Education | | 25/09/2013
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Affaire de l’Institut Epin : le préfet promet de réagir

Affaire de l’Institut Epin : le préfet promet de réagir

EPIN VITRY SUR SEINEEtablissement privé laïque affichant d’enviables résultats au bac, l’institut Epin de Vitry-sur-Seine est dans la ligne de mire des élus locaux depuis qu’un audit de l’école commandité par le syndicat Sundep a rendu compte des impressionnants bénéfices (proches du montant des subventions publiques perçues par l’école) transférés à une holding privée au lieu d’être réinvestis dans l’école. Brûlant, le sujet s’est invité au menu lors de la séance exceptionnelle du Conseil général de ce 23 septembre consacrée au rapport d’activité de l’Etat dans le département par le préfet. Explications.

Créé entre les deux guerres mondiales par Lucien Epin, l’institut qui porte son nom figure parmi les premiers établissements à être à la fois privés et laïques. Aujourd’hui, il accueille plus de 600 élèves au collège et lycée, dont plus de la moitié de Vitriots.

Qui possède quoi ?

L’établissement est racheté par Pierre Jacob en 1955. C’est lui qui déménage en 1975 l’établissement au 17-19 avenue Eugène Pelletan, en place d’un ancien pensionnat religieux, afin de le développer. Il transmet la direction à Alain Jacob en 1982. En 2001, Joël Marmuse (décédé en 2007) rachète l’établissement mais la famille Jacob reste propriétaire des terrains et bâtiments via une SCI (Société civile immobilière). Joël Marmuse opère à partir de deux entreprises différentes. La Société Epin qu’il a rachetée fonctionne en effet contractuellement avec une holding, la sarl J2M, dont il est actionnaire à part égale avec Odette Mariller. Selon le Sundep (Syndicat des personnels de l’enseignement privé), la société correspondant à l’institut devient alors un simple fonds de commerce qui correspond à la vente du contrat d’association à la holding J2M. «On est alors passé progressivement à une véritable marchandisation de l’école», regrette le syndicat dans un communiqué au sein de sa revue interne, Contrepoint.

Suite au décès accidentel de Joël Marmuse en 2007, son épouse Marie-Paule Marmuse et son fils Maxime Marmuse prennent à la fois la cogérance de J2M et de la société Epin. La direction de l’institut Epin est en outre déléguée à Jean-Yves Mariller, un expert-comptable par ailleurs partenaire d’affaires de Joël Marmuse. Outre le collège-lycée Epin de Vitry, la holding J2M fonctionne avec des instituts de formation en alternance, à l’instar de l’ICA Sup ou l’IFCAE situés à Cergy Pontoise dans des locaux détenus par une SCI appartenant à part égale à Jean-Yves Mariller et la famille Marmuse.

Subventions publiques

En tant qu’établissement privé sous contrat, l’Epin bénéficie de subventions obligatoires de la part du Conseil général du Val-de-Marne (243 000 euro par an) pour la partie collège et de la part du Conseil régional d’Ile-de-France (148 000 euros par an) pour la partie lycée, ainsi que de la mise à disposition par l’Education nationale d’une cinquantaine de personnels. Ces subventions, qui représentent 42% des recettes de l’école, doivent permettre à l’établissement de fonctionner sereinement et d’investir dans l’avenir. Les frais de scolarité s’élèvent pour leur part à environ 1500 euros par élève et par an.

Une expertise pointe des bénéfices et dividendes importants

Pourtant, en 2010, le syndicat Sundep estime que le compte n’y est pas. «Nous nous sommes rendu-compte que le niveau très élevé des dividendes s’accompagnait d’une pression très forte pour diminuer toutes les dépenses en personnels et en moyens (…). Les locaux sont exigus et vétustes et on entasse les élèves à 33 par classe», reproche le syndicat. C’est dans ce contexte, et celui d’un conflit judiciaire entre l’Epin et le propriétaire des bâtiments (les anciens propriétaires de l’école) que le syndicat fait voter par le CE (Comité d’établissement) fin 2012 une expertise comptable indépendante.

Les conclusions de cette expertise, réalisée par le cabinet Apex, sont rendues en mai 2013. Elles témoignent d’excellents taux de profit de l’établissement, de l’ordre de 13% à 14% des recettes. Face à ces chiffres, le syndicat questionne le devenir de ces importants bénéfices. «Il est légitime de s’interroger sur les 1,36 millions d’euros reversés en cinq ans à la société mère qui s’avère être une holding financière possédant trois autres établissements de formation en alternance hors contrat, à but complètement lucratif», pose le Sundep qui constate qu’en parallèle, les frais de scolarité vont augmenter de 4% cette année. Voir le tract du syndicat.

Les élus demandent le réexamen de l’agrément de l’Epin

Au printemps 2013, le Sundep rend compte de la situation aux élus locaux de la ville, du Conseil général, du Conseil régional, ainsi qu’à l’Education nationale. En réaction, la vice-présidente du Conseil régionale, Henriette Zoughebi, et le président du Conseil général, écrivent au ministère de l’Education pour faire part de l’affaire et demander à ce que soit réexaminé l’agrément qui permet à l’Epin de recevoir des subventions publiques. (Voir les courriers des élus sur le site du maire-adjoint de Vitry, Bertrand Portier).

La Chambre régionale des comptes est-elle compétente ?

De son côté, Jacques Perreux, conseiller général et régional EELV, suggère plutôt de saisir la Chambre régionale des comptes (CRC) pour examiner la situation et de mettre tout le monde autour de la table pour trouver une issue. «La suppression de l’agrément risquerait de mettre en péril l’établissement. Mieux vaut réaffecter l’argent de manière effective pour diminuer les frais de scolarité, alors que beaucoup de familles modestes envoient leurs enfants dans cette école, et investir dans la pédagogie», explique l’élu. (voir sa position sur son site). Il demande donc au préfet du Val de Marne, par écrit dès le mois de juin, puis par oral ce lundi 23 septembre, de saisir la CRC. Questionné sur le sujet, Thierry Leleu, préfet du Val de Marne, s’est engagé à répondre dans les meilleurs délais tout en s’interrogeant sur la possibilité de saisir la CRC. En effet, si une école privée peut saisir la Chambre régionale des comptes en cas de refus d’une collectivité locale de payer la subvention obligatoire, la réciproque ne va pas de soi car les CRC ne peuvent que se pencher sur les comptes des collectivités locales ou de leurs satellites.

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