l’une, ou l’individu est en situation régulière ou il ne l’est pas. Dans ce dernier cas, c’est l’employeur le plus fautif, et il doit être sanctionné pour le dissuader.
Depuis les portugais dans les années 70 qui vivaient dans les bidonvilles importé de Lisbonne (Champigny) et qui ont été relogés par Chaban Delmas, rien n’est fait pour un accueil des immigrés, en vue de les encadrer et de ne pas les laisser seuls devant leur exploitation par les employeurs, parfois de même origine, ou par des trafiquants. Vérifier s’ils ont en règle, leur situation de famille, s’ils ont un logement, un travail, les informer de leurs droits et de leurs devoirs, les aider dans leurs démarches, tout employeur devant demander une autorisation d’embauche dans les conditions légales.
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