Société | | 05/10/2015
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Fontenay-sous-Bois mobilisé pour défendre sa Marianne du monde

Fontenay-sous-Bois mobilisé pour défendre sa Marianne du monde

La pluie n’a pas découragé les Fontenaysiens, militants Front de Gauche, PS, écologistes, associatifs ou artistes. Entre 100 et 150 étaient au rendez-vous ce lundi 5 octobre à 17 heures pour défendre la Marianne réfugiée de l’artiste Corine Pagny, exposée dans le hall de l’hôtel de ville, alors que le FN du Val-de-Marne avait appelé à manifester à cette même heure.

Du côté du Front National, une quinzaine de militants étaient sur place, dont leconseiller d’opposition de Villiers-sur-Marne Gilles Parmentier, de Créteil Gaétan Marzo, de Champigny Virginie Récher, le représentant du Siel à Fontenay Christian Tollari et même Dominique Bourse-Provence, tête de liste Val-de-Marne aux élections régionales de décembre, lequel en a fait son premier acte de campagne dans le département. Sous une pluie battante, une première confrontation commence, modérée par un cordon policier. “Fachistes, collabos“, clament des contre-manifestants, un autocollant représentant la Marianne qui fait polémique sur leur vêtement. “C’est vous les collabos”, répond un manifestant. Après quelques échanges un peu vifs, sans dialogue, les militants FN rebroussent chemin pendant qu’élus et associatifs fontenaysiens organisent des prises de parole devant l’entrée de la mairie. Suivra quelques instants plus tard une seconde confrontation alors que les militants FN ont entonné une Marseillaise dans la rue. La foule qui s’était rassemblée pour les allocutions se déplace à nouveau, le cordon policier toujours entre les deux. Une seconde Marseille est chantée, cette fois par les contre-manifestants.

Manif et contre manif FN Marianne Fontenay 9

C’est la remise en cause du droit de création, de la liberté des artistes de nous étonner, de nous séduire et même de nous déranger”, insiste le maire PCF, Jean-François Voguet. La réaction de ce parti extrémiste nous rappelle les heures les plus noires de notre histoire, celles où l’on brûlait les livres, les oeuvres… avant de brûler les hommes…” Non présente sur place,  la

Marianne Buste satirique en plâtre de Claude Brune-Gilles credit Assemblée nationale
députée Laurence Abeille a fait porter un communiqué, rappelant “qu’il n’y a jamais eu de buste officiel de la République. Chaque sculpteur est libre de représenter Marianne à sa façon et chaque maire est libre de choisir son modèle.” Voir le texte officiel de l’Assemblée nationale. “A l’Assemblée nationale, une salle recèle des dizaines de Marianne, de toutes les périodes. Elles sont diverses, elles reflètent leurs époques, et l’invention artistique”, pointe l’élue. Dans les vitrines, certaines font même franchement la tête (voir ci-contre).

Gregor Podgorski
“Lorsque l’artiste, Corine Pagny, a appris les réactions autour de son oeuvre, elle s’est demandée si c’était de sa faute, si elle devait avoir honte, je lui ai dit au contraire qu’elle devait être fière“, réagit Gregor Podgorski (photo), organisateur de l’exposition, qui regroupe chaque année 104 artistes contemporains sélectionnés par ses soins. “Ce n’est pas la première fois que nous exposons une Marianne dans cette exposition. L’an dernier, nous en avions une aussi, qui avait un air un peu pochtron, mais cela n’avait pas suscité la polémique car elle était blanche. Cette année, plusieurs artistes travaillaient sur les migrations et nous avons choisi de regrouper cette thématique dans le hall de l’hôtel de ville. En discutant avec Corine Pagny, j’ai lancé, de manière informelle. Si tu veux faire une Marianne, vas-y. Elle a aussitôt répondu avec enthousiasme et a proposé une oeuvre quelques jours après”, explique l’artiste-organisateur. “La Marianne de Fontenay crée par Corinne Pagny fait réagir, débattre, réfléchir ? Tant mieux ! C’est là le rôle de l’art”, pose également Christian Favier, président PCF du Conseil départemental qui a également envoyé un communiqué de soutien à la manifestation, tout comme le PS, EELV et le PCF local.

Manif et contre manif FN Marianne Fontenay 6

Oeuvre de Corine Pagny à partir du portrait d’une jeune réfugiée prise par la photographe Nathalie Bardou dans les campements de Calais en 2014, cette Marianne du monde portant un carton représentant un gros pouce Facebook avec écrit en dessous “like me” juxtapose trois univers : les réseaux sociaux où il est facile de s’engager sur tout et n’importe quoi en levant un pouce virtuel, le symbole de la République et la réalité vécue par cette jeune réfugiée dont on ne voit que le regard dans ce cliché en noir et blanc. Une triple interpellation.

Marianne Fontenay oeuvre de Corine Pagny avec photo de Nathalie Bardoux

Les deux Mariannes se partagent le hall

Dans le hall de l’hôtel de ville, peuplé pour un mois d’oeuvres évoquant l’exil et les affres du voyage, le buste de la Marianne “habituelle” demeure, imperturbable à toute agitation, à l’entrée de la salle d’exposition, en dessous d’un poster Je suis Charlie. Elle n’est simplement plus sur son piédestal habituel. “Nous avons gagné, ils ont été obligés de la sortir du placard du bureau du maire”, se réjouit Virginie Récher. “Le buste n’a jamais été remisé dans le bureau du maire et est toujours resté dans le hall depuis le début de l’exposition“, dément le directeur de cabinet, qui précise que le buste de Marianne ne sert qu’au moment des mariages et des conseils municipaux et qu’aucun conseil municipal ne se tient pendant l’exposition. Et de rappeler comme Laurence Abeille que, de toutes façons, chaque mairie est libre de choisir sa Marianne. “Nous nous demandons pas aux villes de retirer les Marianne en Brigitte Bardot sous prétexte qu’elle est sympathisante FN !”

Marianne Fontenay

 

Du côté du FN, bien que très minoritaire sur le terrain, on estime que cette manifestation a atteint son but. “Nous en avons profité pour aller tracter au RER, et beaucoup ont pris nos tracts, indignés. Quant à la pétition, elle a déjà recueilli 76 signatures“, se réjouit Virgine Récher tout en regrettant un blessé, Christian Tollari, “dont le doigt a saigné longtemps après un accrochage de parapluie.”

Manif et contre manif FN Marianne Fontenay 8

Gildas Lecoq (UDI), président du groupe d’opposition LR-UDI au sein du Conseil municipal de Fontenay, renvoie pour sa part chaque camp dos à dos. “Nous trouvons indécent que les partis d’extrême droite et d’extrême gauche jouent sur un sujet où les habitants attendent autre chose qu’un buzz local. Nous ne participerons pas à ce petit jeu entre amis extrémistes, auto-alimenté autour de rien, et qui se détourne des hommes et des femme qui nous ont élus. D’un côté, un parachuté du FN dans le Val-de-Marne en profite pour lancer sa campagne, alors que ce n’est pas la première fois qu’un buste de Marianne en remplace un autre quelques semaines. De l’autre, le Front de Gauche en profite aussi pour exister médiatiquement“, s’agace l’élu d’opposition.

Un faux procès pour le maire de Fontenay. “Nous ne pouvons pas renoncer à la liberté d’expression, défend l’élu. S’abstenir d’encourager cette démarche artistique, c’est donner raison aux extrémistes, c’est reculer.

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