Envoyée notamment à un certain nombre d’élus, la lettre trimestrielle de novembre 2015 de l’entreprise Yprema, dont le siège est basé à Chennevières-sur-Marne et qui recycle et transforme les déchets de dé-construction pour les livrer aux entreprises de travaux publics, a mis le feu aux poudres à droite.
Cette lettre de quatre pages présente l’actualité de l’entreprise comme ses nouveaux projets et contrats, et s’achève par une quatrième de couverture sur la visite en juillet dernier de Claude Bartolone dans l’un des établissements d’Ypréma, à Emerainville (Seine-et-Marne), aux côtés de différents élus PS. Pour rendre compte de cette visite, la lettre de communication externe de l’entreprise a choisi de reproduire un article du Parisien de l’époque intitulé “Elections régionales Claude Bartolone (PS) joue la carte écolo à Emerainville“, aux côtés de photographies de la visite.
Atterri sur le bureau du nouveau maire LR de L’Haÿ-les-Roses, Vincent Jeanbrun, porte-parole de la campagne de Valérie Pécresse dans le Val-de-Marne et troisième de la liste départementale, le 26 novembre, en pleine campagne officielle des élections régionales 2015, le document a interloqué l’élu qui a annoncé saisir la justice et le parquet de Créteil pour ” faire toute la lumière sur l’ampleur de la diffusion de ce journal par voie postale, parfaitement illégale et contraire aux règles électorales de base.” Sur les mentions légales du document, il est indiqué une impression à 9600 exemplaires.
“A quelques jours seulement du 1er tour des élections régionales, le candidat socialiste bénéficie en toute illégalité d’un document de campagne faisant sa promotion, financé par une entreprise privée”, dénonce le maire de l’Haÿ, qui indique que d’autres élus et parlementaires ont reçu ce document. “Pour rappel, l’utilisation des moyens d’une entreprise ou de toute personne morale dans le cadre d’une campagne électorale est formellement interdite par la loi.”
“Que les élus viennent rencontrer les entreprises sur le terrain est très sain“
Fervent défenseur de l’économie circulaire, Claude Prigent, président de l’entreprise Yprema, ne manque aucune occasion de défendre ce secteur auprès des politiques. En mars dernier, c’est ainsi un de ses franchisés en Ardèche, CBM, qui avait accueilli Manuel Valls, Emmanuel Macron, Najat Vallaud-Belkacem à l’occasion d’une visite liée à la campagne des élections départementales, explique l’entreprise sur son blog. Une visite qui avait fait l’objet de la dernière de couv de l’avant-dernier numéro d’Ypréma matériaux (le numéro 66), sauf que le numéro avait été diffusé après les élections, au mois de juin, et non pendant la campagne. “Que les élus viennent rencontrer les entreprises sur le terrain est très sain“, défend Claude Prigent, patron d’Ypréma. Si Valérie Pécresse veut venir nous voir, nous serons ravis et je viendrai en personne l’accueillir. A Emerainville, le maire (ndlr Alain Kelyor, LR) n’est pas de gauche et il est déjà venu nous rendre visite. Ce qui nous intéresse est de défendre notre métier, nos pratiques innovantes et l’économie circulaire, c’est cela du reste qui dérange les grands groupes. Lorsque le président de l’Assemblée nationale est venu nous voir, c’était évidemment un événement pour nous et c’est normal que nous en ayons rendu compte dans notre communication. Ce n’est pas nous qui faisons la comm de Bartolone mais Bartolone qui fait notre comm. Quant à la diffusion de cette lettre, elle dure depuis 1992 et nous en envoyons trois numéros par an, il n’y a donc rien de nouveau. La base de données qui a servi à l’envoi de la lettre de novembre 2015 est la même que celle de juin et de février 2015″, détaille Claude Prigent.
“Le directeur de campagne de Valérie Pécresse va très certainement saisir la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP)“, prévient Vincent Jeanbrun. Pour le porte-parole de la candidate LR-UDI-Modem, il s’agit là d’un acte de campagne délibéré de la part du patron d’Ypréma, résidant à Carhaix-Plouguer. Et de rappeler que ce dernier s’est présenté sur la liste de Richard Ferrand (PS) contre le régionaliste divers gauche Christian Troadec aux municipales de 2008. “Je ne suis pas encarté au PS ni à aucun parti, je suis parfois d’accord avec l’un, parfois avec l’autre”, réagit Claude Prigent.
“Je suis pressé de voir quelle pirouette le directeur de campagne du candidat socialiste va bien pouvoir faire. Quelle nouvelle ‘’fable pour enfant’’ Luc Carvounas va-t-il bien pouvoir conter aux Franciliens pour se sortir d’affaire cette fois-ci. Lui qui est toujours prompt à donner des leçons“, envoie Vincent Jeanbrun.
Sénateur-maire PS d’Alfortville et directeur de campagne de Claude Bartolone, Luc Carvounas, contre-attaque. “Vincent Jeanbrun m’inquiète s’il pense qu’un élu quel qu’il soit peut dicter à un chef d’entreprise sa communication qu’il paie lui même. Je suis presque amusé de voir comment la droite cherche par tous les moyens à dire ‘mais eux aussi ils trichent’ alors qu’il y a des dossiers très lourds contre la liste de Valérie Pécresse dans cette élection régionale, qu’il s’agisse de Lizzy-sur-Ourcq où la maire a organisé la distribution de tracts pour la candidate LR-Modem-Udi avec les services de la ville, du tweet sponsorisé de Valérie Pécresse elle-même, ou encore de la campagne d’affichage de la ville d’Argenteuil contre Philippe Doucet, candidat socialiste sur la liste des régionales ! Que la droite aille en donc en justice. J’espère pour elle que cela ne se finira pas comme l’histoire de l’arroseur arrosé avec une sortie à la barbouze! Car curieusement, les élus de droite semblent être le seuls à avoir reçu cette lettre. Pour ma part, je suis très serein“, réagit le directeur de campagne.
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