Après huit années d’existence dans une mini échoppe rue Paul Vaillant-Couturier, la librairie indépendante d’Alfortville, l’Etabli, voit désormais l’avenir en grand format. Hébergée temporairement par la ville à l’espace culturel, le 148, elle rejoindra prochainement la rue Cuillerier, près de l’église, dans un local plus grand, condition sine qua non de son développement.
Une passante se laisse guider par l’ écriteau affiché sur la vitrine du 141, avenue Paul Vaillant Couturier. « A partir du 29 août, la librairie vous accueille au 148, face au Monoprix ». Après avoir fait les quelques mètres à pied, la jeune femme passe la porte du local provisoire. « Alors vous êtes ici maintenant ? Mais vous allez rester en ville ? » s’inquiète-t-elle avant de pousser un ouf de soulagement devant le oui de Sylvaine Jeminet, la gérante. Le 27 août, une centaine de passionnés, amis de la librairie, ont aidé la libraire à faire son déménagement provisoire. « C’était vraiment touchant de voir ces marques de sympathie de la part de toutes ces personnes », témoigne Sylvaine. La libraire reconnaît ne pas chômer, avec des démarches administratives chronophages, de la comptabilité, les contacts réguliers avec les éditeurs, l’accueil du public, la manutention ou encore le nettoyage. « Seule, ce serait impossible d’y arriver, il faut vraiment être bien entouré, et j’ai la chance d’avoir autour de moi des bénévoles qui s’investissent énormément pour faire vivre l’Établi ».
« Au cours de la dernière décennie, la création de nouveaux quartiers au nord de la commune a modifié la composition démographique de la ville. Cette évolution a fait naître un réel intérêt pour un lieu de ce type, et puis, l’accueil sympathique que Sylvaine réserve aux visiteurs, ses conseils et les délais raisonnables des commandes ont convaincu », confie Armelle, Alfortvillaise qui vient régulièrement donner un coup de main.
Pour attirer les lecteurs, la petite librairie indépendante a multiplié les actions. Odile et Marc, les créateurs de l’association des amis de l’Établi, ont passé leurs dimanches matin sous une tonnelle déployée devant la boutique, entre les stands des marchands de quatre-saison. « Nous avons organisé des jeux autour de l’écriture, offrant un thé ou un café et partageant de bons moments. Nous tenons également de temps à autre des apéro-lecture avec nos adhérents. Lorsque le POC organise des événements, nous sommes invités à tenir un stand, nous sommes en contact avec le théâtre Jean Vilar, à Vitry nous avons été voir Bruno Doucey lorsqu’il y était en résidence. À présent, nous sommes une trentaine d’actifs, mais nous comptons plusieurs dizaines d’adhérents qui souhaitent surtout nous témoigner une marque de soutien », résume Marc, qui a fait mille et un boulots, notamment dans l’édition, et travaillé comme directeur de MJC.
Des rencontres plutôt que des algorithmes
Reconnaissant avoir parfois commandé des livres chez Amazon ou à la Fnac, Marc explique s’être rapidement rebiffé. « Quand j’ai commencé à recevoir des mails où l’on me suggérait d’acheter tel bouquin parce que les gens qui avaient commandé celui-ci avaient aussi ‘beaucoup aimé’ celui-là. J’ai décidé d’arrêter! Venir en librairie c’est d’abord une rencontre au cours de laquelle on se laisse orienter par quelqu’un et pas par des algorithmes. La littérature est vivante. La vie, c’est parler avec les gens, et l’Etabli m’a plu pour cela. », explique-t-il.
Si le petit local de la rue Paul Vaillant-Couturier offre un espace intime prompt à l’échange, les clients sont rapidement à l’étroit dès lors qu’ils sont trop nombreux à la fois. La fin du bail toute proche et un dégât des eaux finissent par convaincre Sylvaine que l’Établi doit déménager. Malheureusement, le nouveau local doit subir de lourds travaux. La mairie d’Alfortville propose alors de prêter une salle de l’espace culturel « le 148 ». « Ces mois que nous passons ici en attente de notre aménagement sont cruciaux pour la librairie avec la rentrée scolaire et les commandes de manuels ainsi que la rentrée littéraire. C’est une période de très forte activité. Une fois que nous aurons emménagé, nous disposerons d’une surface doublée par rapport à notre ancienne boutique. Un bel espace que nous allons investir en espérant faire venir de nouveaux clients. C’est compliqué d’avoir une vision sur le long terme, c’est une économie très compliquée», reconnaît Sylvaine, qui a travaillé dans le domaine de l’édition et de la presse avant de suivre une formation auprès de l’INFL (institut national de formation de la Librairie) pour la gestion et la comptabilité pour se lancer dans ce projet avec un associé, parti depuis.
Son conjoint, Joël, évoque avec moins de pudeur les sacrifices qu’imposent la vie du libraire. «C’est un modèle économique très fragile où l’on vit chichement, il faut accepter le fait que l’on ne peut pas exercer ce métier dans le but de faire fortune. En semaine, j’emmène nos enfants à la librairie parce que Sylvaine travaille jusqu’à 22 heures, parfois 23 heures. La plupart des collègues qui ont suivi sa formation ont tous mis la clé sous la porte. Les librairies indépendantes font très peu de marges et la prédominance des grands distributeurs comme Amazon ou la Fnac n’encourage pas les éditeurs à miser sur les auteurs peu médiatisés. Les librairies indépendantes donnent leurs chances aux petites maisons d’éditions, qui elles-mêmes, publient des écrivains méconnus. Si les librairies disparaissent, cela risque de créer par effet domino une raréfaction de l’offre culturelle.»
Militante assumée de la culture pour tous, Sylvaine n’a pas choisi le nom de sa librairie par hasard. C’est le titre d’un livre de du sociologue et philosophe Robert Linhart écrit en 1978 où il relate ses un an d’activité comme manœuvre dans l’usine Citroën de la porte de Choisy.
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Mercredi soir une subvention exceptionnelle de 20000€ à été votée au conseil municipal pour l’établi.
Pourquoi faire ? Est-ce que Tous les commerçants de la Ville bénéficient des mêmes largesses ? Alfortville, Il existe une autre Librairie depuis bien plus longtemps, Pourquoi n’a t’elle pas le même bénéfice médiatique et subventions aides municipales ?
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