Ils sont quelques milliers d’enfants en France, envrion 5 000, à ne pas aller à l’école ni être inscrits aux cours par correspondance du Cned. Ces “non-sco”, comme on les appelle, suivent l’instruction en famille (IEF). C’est le cas de Adonis, 8 ans, et Mihran, 7 ans, à Maisons-Alfort.
La mère a décidé de franchir le pas en mars 2015, en plein milieu de l’année scolaire. “Tout a commencé quand le plus jeune, Mihran, en fin de moyenne section, a réclamé d’apprendre à lire” , témoigne Karine Stoëckel, leur mère, qui a mis fin à son activité professionnelle pour éduquer ses enfants. Suivent des crises d’angoisses à répétition, malgré plusieurs rendez-vous avec l’équipe pédagogique, se souvient-elle. “Il hurlait, pleurait, s’accrochait à ce qu’il pouvait pour ne pas aller à l’école. Il a failli se blesser plusieurs fois. Je ne savais plus quoi faire” raconte-t-elle. Cela n’empêche pas Mihran de se montrer avide de connaissances, notamment en lecture, poursuit la mère. “J’ai alors cherché des solutions alternatives à l’école publique” .
En plein questionnement, Karine tombe sur le documentaire de Clara Bellar, Être et devenir (2013), qui a contribué à populariser l’éducation non-sco. Cette fois, l’idée fait son chemin. Mais l’élément déclencheur, ce-sont les attentats meurtriers de janvier 2015. “Ça a été le déclic. Où est ma liberté ? D’apprendre ? De dire ce qui dysfonctionne à l’école qui est un environnement très violent ?” Karine se lance alors dans des recherches, dévore les ouvrages des auteurs spécialisés sur l’éducation, s’initie à la notion “d’éducation bienveillante” thème sur lequel elle a depuis lancé un blog personnel dans lequel elle explique en détail son cheminement personnel et évoque sa séparation pour violences conjugales. En quelques semaines et après avoir rencontré des familles ayant déjà fait ce choix, la discussion s’engage avec les enfants, ils acceptent. Une lettre à la mairie plus tard, Adonis et Mihran quittent l’école, au début du printemps 2015.
La communauté non-sco
“On n’a pas de programme établi , une chose en amène une autre. Par exemple, il est fan d’un jeu de carte alors il a appris à lire pour pouvoir le déchiffrer. Il maîtrise aussi la recherche sur Internet car il a appris à utiliser ces outils lorsqu’il se pose une question” , explique Karine. “C’est une remise en question de l’apprentissage : est-ce qu’on doit leur faire apprendre des choses par coeur ou aborder les sujets par l’angle qui les intéresse ?” s’interroge-t-elle. Adonis, très populaire dans son ancienne école, a eu plus de mal à devenir un “non-sco”, reconnaît la mère. “Il ne voulait pas retourner à l’école mais rejetait la communauté non-sco avec laquelle de nombreuses sorties sont organisées.” Il faudra quelques sorties au parc, ateliers d’archéologie et expositions au musée pour qu’Adonis se refasse des copains.
La “communauté non-sco”, elle s’est tissée via quelques associations spécialisées comme Les enfants d’abord, qui compte environ 500 familles membres. Pour Karine, elle est essentielle. “Nous nous sommes beaucoup reposés sur la communauté non-sco au début, déjà pour rompre l’isolement, car ce n’est pas une vie que de passer ses journées enfermés, et les enfants ont autant besoin que moi d’être sociabilisé. Or, on est parfois regardé de travers et certains parents qu’on connaissait avant ont même arrêté de nous parler. J’avais aussi besoin de réponses aux nombreuses inquiétudes qu’implique une telle décision, témoigne Karine. Les sorties organisées font également partie intégrante de la pédagogie car elles permettent d’aborder des thèmes et des problématiques sur lesquels ils ont forcément des choses à apprendre. Souvent, les enfants proposent et, si c’est pertinent, les parents disposent !”
L’Education Nationale effectue un contrôle par an et les services municipaux tous les deux ans. Les familles, prévenues un mois avant, sont visitées à nouveau en cas de problème. Si les visites ne sont pas concluantes, l’enfant est invité à retourner à l’école publique.
Merci pour ce partage Karine, ce que j’en retiens c’est que nous ne sommes pas obligés d’accepter des situations qui pour nos enfants ou nous nous font souffrir , même si la société nous dit le contraire, ce n’est pas à son image qu’il faut se modeler mais plutôt trouver qui nous sommes et ce que nous voulons.
Bonne chance et joie dans ton cheminement
Je vous invite à (re)découvrir cette note de Igor Reitzman, psychosociologue, qui dénonce quelques facettes des violences intrinsèques de l’école
http://www.reitzman.fr/PDF/Dressage/violance_ecole_afps.pdf
Article très intéressant , c’est une belle aventure dans la quelle vous vous lancez .
Merci 94.citoyens.com pour cet article qui permet à d’autres familles qui le souhaitent de se questionner sur ces sujets de l’éducation et de l’instruction des enfants.
Je tiens à apporter quelques précisions.
Il y a eu d’abord tout un cheminement sur le lien entre mon acceptation des violences dans mon couple, les violences éducatives ordinaires (VEO) que j’ai vécu et les violences que je reproduisais dans l’éducation de mes enfants. C’est cette réflexion qui m’a amenée à une séparation pour violence conjugale et une remise en question de ma posture éducative vers une éducation bienveillance (les enfants avaient 1 et 2 ans).
Ensuite, plus la bienveillance s’installait dans notre nouveau foyer, plus se creusait une différence avec les comportements à l’école. A cela c’est ajouté la demande pressente d’apprentissages de mon cadet que l’école n’était pas en mesure d’assouvir. Ainsi, il en est arrivé à ne plus vouloir aller à l’école et des crises de plus en plus importantes.
Nous avons vécu ainsi de ses 5 ans à ses 6,5 ans. A cette époque, j’ai démarré des ateliers d’éducation bienveillante pour partager avec d’autres parents non seulement mes prises de conscience sur les VEO, mes nouvelles habilités dans ma relation avec mes enfants mais aussi une réflexion autour des souffrances scolaires et des solutions que nous, parents, avons à notre disposition.
C’est ainsi, grâce à une maman, que j’ai découvert le livre “Libres enfants de Summerhill” et qu’en faisant des recherches sur ce sujet, j’ai découvert “Etre et devenir” de Clara Bellar.
J’ai vu ce film documentaire fin octobre 2014. Une révélation et découverte pour moi qui croyait que l’école était obligatoire. En novembre et décembre, c’est seule que je vais à la rencontre de familles non scolarisantes.
En janvier 2015, il y a les attentats, la France debout pour la liberté d’expression, c’était un dimanche, nous en avons parlé avec les enfants. Le lundi, je participe à une sortie scolaire de mon aîné et je constate combien sa maîtresse est enfermée dans le schéma des VEO et combien la liberté d’expression des enfants est réduite. Le mardi, nouvelle crise pour ne pas aller à l’école, je dis : “ok, tu ne vas pas à l’école aujourd’hui”. Adonis voudra suivre. Depuis, ils n’ont plus remis les pieds à l’école.
J’ai voulu retranscrire tout ce cheminement dans un blog “education-bienveillante.fr” afin que chaque parent, enseignant, éducateur, puisse y puiser des ressources dès lors qu’il souhaite se questionner sur l’éducation et l’instruction des enfants.
Dans ce blog, je montre le lien entre les violences éducatives et les violences conjugales ; je montre combien il est difficile d’instaurer la bienveillance quand on ne l’a pas reçue soi même et combien l’instruction en famille et les apprentissages autonomes peuvent être vites jugés car mal compris.
Voilà pour mes précisions 🙂
Encore merci 94.citoyens.com de votre intérêt pour l’instruction en famille encore trop peu connue sous cet angle d’une solution face aux souffrances scolaires.
Ne sont-ce pas plutôt les violences conjugales plutôt que l’école qui auraient angoissé les enfants?
Oui mtja, je comprends votre réflexion car cette information sur les violences conjugales est sortie de son contexte mais elles étaient derrière nous depuis bien longtemps quand les souffrances scolaires sont apparues.
J’ai apporté en commentaire quelques précisions chronologiques afin de permettre de mieux comprendre le cheminement depuis les violences vers une éducation bienveillante et enfin l’instruction en famille.
Merci de votre intérêt pour le sujet.
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