Environnement | Val-de-Marne | 07/02/2017
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Concilier légumes et logements, retour sur les rencontres de l’agriculture en Val-de-Marne

Concilier légumes et logements, retour sur les rencontres de l’agriculture en Val-de-Marne © Fb

A l’heure où le maraîchage et l’horticulture en circuit court émerge et que la pression urbaine impose la construction de nouveaux logements, comment concilier les deux ?  Élus, associations et services de l’Etat ont planché sur la question lors d’une matinée débat à Créteil ce vendredi 3 février, à l’occasion des Rencontres de l’agriculture organisées par le le CAUE (Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement ) et le Conseil départemental du Val-de-Marne.

Avec seulement 1000 hectares d’espaces agricoles répartis sur le Plateau Briard, le Haut Val-de-Marne, quelques parcs départementaux et la Plaine Montjean, le Val-de-Marne est pourtant le département de petite couronne le plus agricole. L’enjeu n’est donc pas nul dans le département, et ce vendredi,  élus et représentants des communes du Plateau Briard étaient venus en nombre. A commencer par Michel Lucas, qui fut maire de Périgny-sur-Yerres durant trente ans. Ce dernier a rappelé la constance des élus du plateau à opposer à l’avancée du front urbain une sanctuarisation des terres agricoles. «Aujourd’hui, nous faisons face à un point de basculement, il y a une désaffection des consommateurs pour la grande distribution et une volonté de consommer local. En outre les citoyens refusent de voir davantage de béton. Nos populations ne nous permettront plus de faire de nouvelles constructions. Il faut que nous restitutions aux espaces agricoles les éléments mal bâtis et les friches», estime Sabine Patoux, maire-adjointe en charge de l’urbanisme au Plessis-Trévise, et conseillère départementale. Le CAUE du Val-de-Marne, co-organisateur de ces rencontres de l’agriculture, a mis en place depuis 4 ans, en partenariat avec la Direction Régionale Interdépartementale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt d’Île-de-France, une grande enquête sur la place de l’agriculture dans les projets urbains, faisant ressortir un certain nombre de problématiques.

Ainsi malgré des gages de bonne volonté, deux maraîchers invités à cette matinée se disent dans l’impossibilité de développer leur exploitation agricole faute de place.«Sur le plateau briard, nous pratiquons le circuit court depuis 40 ans et il a fallu être pugnace pour passer les caps difficiles. Nous avons vu le bout du tunnel il y a une dizaine d’année et aujourd’hui, cela fonctionne mieux, il y a de la demande locale. Mais nous ne pouvons pas y répondre complètement car nous sommes à l’étroit. Pour avoir accès au foncier, il faut avoir de la chance parce que les opportunités ne se présentent pas tous les ans», témoigne Jean-Charles Raehm, maraîcher à Périgny.

Concilier logements et agriculture

Face aux  élus des communes rurales cherchant à préserver leur cadre de vie, et aux agriculteurs en quête de nouvelles terres, un représentant de la DRIHL 94, l’organe préfectoral chargé du logement et de l’hébergement, rappelle qu’il faut aussi apporter une solution à une population qui se densifie. Pour répondre aux besoins de logements en Île-de-France, il faudrait que nous construisions 70 000 logements chaque années. Il y a trois ans, lorsque je suis arrivé en poste, il y avait 60 000 demandeurs de logements sociaux, aujourd’hui ils sont plus de 80 000. Nous sommes un territoire en tension, avec 20% de la population qui vit sur 2% du territoire. Les décisions de création de logements ou de préservation de terres arables sont des sujets crispants qui se cantonnent au débat local et sont fragilisés par des dogmes. Aujourd’hui, les communes et leurs moyens de sanctuariser les sols (loi SRU, PLU,…) entrent en collision avec les outils d’autres institutions comme le schéma directeur de la région. Il faut pouvoir parvenir à un consensus>», explique Olivier Weiss, chef de service adjoint habitat et rénovation urbaine à la Drihl 94.

“Une ceinture verte pour nourrir la population métropolitaine”

Vice-président de Rennes Métropole, André Crocq, est venu évoquer le plan de développement de la métropole rennaise, décidé dans les années 70, non pas autour d’une ville-centre, mais comme un archipel. A force de concertations entre élus de communes de toutes les tailles, de bras de fer avec le juge administratif, des hameaux ont pu être laissés en l’état, des terrains agricoles se sont développés entre les pôles urbains, a détaillé l’élu.

Si les surfaces agricoles du Val-de-Marne représentent une goûte d’eau sur les 500 000 hectares que comptent l’Île-de-France, elles constituent, du fait de leur concentration quasi-exclusive au sein du Grand Paris Sud Est Avenir (T11), un atout pouvant être facilement mis en valeur à l’échelle de ce territoire. «Avoir un pôle agricole au sein d’un même territoire, c’est une chance, c’est l’échelle des possibles. On observe que les intercommunalités sont de plus en plus actives en matière de politique agricole locale via la régulation foncière et le marketing territorial de leurs productions. C’est la même logique qui s’applique au Plateau de Saclay, à Seine Aval, Cœur d’Essonne. Tous ces territoires agricoles aux portes de Paris pourraient à terme former une ceinture verte pour nourrir la population métropolitaine>», table Xavier Guiomar, enseignant chercheur à AgroParisTech. Daniel Breuiller, vice-président du Grand Paris, estime pour sa part que l’attractivité du territoire passe par un travail de fond sur la qualité et le cadre de vie, invitant à une pensée collective à l’échelle métropolitaine.

L’agriculture urbaine, faire société…et des légumes

Un point met tout le monde d’accord, celui du bien fondé de l’agriculture urbaine, à la fois vectrice de lien social via les jardins partagés, d’éco-responsabilité avec les Amap et les circuits-courts, de re-végétalisation. «On observe dans de grandes villes du monde comme La Havane, Berlin, Détroit la mise en place d’une production locale de légumes. Cela montre que l’agriculture urbaine n’est pas un phénomène réservé aux bobos. L’existence des jardins ouvriers en témoigne tout comme les succès des Amap, jardins partagés ou collectifs», témoigne Jeannick Le Lagadec, conseillère départementale.Ludovic De Miribel, responsable du bureau d’aménagement de la chambre inter-départementale d’agriculture rappelle néanmoins qu’aucun modèle économique ne s’est nettement dégagé et qu’il est encore trop tôt pour penser à un remplacement des grandes cultures par des exploitations de petite taille : “Les évolutions dans le domaine de l’agriculture s’opèrent lentement, à l’occasion de changements de générations d’exploitants ou après des chocs économiques.”

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