Des tableaux de maître aux auteurs confidentiels, Laetitia Vallier, restauratrice-conservatrice fraîchement diplômée, répare et bichonne chaque détail de la peinture au cadre en passant par la tension du support.
Agée de 23 ans, cette passionnée a installé son atelier dans la salle à manger du domicile familial, à Sucy-en-Brie.
Diplômée de l’école de Condé en novembre 2015, elle s’est lancée tout de suite dans l’aventure entrepreneuriale, sous le statut de micro-entreprise, en lançant son Atelier Héritage. “J’ai eu une belle opportunité immédiatement. Un musée national du Luxembourg, au sein duquel j’avais fais un stage pendant mes cinq années de formation, m’a proposé la restauration d’une vingtaine d’œuvres” , confie la professionnelle. Dans ce milieu concurrentiel où les premières années d’activité peuvent être compliquées, la visibilité offerte par la proposition de la Villa Vauban a convaincu la jeune femme de se lancer. “Mon père est plombier, il sait ce que c’est que monter son entreprise” , explique la jeune fille. A peine quelques semaines après l’obtention de son diplôme, Laetitia a ainsi reçu douze œuvres dans son salon! “Les œuvres restantes sont trop prestigieuses pour quitter le territoire ou ne nécessitent pas une grosse restauration, j’irais donc les soigner sur place” , précise Laetitia Vallier. Légués récemment par deux collectionneurs privés, l’ensemble de ces œuvres feront l’objet d’une exposition spéciale à la Villa Vauban, à partir de septembre prochain.
Soigner : c’est bien le verbe employé par Laetitia, qui se qualifie “comme un médecin des œuvres d’arts. On soigne vraiment ces peintures, ces céramiques et ces papiers. Parfois, il s’agit d’un coup de bichonnage. Mais encore faut-il que l’oeuvre accepte nos traitements !” lance-t-elle. Solvants, rigidité de la couche de peinture, encadrement : les soins apportés par Laetitia sont parfois “rejetés” par une oeuvre, pour des raisons d’incompatibilité chimique par exemple . “Heureusement, on fait toujours des tests avant, cela fait partie de la déontologie des restaurateurs. Tout ce qu’on fait doit être réversible” , rassure l’entrepreneuse qui réalise un reportage photo précis de son travail, rapport à l’appui, avant de le remettre à ses clients et d’en conserver un exemplaire. “Comme cela, si dans 100 ans quelqu’un veut restaurer ce tableau, il aura la trace de ce qui a été fait. Cela nous ferait gagner du temps si dans le passé, les restaurateurs avaient pris cette habitude” , sourit-elle. “Beaucoup pensent qu’il s’agit de remettre un peu de peinture dans les trous, mais c’est beaucoup plus complexe que cela : on doit aussi retravailler la tension de la toile, le support de l’oeuvre, parfois le cadre aussi… C’est un métier magnifique dont les techniques évoluent chaque année!”
A l’origine de cette aventure, un goût pour les œuvres anciennes, mûri depuis l’école primaire et les sorties familiales au musée guidées par son père passionné d’histoire. Laetitia sait dès cet époque qu’elle veut devenir archéologue ou restauratrice. “Au musée, on peut admirer les œuvres, et c’est super. Mais j’avais envie d’une relation privilégiée avec elles : je voulais pouvoir les toucher, les manipuler“, se souvient-elle. Dès le lycée, elle choisit de suivre une filière en arts appliqués au lycée Claude-Nicolas Ledoux de Vincennes.
Une fois étudiante et en stage au Luxembourg, elle manipule des œuvres des grands peintres flamands des XVIe et XVIIe siècle, comme Pieter Brueghel l’Ancien. A Malte ensuite, en stage à Heritage Malta, un service gouvernemental d’archéologie, Laetitia assiste à une restauration d’une peinture du Caravage. Aujourd’hui, c’est sur des tableaux du XXe siècle qu’elle s’attelle avec ses outils. “La collection que m’a confiée le musée de Luxembourg a été réalisée entre 1920 et 1960, mais j’ai aussi récemment restauré un tableau d’art contemporain.”
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