La semaine dernière, c’étaient les salariés de Marseille et Dijon* qui avaient manifesté contre l’enseigne Primark, à l’appel des deux principaux syndicats, la CFDT et la CGT. Ce samedi matin, c’était autour de deux Primark d’Île-de-France, à Villeneuve-la-Garenne dans les Hauts-de-Seine (92) et à Créteil en Val-de-Marne (94), de hausser le ton. Un an après un premier mouvement, une quinzaine de salariés du magasin de Créteil Soleil ont redéployé leur banderole et pétitionné auprès des clients pour manifester contre leurs conditions de travail.
“Aujourd’hui, on a plus le droit, d’avoir faim en fin de mois” ont chanté en chœur les grévistes sur un air des Enfoirés à l’entrée du magasin. Malgré des travaux d’aménagement réalisés pour doubler la surface du magasin en septembre dernier, les salariés ne trouvent pas leur compte. “Plus de surface, c’est plus de travail, plus de rythme, et plus de produits. Et l’effectif n’a pas suivi“, regrette Cathy Vinceguerra, déléguée syndicale CGT.
Les grévistes réclament notamment une hausse des salaires pour les vendeurs au-delà des 4 centimes de l’heure proposés par la direction, comparativement à la hausse prévue de 1,1% pour les cadres. “En augmentant plus les cadres que les salariés ça ne donne vraiment pas une bonne image. Le discours de la DRH est de dire : on valorise les managers parce que c’est une plus-value pour l’entreprise. C’est dur à entendre pour les employés“, réagit la déléguée CGT qui propose de mettre en place un plan d’action sur le management et la formation pour une meilleure coopération entre les employés et les managers. “On ne travaille jamais avec les mêmes managers, donc il faut à chaque fois s’adapter aux gens mais eux ne s’adaptent pas à nous.”
Les salariés présents veulent davantage de considération. “On en a marre de la pression et du manque de respect“, déplore Venia, 22 ans, vendeuse à temps partiel. Le rythme de travail est également pointé du doigt par le syndicat. “Le samedi soir, on finit à 20 heures 45 pour reprendre le lundi à 6h15, donc on n’a pas les 35 heures de repos obligatoire.Et la direction voudrait nosu faire commencer à 5 heures. Mais je me lève déjà à 3 heures et quart du matin pour prendre mon bus, raconte une employée du Plessis-Trévise. Avant je me donnais, maintenant c’est fini, je vais à mon rythme et puis c’est tout !“. Comme la collègue qui l’accompagne, c’est Pôle Emploi qui leur a proposé un poste de vendeuse et manutentionnaire. “Je ne peux pas porter autant de cartons que quelqu’un qui a 20 ans !”
Sur les 700 salariés, seulement 80 étaient déjà présents à l’ouverture du magasin en 2014
Une journée de travail à Primark débute par le déchargement de camions qui apportent les nouveaux produits à mettre en rayon avant l’ouverture du magasin. “On est plus manutentionnaires que vendeurs en réalité. Cette polyvalence est pénible pour les salariés“, assure Cathy Vinceguerra, qui dresse un bilan comptable du troisième anniversaire de l’ouverture du magasin. “Sur les 700 salariés présents lors de l’ouverture en 2014, nous ne sommes plus que 80… Les primes d’ancienneté ne vont rien leur coûter.”
Des clients sensibilisés
Du côté des clients, on ne reste pas insensible à la situation des salariés même si certains préfèrent tracer directement jusqu’aux rayons. “Je suis pour défendre le droit des salariés. Ces gens ne sont pas payés à leur juste valeur ! Primark adopte l’attitude déplorable des grandes enseignes. Pour les clients, ce magasin est très bien mais il ne faut pas que ce soit au détriment des salariés” défend Catherine, ancienne employée dans le commerce. “4 centimes d’augmentation de l’heure, c’est injuste ! Comment on peut motiver des jeunes ? Faut bien qu’ils paient leur loyer. On leur met la pression pour ne pas faire grève“, accuse une cliente. “Ce n’est pas normal. Ce doit être donnant-donnant pour le salarié et l’entreprise. Mais arrêter d’acheter Primark, ce n’est pas leur rendre service“, insiste Isabelle. “On vient ici parce que c’est un peu moins cher“, avoue Mohamed, qui reste attentif à la mobilisation. “Pour que la grève soit efficace, faudrait que tout le monde soit d’accord pour la faire“, suggère le client.
Position de Primark
« Primark confirme qu’une dizaine de salariés sont en grève dans ses magasins de Créteil et Villeneuve-la-Garenne. Ces magasins accueillent les clients dans les conditions habituelles. Les revendications concernent les négociations annuelles qui ont été clôturées il y a quelques semaines. Nous sommes navrés qu’elles n’aient pu aboutir à un accord. Les propositions de Primark, permettant d’augmenter les revenus de tous les employés, seront appliquées comme le prévoit la loi française, afin que chaque collaborateur puisse équitablement bénéficier du développement de l’entreprise en France. Nous continuerons à travailler de concert avec nos partenaires sociaux.».
*Concernant l’appel à la grève du magasin de Dijon, l’entreprise précise que le mouvement n’a été suivi qu’au magasin de Marseille.
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