Ce vendredi 14 mars, le Festival de Films de Femmes (FIFF) de Créteil entamera la première journée de sa 36ème édition. Depuis sa création, Jackie Buet, la fondatrice et directrice historique du festival, se bat pour faire rayonner le travail des femmes derrière la caméra. Entretien.
Quelle est l’orientation thématique du festival cette année ?
2014 est l’année croisée de la France et du Vietnam, qui célèbre la collaboration entre nos deux pays. A cette occasion, le FIFF prendra la forme d’une grande rétrospective de réalisatrices vietnamiennes. Ce sera la première fois qu’un programme réunira quinze films de réalisatrices de ces deux nationalités. C’est une vraie nouveauté, c’est pourquoi nous avons souhaité participer. D’autres thèmes tels que le corps, le sport et bien sur les femmes sont au programme. Ce sera notamment l’occasion de rencontrer des femmes qui font des études au CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique) afin de travailler sur la notion de genre et sur la façon dont se construit le corps à travers l’éducation, les compétitions. Ce sera aussi l’occasion de se pencher sur la place des femmes dans les milieux sportifs et plus particulièrement sur le fait que les compétitions sportives féminines sont mal représentées dans les médias puisqu’elles sont très rarement retransmises.
Quelles sont les spécificités de cette 36ème édition ?
Une certaine volonté féministe et politique. Cette année sera marquée par la venue de Kate Millett qui a été une pionnière du féminisme dans les années 70. Elle est l’auteur de l’ouvrage “La politique du mâle”, qui avait fait beaucoup de bruit à l’époque. C’était la première fois, après Simone de Beauvoir, qu’un ouvrage parlait de la situation des femmes dans les principaux pays du monde. Sa présence sera vraiment un événement important par rapport au débat polémique sur le genre qui sévit en ce moment en France. Nous l’avons aussi invitée pour montrer son premier film, “Three lives”, qui dresse le portrait de trois femmes. Il a été réalisé en 68, au début du mouvement de libération des femmes aux Etats-Unis. A l’époque parler de sa vie privée c’était aussi parler politique et l’importance de ce film c’est justement de donner la parole aux femmes sur ces sujets.
Comment s’opère la programmation ?
Elle s’anticipe au moins six mois à l’avance. On se déplace dans des festivals à l’étranger et nous avons des correspondants dans de nombreux pays comme le Canada, l’Allemagne ou l’Italie, qui nous envoient des informations. Par ailleurs, en juillet, nous ouvrons un réseau d’inscription sur internet. Nous y recevons énormément de propositions car nous sommes une vitrine pour les réalisatrices du monde entier. Cette année il y a eu environ 2000 inscrits et nous en avons retenu 150.
Sur quels critères effectuez vous votre sélection ?
A la fois sur des critères objectifs de réalisation, de lumière, de jeu, de scénario, et sur d’autres critères plus subjectifs, de goût des gens qui composent notre comité de visionnement et qui établissent des fiches. Lorsqu’on a tout vu, on essaye aussi de faire un choix pour que toutes les cultures soient représentées. Cette année par exemple, nous avons programmé pour la première fois un film de Singapour.
Comment le festival a t-il évolué au fil des ans ?
En 1979, nous n’avions que trente films en sélection. Heureusement, depuis, le cinéma féminin est moins marginal. Malgré la difficulté, et grâce aux écoles de cinéma, les réalisatrices sont plus nombreuses. Avec le temps, les filles ont manifesté l’envie de passer derrière la caméra, de partager leur regard sur le monde. Elles ne s’épanchent pas seulement sur les femmes, elles abordent tous les thèmes. Politique, économie, environnement, solidarité… elles se mêlent de tout et essayent de mettre des héroïnes en premier plan de leurs fictions.
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