Société | | 13/02/2012
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Envolée de plumes autour de la future statue de Carla Bruni-Sarkozy

En l’an 2000, Outreau avait défrayé la chronique suite à l’érection d’un monumental  buste de François Mitterand au milieu d’un lotissement. Cette fois, c’est à Nogent sur Marne que cela se passe, et la future statufiée s’appelle Carla Bruni-Sarkozy. Elle fut mannequin et son minois est d’ordinaire plutôt apprécié des gazettes. Mais aujourd’hui, elle est d’abord la femme du président de la république. Et en pleine campagne présidentielle, cette silhouette, aussi fine soit elle, ne peut passer inaperçue. Alors que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements de partis politiques vient d’être saisie pour inclure les frais de cette statue dans les comptes de campagne de Nicolas Sarkozy, retour sur cette affaire, les débats qu’elle a déjà suscités et ses derniers rebondissements.

Projet de statue
Ville d’accueil d’émigrés italiens originaires d’Emilie Romagne au début du vingtième siècle, Nogent compte de nombreux immeubles construits par des maçons italiens et a vu naître le fils de l’un d’entre eux, l’écrivain François Cavanna. Afin de leur rendre hommage, la ville a décidé, à l’occasion d’un projet immobilier situé au milieu de la Grande rue, de demander à son promoteur, Cogedim, d’accueillir une statue incarnant cette communauté dans le jardin de la résidence, qui soit visible depuis la rue.

Choix d’Elisabeth Cibot

Le choix de l’artiste se porte sur la sculptrice nogentaise Elisabeth Cibot (auteur notamment de la monumentale statue de Jean-Paul II à Lyon) en 2008. Il s’agit initialement de créer un bas-relief représentant le viaduc, puis une statue de maçon italien, et finalement une plumassière. Car il y avait à Nogent une entreprise de nettoyage de plumes d’autruche destinées à décorer les chapeaux qui employait beaucoup de femmes italiennes.

Débat sur le financement de la statue en Conseil municipal
Début 2011, le Conseil municipal vote la participation de la ville au financement de cette statue. Il est bien précisé que cette statue représentera une plumassière mais pas qu’elle sera inspirée du profil de Carla Bruni-Sarkozy. Au sein de l’opposition et même de la majorité, cette participation à hauteur de 41 672 € (le coût total doit être de 96 532 € mais le reste est payé par le promoteur Cogedim) fait néanmoins grincer des dents car trop onéreuse, et les élus d’opposition regrettent qu’il n’y ait pas eu d’appel d’offre. Ce à quoi le maire, Jacques JP Martin, répond qu’il s’agit d’un projet privé et qu’il n’y a donc pas lieu de procéder à un appel d’offre. “Notre participation vise simplement à permettre à cette statue d’être de meilleure facture et de plus grande dimension“, indique-t-il alors. La statue, en bronze, doit en effet faire 2,50 mètres de haut. (Voir article détaillé sur ce débat ou écouter le débat en séance à partir du temps 1h45:35).

Le nom de Carla Bruni-Sarkozy apparaît
C’est fin novembre 2011, à l’occasion d’une exposition d’Elizabeth Cibot au Carré des Coignard, qu’une première maquette de la fameuse statue de plumassière est présentée et qu’Elizabeth Cibot explique qu’elle s’est inspirée de Carla Bruni-Sarkozy à la demande du maire. (Voir le commentaire de Marie-France Godin sur notre site).

L’affaire devient nationale
En janvier 2012, Nogent Démocratie (parti politique local) dénonce cette dépense dans sa lettre d’information. Hier, c’est le journal le Parisien qui a consacré une  de ses pages nationales à cette affaire, reprise quelques heures plus tard par l’AFP et l’ensemble des médias, de Libération  à Gala en passant par le Télégramme.

La Commission des comptes de campagne saisie
Le même jour, Michel Gilles, conseiller municipal d’opposition, saisit la Commission nationale des comptes de campagne pour demander la réintégration du financement de cette statue dans les comptes de Nicolas Sarkozy. “Bien que cette initiative n’est probablement pas été conçue par l’équipe de campagne du candidat Nicolas Sarkozy, elle participe de fait à la campagne et doit à ce titre être rattachée au compte de campagne de Nicolas Sarkozy. Les contribuables nogentais n’ont pas à financer, à leur insu, une telle action. Je vous demande donc de nous aider à obtenir le remboursement de cette dépense inscrite par erreur au budget de la ville de Nogent sur Marne” motive-t-il dans son courrier.

De son côté, EELV Nogent sur Marne a également demandé officiellement au maire de revenir sur cet investissement. “Rendre hommage aux italiennes ouvrières, en imposant le portrait de la 1ère dame de France, ajoute aux mauvais choix d’un maire qui se veut être 1er de la classe en terre Sarkozienne. Après les arrêtés anti-pauvres, l’armement de la police municipale, l’installation de caméras de vidéo-surveillance, le refus d’application de la loi SRU, Monsieur Jacques JP Martin se raccroche à l’image du couple Sarkozy pour ne pas perdre la face”, dénonce le parti écologiste dans un communiqué.

Pour le MoDem nogentais encore, le conflit d’intérêt est évident. “Un maire représentant l’UMP qui décide que la sculpture doit s’inspirer de l’épouse du président de son parti présente un conflit d’intérêts évident, qui plus est en période électorale. Dans le même ordre d’idée, pourquoi ne pas demander aux enfants de nos écoles de préparer un spectacle de fin d’année s’inspirant de la vie ou des chansons de Mme Carla Bruni-Sarkozy sous prétexte du jumelage de notre ville avec une ville italienne ? Ou encore modifier le logo représentatif de notre ville en s’inspirant de celui de l’UMP ?” s’interroge son représentant local, David Jourdan.

Quant au PS William Geib, également opposé à cet hommage à la première dame, il a ironisé en indiquant qu’elle avait sans doute vu plus de plumes sur les chapeaux dans les galas que dans les usines.

Le maire dément que la ville doive payer
Dernier rebondissement, selon une dépêche de l’AFP parvenue hier soir à 18 heures,  le maire a démenti que la mairie doive financer la réalisation de cette statue à hauteur de 41 672 euros et expliqué que le promoteur immobilier supporterait la totalité du montant de la fabrication. Il a en outre précisé que la date d’inauguration de la sculpture n’était pas encore arrêtée. “Elle aura lieu après l’élection présidentielle pour ne pas que l’on puisse dire que j’avais, avec cette statue, un quelconque objectif politique”, a-t-il affirmé.

Suite à cette information, Michel Gilles a demandé au maire de bien vouloir s’expliquer sur ce dernier élément lors du Conseil municipal de ce soir, et préciser si la délibération du 27 janvier 2011 attribuant une participation de 41 672€ pour financer cette statue serait ou non appliquée. La séance, qui se tiendra ce lundi 13 février à 20 heures à la Scène Watteau, promet d’être animée…

Marc Arazi, conseiller d’opposition (Nogent c’est maintenant) a également indiqué qu’il réclamerait tous les documents contractuels passés entre la ville, Cogedim et l’artiste pour faire la transparence sur ce dossier.

En soirée, le site internet de la Mairie de Nogent-sur-Marne diffusait un communiqué dont le Maire devrait donner lecture lors du Conseil municipal de ce soir.

Explications d’Elisabeth Cibot
De son côté, la sculptrice Elisabeth Cibot, embarrassée par cette effervescence soudaine, s’est expliquée en indiquant qu’il ne s’agissait pas d’une statue de Carla Bruni mais d’une femme italienne, et que son visage était simplement inspiré de Carla afin de lui donner un air contemporain. Carla Bruni a simplement posé pour une séance de photos. Voir ci-dessous la vidéo Le Parisien-Aujourd’hui.

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