Portfolio | | 14/04/2017
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A Créteil, Linstable photographie conserve l’âme des Petits-Prés-Sablières

A Créteil, Linstable photographie conserve l’âme des Petits-Prés-Sablières © Linstable photographie

Petit à petit, la cité Petit-Pré-Sablières de Créteil fait place nette pour un nouveau quartier, même s’il reste quelques irréductibles qui se retrouvent autour des deux barres d’immeuble encore debout et du local du centre social. Actée depuis octobre 2011, la rénovation urbaine du site gomme cette ville dans la ville dont les anciens habitants conservent un souvenir vivace et un peu nostalgique.  L’âme de ce quartier, un Cristolien la perpétue aujourd’hui sur les réseaux sociaux, en partageant les clichés qu’il y a pris pendant ses longues années comme travailleur social. Son nom d’artiste :  Linstable photographie. Rencontre.

« Je suis arrivé dans le quartier en 2003, après avoir fait plusieurs missions dans d’autres cités, j’ai tout de suite été marqué par cette jeunesse. Cet endroit bouillonnait de vie.  Plus de la moitié des habitants avaient moins de 25 ans! Des années plus tard en 2011, j’ai eu comme un déclic en regardant les enfants jouer, je me suis demandé comment j’avais pu passer à côté de ces scènes de vie magnifiques qui s’offraient à moi », se remémore linstable, qui a grandi dans un quartier voisin. N’y connaissant pas grand-chose, comme il l’avoue lui-même, le Cristolien achète un appareil photo d’entrée de gamme assez rudimentaire. Le travailleur social sait ce qu’il veut : de la photographie de rue, de la spontanéité en noir et blanc. «Au départ, c’était compliqué. Les enfants me voyaient arriver avec l’appareil et ils prenaient la pose. Mais avec le temps, ils m’ont oublié et ont repris leur vie. Contrairement aux adultes que je photographie, l’enfant est tellement en mouvement, qu’en une minute, on peut prendre une dizaine de clichés ».

Bouillon de culture

La vie de ces hommes, femmes et enfants, dans ces bâtiments construits pour contrer la crise du logement à la fin des années 1950 était loin d’être facile, mais l’esprit de « village » résultant de l’enclavement du quartier (sans voie traversante et cerné de rocades et de routes), ainsi que l’esprit communautaire des populations y vivant, a rendu le quotidien plus festif et moins angoissant, selon l’ancien travailleur social. «Pour les plus jeunes, cela a été compliqué de sortir du quartier. C’était un cocon où les aînés gardaient un œil sur les petits. Dehors, c’est l’individualisme, on est seul», insiste le Cristolien d’origine italienne.

Un été à la cité

Alors que cette effervescence n’est aujourd’hui plus qu’un souvenir, Linstable photographie la fait revivre en publiant des scènes de la vie quotidienne du quartier sur une page Facebook des « anciens » de la cité, ainsi que sur son propre compte. C’est aujourd’hui sur Internet que les anciens résidents s’échangent désormais des nouvelles, publient les photos qu’ils ont retrouvées dans de vieux albums et organisent des retrouvailles. « Depuis les années 2000, les habitants savaient que le quartier allait être démoli mais ils s’est écoulé tellement de temps que certains n’ont réalisé qu’ils allaient devoir partir qu’une fois qu’ils ont vu les grues et les tractopelles devant chez eux. Les plus téméraires n’ont pas voulu partir et se moquaient des inconvénients dus aux travaux. Parmi ceux qui ont déménagé, il sont nombreux à revenir ici pour les activités du centre social. Des liens fraternels se sont tissés. A la base, j’avais été embauché pour porter des projets socioculturels collectifs, mais au final, j’ai fait énormément de suivi personnel. Nous nous sommes donnés pour eux, nous faisions partie d’une même famille au final », confie le photographe qui se prépare à la fermeture définitive du centre social des Petits-Prés-Sablières où il a tout appris de son métier.

Regards croisés

Et maintenant ? Artiste, citoyen engagé, Linstable photographie n’a pas renoncé au terrain.  «Je mise beaucoup sur les plus jeunes. Ils ont notre avenir entre leurs mains, il faut arrêter avec le discours victimaire et montrer que l’on peut agir. A mon niveau, j’essaie de leur faire prendre conscience qu’ils peuvent être autonomes et se donner les moyens de donner un sens à leur vie».  Au-delà des enfants, c’est la rue qui inspire Linstable parcourant les villes pour se laisser surprendre par un vieux couple d’amants complices, un chat errant, un sans abri qui tend la main et avec qui, il engage la conversation. Il reverse d’ailleurs sous forme de dons alimentaires ou vestimentaires les bénéfices tirés de la vente des photos de sans domicile fixe.

En bas des blocs

L’oeil flingué : un collectif de photographes de la rue

Entre-temps, le Cristolien a aussi rencontré Ladramstars, un photographe d’Aulnay-sous-Bois qui va notamment à la rencontre des jeunes de sa ville le soir, avec son appareil, et Cebos alias piscs&love, un autre photographe rencontré lors d’une manifestation, et qui fait entre autre, du photo-reportage. Ensemble, ils ont créé le collectif « l’œil flingué » et s’apprêtent à exposer ensemble. A 39 ans, l’artiste a aussi des envies de voyage et savoure ses escapades à l’étranger où il mitraille la vie quotidienne des gens qu’il rencontre en route. Le photographe aura le cœur gros au moment de quitter Petits-Prés-Sablières, mais il est prêt à se lancer dans l’inconnu, c’est même pour cela qu’il a choisi le pseudonyme Linstable.

Retrouvez Linstable Photographie sur son site Internet

La spirale

Déterminé

Fifty cents

Curiosité partagé

Fraternité

 

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