Lors que Frédéric Griffaton, 27 ans, et Matthieu Jeanne-Beylot, 25 ans, ont testé leur idée d’entreprise dans leur entourage en 2012, on les a plutôt découragés. Quatre ans plus tard, ils ont recruté 9 salariés et croquent l’avenir à pleines dents depuis l’ancienne fabrique de pain d’épice de Gentilly où ils ont installé leurs bureaux.
Une plate-forme en ligne pour prêter ses objets gratuitement, une idée simpliste, sans modèle économique ? Les deux associés ont prouvé le contraire avec hardiesse. «Ce qui compte, ce n’est pas seulement l’idée mais la manière dont on la déploie», motive Frédéric Griffaton. C’est en accompagnant des jeunes en Croatie que les deux entrepreneurs, qui se sont rencontrés aux Scouts de France, ont eu l’idée. «L’un des appareils photos a cassé sur place et nous nous sommes dits qu’il y avait sûrement plein d’appareils photos qui ne servaient pas à quelques kilomètres à la ronde, mais qu’il manquait un outil pour partager cette information», se souvient Frédéric Griffaton.
Au-delà de la petite histoire, l’idée était prête à germer dans la tête des futurs dirigeants car ils avaient déjà décidé qu’ils monteraient une société qui s’appuie sur le numérique et le collaboratif. Alors étudiants, Frédéric à Sup de vente, Mathieu à l’ISC Paris, les deux se sont faits la main au développement de projets en montant des festivals ou des projets de solidarité internationale. Rentrés de leur camp en Croatie, ils commencent à mûrir leur idée, en parlent autour d’eux, et compilent les études qui la confortent pour en prouver le bien-fondé, chiffres à l’appui. Deux ans de réflexion durant lesquels ils achèvent leurs études et commencent à travailler.
En 2014, ils sont prêts. Entre un peu de love money, une bourse French Tech de 30 000 euros de la BPI et une incubation par l’ISC puis Antropia Essec, ils lancent leur plate-forme. Son nom: Mutum, disponible en site Internet ou application mobile. Le principe: les utilisateurs s’inscrivent gratuitement sur le site et se voient automatiquement attribuer 100 points Mutum, une monnaie virtuelle exclusivement valable dans l’univers Mutum. Lorsqu’ils prêtent un produit, ils gagnent des points. Lorsqu’ils en empruntent, ils en dépensent. Pour faciliter le référencement des produits de chaque membre de la
communauté, la startup a élaboré un catalogue qui comprend déjà un certain nombre de références et il suffit de cliquer dessus pour indiquer si l’on dispose de tel ou tel objet à prêter. «En ce moment, c’est le retour de l’appareil à raclette et des affaires de ski !» pointe l’associé. Une fois la relation établie entre un prêteur et un emprunteur, les deux se donnent un rendez-vous pour procéder à l’échange. «L’un des enjeux de notre projet est de créer du lien social, il est donc très important que les gens se voient en vrai pour se prêter les objets et nous n’envisageons pas de créer de point relais pour les déposer», motive Frédéric Griffaton.Voilà un bien joli projet, mais où est le modèle économique ? Dans la création du lien social justement, explique le président. «Nous vendons de l’animation de communautés aux comités d’entreprise et directions des ressources humaines pour stimuler les échanges entre employés sur leur lieu de travail. Nous avons par exemple développé une communauté spécifique pour la Société générale, sur son site de La Défense, et allons également en créer une pour leur site de Fontenay-sous-Bois», détaille-t-il. «A plus long terme, nous nous positionnons également sur le référencement des objets et la connaissance du cycle de vie des produits, et ambitionnons de devenir un référent de la connaissance sur l’économie solidaire de fonctionnalité.»
En attendant, la jeune pousse a usé de culot pour accélérer son développement en levant des fonds. «Peu après avoir créé l’entreprise, j’ai lu dans le journal Les Echos que la Maif cherchait à investir dans des entreprises de l’économie sociale et solidaire. Nous avons d’abord cherché à les contacter en passant par notre réseau de connaissances mais sans succès. Finalement, j’ai reçu, en tant que sociétaire de la Maif, une invitation à participer à une conférence à laquelle intervenait le président de la mutuelle et je l’ai interpellé directement pour lui présenter notre projet ! Il s’est montré enthousiaste, et quelques mois plus tard, nous avons bénéficié d’une participation minoritaire de l’ordre de 550 000 euros !», raconte le chef d’entreprise. Une somme, qui, additionnée notamment à un prêt de 300 000 euros de la BPI, a permis à l’entreprise de recruter ses 9 salariés et de les installer proprement dans une ancienne fabrique de pain d’épice de Gentilly qui accueille également d’autres entreprises.
Aujourd’hui, Mutum revendique 52 000 adhérents qui proposent 31 000 objets à prêter. Objectif désormais : changer d’échelle, ce qui devrait passer par une nouvelle levée de fonds.
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