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Entreprises | | 29/04/2014
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Gilbert Szajner : “Avec Laguiole, j’ai créé des centaines d’emplois”

Gilbert Szajner : “Avec Laguiole, j’ai créé des centaines d’emplois”

Pantoufles LaguioleA Saint-Maur-des-Fossés, Gilbert Szajner, propriétaire des licences de marque Laguiole,  en a ras le bol de jouer les salauds de service, le fossoyeur de terroir vendu au made in China. “J’ai créé des centaines d’emplois en France“, explique-t-il à 94 Citoyens. Retour sur un parcours entrepreneurial commencé dans les années 1980.

A l’époque, Gilbert Szajner s’occupe de la ligne haute technologie céramique chez Péchiney, dont les applications vont des têtes de missile aux prothèses de hanche. En ce début des années 1980, les couteaux en lame céramique blanche, aujourd’hui largement répandus en France, ne sont pas encore commercialisés dans l’hexagone. Ils existent en revanche au Japon, en pointe sur ce segment. Gilbert Szajner veut décliner le savoir-faire céramique pour créer des couteaux mais aussi des stylos roller et des montres. Un micro marché qui n’intéresse pas Péchinay. A 36 ans, l’ex-salarié se lance en solo en 1985, en faisant ses armes aux Nouvelles Galeries et via l’émission Téléshopping de Pierre Bellemarre.

Pour promouvoir sa ligne coutellerie et envisager une diversification, l’entrepreneur va voir le patron d’Opinel qui n’est pas intéressé, puis cherche à rencontrer celui de Laguiole. Sauf que des fabricants de Laguiole, il y en a des dizaines, issus un peu de Laguiole, beaucoup de Thiers (capitale française de la coutellerie) ou encore d’ailleurs. “A l’époque, j’ai écrit à la

Laguiole Jardinier
commune mais n’ai pas reçu de réponse“, précise-t-il. En creusant la question  autour de la marque Laguiole,  Gilbert Szajner découvre le vide juridique. Et en 1993, il dépose la marque dans plusieurs catégories pour vendre non seulement des couteaux mais aussi de nombreux produits dérivés (Le droit des marques fonctionne en effet par catégorie précise de produits). La gamme de Laguiole SAS va aujourd’hui des arts de la table à l’outdoor en passant par l’écriture, les vêtements de sécurité, l’électroménager, les lunettes, les pipes, les engrais et bientôt la gastronomie.

Bientôt un magasin Laguiole à Paris

Gilbert Szajner
La réussite ne s’est pas faite par magie. Quand j’ai lancé les stylos, cela n’avait rien d’évident, il a fallu expliquer au marché que ces stylos étaient beaux. J’ai travaillé la marque pendant des années et ne me suis pas contenté de l’acheter“, se défend Gilbert Szajner. Concrètement, le développement s’effectue uniquement sous forme de licences accordées à différentes manufactures. La SAS Laguiole ne compte qu’une seule personne, la conjointe de Gilbert Szajner. “30% de la production est fabriquée en France: la vaisselle par Arc international dans le Nord, les pipes à Saint-Claude dans le Jura, les lunettes également dans le Jura, les pantoufles dans le Limousin et encore une partie des couteaux et ciseaux  à Thiers. Fin 2014, ce-sont 400 emplois qui seront générés indirectement par Laguiole SAS en France. 30% des produits sont exportés ou ré-exportés”, détaille l’homme d’affaires. Prochaine étape : l’ouverture de magasins en propre. Le premier est prévu à Paris d’ici l’été et un second est déjà envisagé à New-York indique Gilbert Szajner.

Bataille juridique

Entre temps, la commune de Laguiole a réalisé le manque à gagner de cette exploitation en licence qui lui passe sous le nez. D’autant que Gibert Szajner veille son patrimoine comme du lait sur le feu et ne laisse rien passer, attaquant systématiquement tous ceux qui déposent une marque trop proche dans les catégories pour lesquelles il est le seul détenteur de la griffe. Sûre de son droit en raison de l’appellation de la ville, la

panneau-laguiole
bourgade en colère ne cherche pas à négocier et va en justice. Une longue bataille juridique commence qui ne donnera jamais raison au bourg de l’Aveyron. Seule semi-victoire, la cour décrète en 1999 que, dans la mesure où des dizaines voire centaines de fabricants de couteaux Laguiole existent déjà en se revendiquant de l’appellation, celle-ci devient un terme générique et ne peut pas être appropriée comme marque. Tout le monde, de Laguiole à Pékin peut donc fabriquer des couteaux Laguiole. De même, le fromage de Laguiole, l’autre spécialité de ce village, est-il protégé par une appellation d’origine contrôlée liée au lieu de sa production, mais ce label est réservé aux produits alimentaires. Pour les autres produits dérivés, la ville ne peut se revendiquer de la marque Laguiole. Les entreprises qui fabriquent à Laguiole ont le droit de communiquer sur le lieu mais pas d’en faire un label.

Une pétition au succès fulgurant

C’est dans ce contexte, après plusieurs échecs en justice, que le bourg a fini par en appeler au président de la République pour récupérer son nom, et lancé il y a quelques jours une pétition au succès fulgurant sur Internet (103 000 signatures en ce 29 avril au soir contre 35 000 il y a 48 heures!). “Il y a en France 30 000 dépôts de marque qui correspondent à des noms de ville ou de village comme Montblanc, Lacoste, Hermes, Gap, Chambourcy, Vichy… Pourquoi cette émotion spécifiquement à propos du village de Laguiole? Et pourquoi ne pas rappeler que les autres fabricants de Laguiole ont aussi une part de leur production en Chine ou ailleurs à l’étranger?”, s’interroge Gilbert Szajner, qui ne nie pas avoir tenté d’autres valorisations de noms de communes. “J’ai contacté Versailles et Saumur, mais ces communes ont déjà des litiges à gérer à propos de leur nom!“, précise-t-il.

En attendant le prochain épisode, des petits malins continuent à déposer des marques proches en jouant sur l’effet terroir. Ainsi, une société basée dans l’Essonne, NKM (aucun rapport avec la députée UMP) vient-elle de déposer la marque Laguiole terre d’Aubrac pour ses couteaux début avril, après avoir déposé Laguiole Bougna, sans cacher pour autant sur son site Internet ne vendre que des produits d’importation…

 

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