Transports | | 07/01/2014
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Grand Paris Express : unanimité contre le changement de tête à la SGP

Grand Paris Express : unanimité contre le changement de tête à la SGP

Grand Paris ExpressEn plein sprint pour lancer les nouvelles lignes de métro du Grand Paris Express, la Société du Grand Paris (SGP), maître d’ouvrage de cet énorme chantier, devrait changer de patron d’ici quelques jours. Une décision annoncée pendant la trêve des confiseurs et unanimement désapprouvée par les collectivités, élus et personnels de l’entreprise. Explications. 

Rappel du contexte
La Société du Grand Paris (SGP) est un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) dépendant de l’Etat et  en charge de la réalisation du Grand Paris Express, ensemble de nouvelles lignes de métro, dont une ligne périphérique (n°15) qui fera le tour de Paris par l’extérieur, plusieurs autres lignes de banlieue à banlieue et le prolongement de la ligne 14 au nord comme au sud. Autant de nouveaux tracés destinés  à désengorger les transports parisiens et faciliter la circulation depuis et vers la banlieue. Cette société est dirigée au niveau opérationnel par un directoire et dispose aussi d’un Conseil de surveillance, présidé par le député-maire UDI d’Issy-les-Moulineaux, André Santini,  et d’un Comité stratégique, instance de concertation et de débat, présidé par le député-maire PS de Cachan Jean-Yves Le Bouillonnec.

Un nouveau dirigeant issu de Matignon

Philippe Yvin
Alors que la SGP est dirigée au niveau opérationnel (directoire) par Etienne Guyot, ancien préfet et ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur,  depuis juillet 2011  (voir contexte de l’époque), c’est Philippe Yvin (photo), actuel conseiller en charge des collectivités territoriales et de la décentralisation au sein du cabinet du Premier ministre Jean-Marc Ayrault après avoir été directeur général des services du Conseil général de Seine-Saint-Denis – alors présidé par Claude Bartolone, qui  devrait prendre sa tête.

Concrètement, cette proposition émanant du gouvernement devrait être soumise le 21 janvier au Conseil de surveillance, instance composée de 9 élus locaux (présidents des conseils généraux d’Ile de France et du conseil régional) et de 11 représentants de l’Etat (voir composition). Rien n’est donc encore acté officiellement mais l’Etat dispose de la majorité absolue au sein de l’établissement.

Quel rôle pour la SGP dans la métropole ?

Cette décision peut s’expliquer politiquement, alors que Philippe Yvin, actuel conseiller décentralisation du Premier ministre, a pris part à la réflexion sur la loi sur les métropoles récemment votée au parlement et pourra donc porter la vision métropolitaine du gouvernement au sein de la SGP. Une nomination qui pose indirectement la question du rôle de la SGP dans la métropole parisienne. Concrètement, la Société du Grand Paris, même si elle dispose, en vertu de la loi de 2010 (voir article 7V), de compétences d’aménageur autour des gares, s’est engagée à ne pas y recourir à moins d’être sollicitée par les élus locaux. Son coeur de métier est aujourd’hui la réalisation du réseau de transport du GPE, un chantier déjà complexe qui implique beaucoup d’opérations en parallèle et une liaison étroite avec les collectivités concernées dans ce dense tissu urbain. Elle est en revanche impliquée, à titre consultatif, à la construction de la métropole, participant par exemple à des réunions sur les contrats de développement territorial directement liés aux constructions de nouvelles gares.

 Risque d’impartialité et de retards de calendrier ?

Du côté des élus locaux impliqués dans les questions métropolitaines, ce changement pressenti  suscite la réprobation générale. A la veille de la nouvelle année, le président PCF du Conseil général du Val de Marne, Christian Favier, s’en était du reste alarmé de manière préventive dans un communiqué, alors que la rumeur de ce changement de tête circulait déjà dans les couloirs. “Ce serait un très mauvais signe donné quant à la mise en chantier du projet de métro du Grand Paris Express, s’était-il inquiété. Alors que la SGP vient de voter un budget d’investissement historiquement haut pour 2014, année des premiers travaux du Grand Paris Express, toute l’énergie de la SGP doit être mobilisée vers la réalisation de ces travaux. Le travail effectué depuis plus de deux ans par Etienne Guyot et les équipes de la Société du Grand Paris est reconnu et apprécié par l’ensemble des élus et des acteurs concernés.

Pourquoi changer une équipe qui gagne ?

Président du Comité stratégique, Jean-Yves Le Bouillonnec partage cette conviction et affirme également ses vifs regrets à la perspective de déconstruire une équipe qui gagne et a réussi à donner à la SGP une image d’impartialité.  «La SGP  travaille très bien. L’ingénierie et les structures de la SGP sont extrêmement performantes et la concertation avec les élus est reconnue de tous. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi provoquer à cet instant un tel changement qui, je le crois,  va fortement mettre en cause, et le rythme du travail que nous conduisons actuellement,  et le cadre pertinent des rapports entre la SGP et les élus, alors même que se tient le travail préparatoire à l’enquête publique de la partie nord de la ligne rouge. J’ai fait connaître mon point de vue et l’ai exprimé publiquement lors du comité stratégique de fin 2013. Actuellement, la SGP s’est positionnée dans une situation de parfaite neutralité et c’est pour cela qu’elle a réussi», indique-t-il à 94 Citoyens.

Ce mardi 7 janvier à la cérémonie des voeux du Conseil général du Val-de-Marne, à laquelle était présent l’actuel président du directoire, Etienne Guyot, tous les élus étaient à l’unisson, du président Christian Favier qui n’a pas manqué saluer dans ses voeux les réalisations de l’actuel dirigeant, au président socialiste du Conseil régional, Jean-Paul Huchon, qui a confié être franchement hostile à cette proposition et avoir bien l’intention de le faire savoir lors du Conseil de surveillance. Le matin même, c’est le bureau de Paris Métropole qui avait réaffirmé son soutien au président actuel.

Un personnel déboussolé

Le changement inquiète également les ingénieurs et personnels de la SGP qui carburent sur les nouvelles lignes pour tenter de respecter les délais. “Il s’agit du plus grand chantier d’Europe, c’est un immense paquebot à piloter. Annoncer en pleine période de fêtes le changement de capitaine a plongé tout le monde dans le désarroi”, témoigne Christian Garcia, secrétaire général du Comité d’entreprise qui fait figure de pionnier du projet, déjà chargé de mission au sein d’Orbival (association d’élus à l’initiative du tracé Val-de-Marnais repris dans la ligne 15 sud) avant même la naissance du Grand paris express. “Nous sommes abasourdis par cette nouvelle alors que la maîtrise du projet nécessite de rester sereins et concentrés et que le président actuel fait l’unanimité au sein du personnel, ce qui n’est pas si fréquent!“, insiste-t-il. Les représentants du personnel ont prévu de demander audience à la ministre de l’Egalité des territoires, Cécile Duflot, pour s’assurer de la pérennité du calendrier et des rythmes d’investissement et d’embauches.

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