Du foncier accessible et des compétences qualifiées, tels sont en bref les gros défis à relever pour développer et maintenir l’industrie en Val de Marne. L’enjeu n’est pas négligeable alors qu’un emploi industriel génère en moyenne deux à trois emplois indirects et induits.
Si la désindustrialisation n’a pas épargné le département, préserver celle qui reste et encourager les nouvelles formes d’activité productive qui se sont récemment installées sous forme de petites structures figurent parmi les priorités des institutions économiques. C’est dans ce contexte que la CCI du Val de Marne a mené une enquête auprès des industriels du département et proposé un certain nombre de préconisations présentées lors d’une table ronde organisée avec La Tribune, réunissant industriels et institutionnels fin décembre 2014. Des constats et propositions qui confirment ceux réalisés au printemps par l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile de France (IAU IDF), le Conseil général du Val de Marne et Ecode (voir article à ce sujet).
Pour rappel du contexte, la CCI fait état de 34 282 emplois industriels salariés en Val-de-Marne au 31 décembre 2012, la moitié moins qu’il y a 20 ans. Une tendance baissière qui ne touche pas que le Val de Marne même si le département affiche la plus faible proportion des emplois industriels d’Ile-de-France, avec seulement 7,4%. Paris et sa petite couronne ont perdu plus d’emplois que la grande couronne car un certain nombre d’activités se sont déplacées de l’une vers l’autre.
Croissance des petites activités productives
Depuis 2009 toutefois, ce secteur a vu émerger une nouvelle forme entrepreneuriale avec les régimes d’auto-entrepreneur qui représentent entre 53% et 69% des créations depuis cette date et ont contribué à l’augmentation du nombre d’établissements. Dans une même tendance, les très petits établissements sont devenus majoritaires. Ainsi, en 2013, 51% des 4 207 établissements industriels du département n’emploient aucun salarié et 34% ont un effectif compris entre 1 et 9 salariés alors qu’en 2000, plus de la moitié des établissements industriels comptaient entre 1 et 9 salariés et seulement 26% n’en employaient aucun. Ces établissements sans salariés sont particulièrement représentés dans les activités de pré-presse et de fabrication d’articles de bijouterie fantaisie et articles similaires.
Ce qui attire les entreprises industrielles dans le département ? Le bon rapport qualité-prix de l’immobilier, la domiciliation à proximité des chefs d’entreprise, la desserte, la proximité des clients. Ce qui leur pose problème ? Le manque d’accessibilité de certaines zones d’activités, l’augmentation du foncier en proche couronne, les contraintes réglementaires environnementales, la disponibilité d’une main d’œuvre qualifiée… Tels sont en bref les enseignements des interviews de chefs d’entreprise réalisés par la CCI dans le cadre de son étude. «Il y a quelques années, nous avions un problème de financement mais les compétences étaient là. Aujourd’hui, nous avons l’argent mais il est très difficile de recruter et à plusieurs reprises, j’ai formé des jeunes qui sont ensuite partis travailler dans un grand groupe industriel plutôt de rester dans notre PMI, alors que les salaires vont de 1600 à 4 000 euros. J’ai finalement embauché des Polonais», témoignait ainsi Eric Carpentier, patron de la PMI Hugotte de Villecresnes lors de la table ronde.
Les préconisations de la CCI
Dans ses préconisations, la CCI du Val de Marne a donc ciblé quatre grands défis et listé un ensemble de préconisations pour les relever.
1° Défi de l’aménagement urbain
Qualité de l’environnement urbain (desserte routière spécifique et de qualité pour les livraisons et expéditions par poids lourds, transports en commun qui desservent les zones d’activité à une fréquence horaire suffisante, restaurants et autres services à proximité, cohabitation de l’activité productive dans les quartiers résidentiels…)
Propositions :
– Développer une desserte de qualité tous modes de transport dans les zones concernées par l’industrie et la construction.
– Intégrer en amont l’accès des livraisons dans la conception des opérations d’aménagement ou de requalification de zones d’activités
– Développer des parkings relais à proximité des stations de transports en commun
– Prévoir la possibilité d’un déplacement motorisé (calibrage des rues, stationnement) des salariés dans les secteurs dotés de locaux d’activité.
– Poursuivre les efforts pour desservir les zones d’activités
industrielles par les transports en commun.
– Renforcer les aménagements (qualité des voiries, stationnement, trottoirs, …) et les services (restauration, propreté, sécurité…) dans et aux abords des sites d’activité.
– Réfléchir aux nouvelles formes de mixité urbaine permettant l’insertion d’entreprises industrielles dans le diffus (éviter les gênes de la circulation, les nuisances sonores, les nuisances visuelles…) et apporter des aménités urbaines aux entreprises et à leurs salariés.
– Sensibiliser les pouvoirs publics à la nécessité de construire des logements intermédiaires pour que les salariés puissent vivre à proximité des entreprises, et à la nécessité d’une bonne accessibilité des sites pour faciliter les déplacements domicile/travail
2° Défi du foncier accessible
Disponibilité de foncier dédié à l’activité productive et accessibilité en termes de prix, y compris en zone dense, pour toutes les tailles d’activités (notamment les petites en forte progression), évolutivité du parcours au sein du département.
Propositions :
– Veiller à ce que les PLU favorisent le maintien, voire le développement de foncier destiné aux activités de l’industrie et de la construction.
– Adapter les outils réglementaires afin de favoriser la « sanctuarisation » du foncier dédié à l’activité.
– Favoriser la construction d’immobilier d’activité neuf sur les terrains contraints (bordures de voies rapides, bordures de voies ferrées…), afin de poursuivre la densification du territoire tout en créant des écrans sonores pour l’habitat.
– Mettre en place un observatoire du foncier économique (faire de la veille de foncier économique, connaître les besoins immobiliers et fonciers des entreprises, prendre en compte les besoins des entreprises de l’industrie et de la construction dans les programmations immobilières, proposer des opportunités foncières et immobilières aux entreprises en place).
– Mettre à disposition du foncier d’Etat. En 2013, une loi a été votée permettant la cession par l’Etat de parcelles avec une décote pouvant atteindre 100% afin de construire des logements sociaux. La CCI propose une procédure similaire pour les parcelles de l’Etat dont la localisation ne permet pas de construire du logement, mais des locaux d’activité (bordures de voies rapides, entre deux ferroviaire…).
– Déterminer les outils de financement et les modèles économiques possibles pour permettre un bilan promoteur positif sur la construction de locaux d’activité.
– Développer des formes innovantes d’immobilier et d’aménagement permettant l’accueil d’activité en zone dense et dans un tissu urbain mixte (ex. : projet de démonstrateur à Choisy-le-Roi, hôtels logistiques de zone dense de SOGARIS…).
– Favoriser le développement d’outils et de services mutualisés dans de l’immobilier d’activité dédié, permettant aux entreprises de limiter les surfaces immobilières dont elles ont besoin pour leur fonctionnement (Ex. : développement de FabLab où peuvent être mutualisées des machines-outils, des imprimantes 3D…).
– Inciter à l’émergence d’une offre de locaux (péréquation, soutien financier…) proposant des cellules de 150 à 1 500 m², adaptés aux activités de production (charges au sol, hauteur sous plafond…) et permettant des livraisons camions.
– Favoriser le développement de locaux permettant aux entreprises de réaliser un parcours immobilier adapté. Dans de mêmes zones géographiques, favoriser le développement de pépinières et d’hôtels d’entreprises pouvant être occupés par des activités industrielles.
3° Le défi de la main d’œuvre qualifiée
– Revaloriser l’apprentissage en encourageant de nouveau les entreprises à prendre des apprentis et en assurant un financement suffisant des centres d’apprentissage.
– Revaloriser les métiers de l’industrie et de la construction afin de favoriser ce choix d’orientation en formation initiale ou en formation continue.
4° Le défi des contraintes réglementaires et environnementales en zone dense
– Tenir compte des spécificités d’implantation des entreprises en zone dense et adapter l’application de la législation en fonction.
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