Tiers-lieux, espaces de co-working, télécentres, centres d’affaires… autant de concepts de la même mouvance qui promettent de révolutionner la vie active au-delà du périph. Tout le monde est sur les rangs, des startups aux grands groupes en passant par les villes. Explications.
Gain de temps, d’énergie et d’argent gaspillé dans les transports, conditions plus professionnelles que son propre domicile et ses interférences domestiques pour le télétravail, confort technologique moderne (Wi-fi sécurisé, Internet très haut débit, salles de réunion avec dispositif de visio-conférence, reprographie…), cadre soigné permettant, pour des auto-entrepreneurs ou petites PME, de recevoir leurs clients et partenaires dans de meilleures conditions qu’au café ou autour d’un coin de bureau sur des pliants… les télécentres, solutions de bureaux et salles de réunions partagés de nouvelle génération, promettent de rapprocher le travail des habitants dans des conditions ergonomiques optimales.
Trois cibles sont visées : les grands groupes dont une partie des salariés travaillent loin du siège et n’en peuvent plus de faire le trajet tous les jours. Pour ces dernières, les télécentres permettent de s’assurer que son salarié est bien dans un espace de travail et pas en train de s’occuper des enfants, et cette solution peut aussi s’intégrer dans leur stratégie immobilière. Les deux autres cibles sont les petites PME et les professionnels indépendants type auto-entrepreneurs. Ce marché en devenir est pris très au sérieux, qui a fait l’objet d’une étude de perspective par la Caisse des dépôts et consignations en début d’année, en partenariat avec des chercheurs de l’Ens Cachan et du cabinet PMP. Ses conclusions sont encourageantes. L’étude prévoit qu’en 2025, 2.3% des actifs télétravailleront en télécentres en Ile de France et 1.1% en régions. Ce qui représenterait un marché de 438 télécentres (67 265 places fréquentées par 171 326 personnes) répartis entre 318 en Ile de France et 120 en régions. Un scénario plus ambitieux imagine également que 9,2% des actifs fréquentent les télécentres en 2025, qui représenterait un potentiel de à 826 télécentres en Ile de France et 600 en régions !
Mais le marché reste à créer et les clients à évangéliser. Aujourd’hui, 80% des personnes qui télétravaillent le font à domicile. Et si les espaces de coworking se développent, il n’y a pas encore de réseau structuré qui permettrait à une grande entreprise d’avoir des relais dans toute la banlieue par exemple.
Les ambitions ne manquent pas, des villes qui y voient l’opportunité de développer l’activité économique dans leur périmètre aux opérateurs immobiliers. Ainsi Nexity vient-il de lancer le concept Blue Office et a déjà ouvert le 1er octobre deux télécentres d’environ 2000m2 chacun à Massy (Essonne) et Alfortville (Val de Marne), à côté de Chinagora et près de la ligne de métro 8. Trois autres doivent suivre à Maisons-Lafitte et Noisy-le-Grand le 3 novembre puis Saint-Quentin-en-Yvelines le 5 janvier. Le promoteur immobilier s’est entouré pour cela de plusieurs prestataires technologiques comme SFR ou Cisco. Un site Internet permet de réserver dans le télécentre de son choix en trois clics, avec des tarifs identiques partout. «C’est un nouveau marché qu’il reste à expérimenter. Nous allons apprendre pendant un an mais avons souhaité passer de la théorie à la pratique. Nous sommes peut-être un peu en avance en nous lançant dès maintenant mais il s’agit d’un investissement de long terme», explique Arnaud Violette, directeur général Blue Office chez Nexity. L’agencement, signé Saguez & Partners, a été bichonné pour donner envie de bosser sur place, et le lieu se veut convivial avec thé, café, viennoiseries à volonté. A défaut d’augmenter les salaires, la question du bien-être constitue en effet un paramètre important dans l’attractivité des employeurs. Plusieurs prospects s’apprêtent à s’y poser, des TPE- PME voisines qui ont occasionnellement besoin de places aux grands groupes dont le siège est de l’autre côté de la capitale. Après ces 5 premiers sites, devraient suivre en 2016 Saint-Ouen, Ermont Eaubonne… «Nous prévoyons une vingtaine d’implantations en Ile de France et une dizaine en région d’ici à 2020», explique Arnaud Violette.
En parallèle Regus, spécialiste d’espaces de travail flexibles qui en compte une soixantaine en France et 2000 dans le monde, s’est associé à la Caisse des Dépôts et Consignations et à Orange pour créer le réseau Stop & Work, dans le même esprit, à ceci-près que l’opérateur s’associe en amont aux collectivités locales pour déployer ses espaces et en faire la promotion. C’est le cas du premier télécentre qui vient d’ouvrir début octobre sur 1200 m2 à Fontainebleau (Seine-et-Marne), en face de l’Insead. La ville a mis à disposition l’espace et y a transféré une pépinière d’entreprises. D’autres unités devraient être annoncées sous peu dans le Val de Marne et ailleurs en périphérie. Objectif : une cinquantaine de sites en France à terme, dont une quinzaine en Ile de France dans les deux ans, en plus du réseau de Régus. «Nous comptons aussi aller au-delà de l’Ile de France, dans des départements comme l’Oise, l’Eure ou l’Eure et Loire où s’effectuent des mouvements pendulaires de salariés importants», précise Bruno Mahieux, directeur grands projets chez Orange Business Services. Stop & Work vise en priorité les Pme-Tpe locales, puis les grands comptes quand l’effet réseau sera atteint.
Gares et Connexion (SNCF), qui gère un réseau de 380 gares en Ile-de-France, a pour sa part lancé début 2014 un Appel à Manifestation d’Intérêt (Ami) pour développer des tiers-lieux à proximité des gares de la seconde couronne francilienne.
La région Ile de France a également apporté son soutien à 14 projets d’espaces de co-working via son agence numérique La Fonderie (anciennement ARTESI). L’un d’eux a ouvert à Vincennes en décembre 2013, sous l’égide de l’association Cowork in the city.
Dans le Val de Marne, la première initiative de réseau de télécentres revient à l’incubateur d’entreprises Yann Gozlan, fondateur de Creative Valley, qui s’est associé au groupe Brémond pour ouvrir dès novembre 2013 deux Creative center au Kremlin-Bicêtre et à Ivry-sur-Seine, et s’apprête à en ouvrir un troisième d’ici quelques jours à Nogent-sur-Marne. L’opérateur local vise une douzaine de centres à terme, avec un positionnement différent, non pas orienté télétravail mais développement du tissus de TPE et PME locales innovantes, en développant les synergies entre toutes ces jeunes pousses locales et s’associant avec des écoles spécialisées dans les nouvelles technologies comme l’Epitech. Une démarche qui passe par les centres en dur mais aussi via Internet avec un réseau social thématique de l’innovation. Voir article détaillé.
Pour en savoir plus sur le marché des télécentres et ses perspectives : télécharger l’étude de la Caisse des dépots et consignations de mars 2014.
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