Depuis quelques jours, deux chèvres et leurs deux chevreaux ainsi qu’un couple de moutons et leur agneau paissent tranquillement près du cimetière ancien de Marolles-en-Brie jusqu’à l’arrivée de l’automne. Une attraction pour les enfants mais pas que. Retour sur les vertus de ce procédé d’éco-pâturage avec son inventeur, Alain Divo.
C’est cet architecte paysagiste et agriculteur qui a breveté cette technique de gestion alternative des parcs, jardins et paysages dans les années 90, depuis son exploitation essonnienne de Fontenay-Les-Briis, EcoTerra. L’idée : installer des ruminants de races locales françaises en petit effectif du printemps jusqu’à l’automne au sein d’espaces verts de collectivités, entreprises voire de particuliers. «Depuis 30 ans, je suis passionné de nature et d’ornithologie, les voyants sont au rouge en Île-de-France où si l’on ne fait rien, nous allons perdre 50% de nos insectes et 40% de nos espèces d’oiseaux. Partant du constat que la région était peuplée d’animaux il y a quelques décennies, nous avons proposé de réintroduire des animaux sur de petites surfaces. L’office pour les insectes et leur environnement (OPIE) estime qu’il suffit de 1000 mètres carrés d’espace pour maintenir une population d’insectes, c’est trois fois plus à Marolles. La présence des ovins et caprins va faire revenir des lombrics, fourmis et sauterelles, et par ricochet, des oiseaux insectivores. Grâce à ces chèvres et moutons, les services municipaux réduisent leur impact écologique. Quand on démarre une tondeuse auto-portée, c’est comme si l’on démarrait 40 véhicules! La présence des animaux permet de réduire de 25% l’entretien mécanique dans l’espace où ils pâturent», détaille Alain Divo.
S’il y a en revanche un impact à sa démarche auquel l’agriculteur ne s’attendait pas, c’est le lien social généré par cette présence. Cet automne par exemple, 25 moutons ont débarqué dans les cités de Fontenay-sous-Bois uniquement dans cet objectif. Voir notre reportage. D’autres communes du département ont ouvert leurs portes, à l’instar de Villeneuve-le-Roi, Sucy-en-Brie, Chevily-Larue… Et lors des municipales de 2014, des candidats ont même organisé une manif avec des moutons pour mettre en avant ce principe dans leurs propositions de campagne!
Alors que l’on parle de plus en plus d’agriculture urbaine, l’exploitant estime toutefois qu’il y a encore du travail à faire auprès des décideurs, pour doser les actions. «Souvent, les élus partent avec de très bonnes intentions mais commettent des erreurs. Parfois par exemple, ils vont installer énormément de ruches sur leur commune et les abeilles entrent en concurrence avec des insectes sauvages. I faut faire de la pédagogie et expliquer que dans la nature, tout n’est pas noir ou blanc, il y a des nuances et il faut de la pondération.»
Les animaux présents à Marolles ont longtemps été utilisés par les agriculteurs mais sont maintenant en voie de disparition. Le couple de caprins sont par exemple des chèvres de fossés, originaire de la Manche. Il s’agissait autrefois des bêtes des paysans les plus démunis qui, faute de terres, les faisaient pâturer sur le bord des fossés. Leur population a considérablement diminué mais les initiatives d’éco-pâturage ont permis à ses effectifs de repartir à la hausse. Les deux ovins, eux, sont des moutons d’Ouessant, originaires de l’île éponyme du Finistère. Ce sont les plus petits moutons au monde, ils sont peu productifs et non comestibles. Leur utilisation pour la tonte constitue donc également un moyen de les protéger.
«A Marolles, à la fois ville semi-rurale et aux portes de Paris, le recours à l’éco-pâturage prenait tout son sens. Les contraintes sont faibles. Un employé doit veiller à ce que les animaux aient à manger et surveiller qu’ils soient en bonne santé, même s’ils sont robustes. Après cette première expérience, nous en tirerons un bilan à l’automne pour voir si nous recommençons. Au-delà de cette initiative, nous souhaitons également développer le concept d’agriculture en ville et envisageons de mettre des ruches en place», explique Sylvie Gerinte, maire de Marolles-en-Brie.
L’éleveur et la mairie insistent sur l’interdiction faite aux habitants de donner à manger à ces animaux, en particulier les bébés, qui ne tolèrent pas de nombreux aliments.
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