De 11 heures sous le soleil à 13 heures sous la grêle ce mercredi 4 mars, les prises de parole se sont succédé devant l’hôpital militaire Bégin, des élus fontenaysiens arborant leur écharpe tricolore aux délégués syndicaux en passant par les personnels soignants -non militaires en raison du devoir de réserve- et quelques futures accouchées.
Sur le trottoir, une large banderole a été dressée pour réclamer le maintien dans l’hôpital militaire de la maternité, dont la fermeture le 30 juin 2015 a été annoncée au personnel le 9 février. “La maternité est le symbole de cet hôpital“, rappelle une soignante en montrant l’emblème de l’institution où l’on peut reconnaître le berceau d’Eugène Louis Napoléon orné de l’aigle impérial. Alors que l’hôpital militaire venait juste de recevoir son ordre de construction par Napoléon III pour accueillir les blessés de la guerre de Crimée en 1955, l’histoire veut en effet que sa femme, l’impératrice Eugénie, qui avait subi deux fausses-couches, s’arrêta sur ce site du bois de Vincennes pour prier une statue de la vierge Notre-dame de Lorette, quelques mois avant la naissance de son fils unique Eugène Louis. Un miracle qui donna lieu à l’érection d’une chapelle toujours en place dans le parc de l’hôpital. La maternité de l’hôpital ne fut en revanche ouverte qu’après 1947, en plein baby-boom.
“Je vais accoucher ici de mon deuxième enfant en avril, témoigne Elodie. J’ai découvert la maternité Bégin lors de ma première grossesse, alors que j’habitais à Fontenay-sous-Bois. Aujourd’hui j’habite à Chennevières-sur-Marne mais je suis revenue ici pour l’accueil, la gentillesse et l’écoute. J’ai appris la fermeture en appelant pour prendre un rendez-vous”, détaille la jeune femme. “Comment vont faire les mamans qui habitent à côté. L’Hôpital Trousseau est déjà surchargé“, pose une soignante. En principe, quatre hôpitaux doivent se répartir les 1100 accouchements de l’hôpital : Tenon et Trousseau à Paris, l’hôpital de Montreuil et les Hôpitaux de Saint-Maurice. Sur cette question, la direction des Hôpitaux de Saint-Maurice indique, qu’en effet, la maternité qui accouche 2800 mères par an a la capacité d’accueillir un peu plus de 300 patientes supplémentaires.
Du côté des personnels soignants, amertume et combativité se mêlent. Se posent aussi beaucoup de questions concernant le devenir imminent de chacun. Sur la quarantaine de personnels concernés, les statuts diffèrent, entre les ouvriers d’Etat, les contractuels, les fonctionnaires, les militaires, les militaires sous contrat… “Il y a 5 CDD dont les contrats s’arrêtent en juin”, s’inquiète Christophe Sauvanet, de la CFTC. “Avec mon statut d’ouvrier d’Etat, il m’est très difficile de changer d’établissement pour aller par exemple travailler dans une crèche. J’ai essayé de le faire il y a quelques années et cela n’était pas possible administrativement”, témoigne Laurence Cordellier, auxiliaire de puériculture. Un vrai casse-tête. Trois entretiens sont prévus pour étudier les situations au cas par cas. En attendant, les syndicats espèrent bien éviter la fermeture. “Nous avons déjà récolté 820 signatures sur notre pétition et envisageons de nouvelles actions. La grève : ce serait vraiment la dernière option“, indique Jacques Prauca, délégué CGT. Un comité technique de réseau doit se tenir le 25 mars pour évoquer la question avec la direction de l’hôpital.
Les élus locaux, eux, affichent majoritairement leur soutien au maintien de la maternité mais pas de manière unanime. Plusieurs parlementaires, les sénatrices et sénateurs Catherine Procaccia (UMP), Laurence Cohen et Christian (Favier) et la députée Laurence Abeille (EELV) ont pris position publiquement pour défendre le maintien de la maternité et Catherine Procaccia, qui s’était faîte initialement confirmer la nouvelle par le gouvernement, est encore montée au créneau lors d’un débat sur les maternités qui se tenait justement ce mercredi en séance, auprès de Marisol Touraine.”La fermeture de la seule maternité de l’armée contredit la volonté de féminisation et d’ouverture qui ne semble être qu’un affichage. L’armée est encore bien dirigée par des hommes pour lesquels la grossesse est synonyme d’une perturbation dans le planning de leurs opérations!” Sur place ce mercredi, Jean-François Voguet, maire PCF de Fontenay-sous-Bois, a dénoncé une décision “inadmissible” et indiqué que la ville voterait un voeu contre la fermeture de la maternité au prochain conseil municipal.
Tout en étant d’accord avec le plan de réorganisation des activités du service de santé des armées, prévoyant le transfert de plusieurs services de Val de Grâce vers Bégin, le maire UMP de Saint-Mandé, Patrick Beaudouin, souhaite pour sa part également trouver une issue positive pour la maternité Bégin, en y augmentant par exemple le nombre d’accouchements, et a envoyé un courrier au ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, pour lui demander d’étudier la continuité des services de la maternité.
A Vincennes en revanche, le maire – conseiller régional UDI Laurent Lafon, n’est pas sur la même ligne. “La fermeture de la maternité n’est pas une bonne nouvelle en soi et je ne m’en réjouis pas. Les habitants ont un lien personnel et affectif avec cette maternité et 30 % des Vincennoises accouchent à Bégin, mais deux raisons incontournables motivent cette décision : la nécessité de réorienter l’offre de soins vers les nouveaux risques militaires et les contraintes budgétaires. Et je ne suis pas de ceux qui demandent la réduction des dépenses publiques sans en assumer les conséquences”, motive l’élu. “Les soins nouveaux qui seront accueillis sur place, comme l’ophtalmologie et l’urologie, bénéficieront aussi à la médecine de ville de proximité et le service de gynécologie hors obstétrique perdurera, comme par exemple les soins du cancer du sein”, ajoute le maire, ajoutant qu’il proposera aux auxiliaires de puériculture qui le souhaitent de venir travailler dans les crèches de la ville.
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