Ils s’appellent Patricia, Margot, Nassim, Badreddine … et font cette année presque tous leur deuxième rentrée scolaire dans la peau d’un contractuel. Ce mercredi après-midi, ils venaient se faire préciser leur affectation au rectorat, enthousiastes malgré les quelques ajustements de rentrée. Rencontre avec des profils bien différents.
Après avoir été juriste à l’international, Patricia, 34 ans, a décidé de changer de vie et s’est installée à Maisons-Alfort. Être contractuelle a été pour elle une forme de passerelle. « Ça m’a permis de faire le point. J’ai pu tester le métier et voir comment ça se passe », explique-t-elle. Pourquoi un tel virage ? « Ce n’était pas une question financière. Je gagne la moitié de ce que je gagnais avant … C’est vraiment le contact humain. On n’imagine pas à quel point la finance, c’est déshumanisant. Cela ne me correspondait pas … et puis presque toute ma famille enseigne … » Ses premiers pas, elle les a faits au collège Jules Ferry à Villeneuve Saint-Georges en septembre 2016. « J’avais trois classes de troisième et deux classes de sixième. J’ai fait la soutenance, les oraux et la surveillance du brevet. Ça été une année très complète pour moi, et un bon souvenir. J’ai bien été accueillie par mes collègues qui m’ont donné toutes les astuces nécessaires, m’ont prêté des cours, fait assister aux séances. » Aujourd’hui, elle l’assure : « ma reconversion, c’est professeur. » Patricia passera son concours l’année prochaine. En attendant, elle n’a toujours pas son affectation pour la rentrée en cours.
Margot, elle, s’est directement orientée en Master MEEF (métier de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) parcours arts plastiques. A 23 ans, elle entame déjà sa seconde rentrée. « J’ai commencé l’année dernière pour voir si ce métier me plaisait … L’année dernière s’est très bien passée mais cette année c’est compliqué. J’ai trois établissements en même temps dans le 93, et le principal ne veut pas changer mon emploi du temps. On voit tout de suite que quand on est contractuel, on ne fait pas le poids. Le chef d’établissement nous considère comme un mouchoir. Si ça ne convient pas, on prend quelqu’un d’autre … » Loin d’être découragée, elle compte bien passer le CAPES dans le courant de l’année.
De nationalité algérienne, Nassim est un ancien électromécanicien. Il est venu étudier en France pour se perfectionner et vit désormais à Orly. Devant la difficulté de trouver du travail dans son domaine, notamment à cause d’une nationalité étrangère, il a été pendant un temps agent de sécurité avant de se trouner vers l’enseignement en tant que contractuel. « Je voulais pouvoir partager mon expérience et mes connaissances. Je me suis retrouvé dans un collège à Ivry-sur-Seine mais ça ne m’a pas plu. J’ai postulé l’année suivante au lycée Edouard Branly à Créteil pour enseigner les systèmes numériques et l’informatique. Cette année, ils m’ont affecté en BTS mais il y a eu un problème avec un titulaire, donc on me demande de retourner au collège … » grimace le jeune prof qui s’accroche malgré tout. « Avec les élèves et les collègues, ça s’est bien passé. Je veux devenir Français pour passer le concours. Mais il faut attendre cinq ans pour demander la naturalisation. C’est le parcours du combattant…»
Dans la même situation, Badreddine, 32 ans. « Être professeur, ça me plaît ! » motive-t-il, alors qu’il n’était pas destiné à ce métier. « J’ai fini mon DUT en 2007. J’ai travaillé pendant 3 ans en industrie agroalimentaire, puis j’ai fait dessinateur concepteur chez un sous-traitant de PSA. Pendant la crise en 2010, les contrats n’ont pas été renouvelés. Ensuite, j’ai décidé de continuer mes études à Lille et de passer un master en génie mécanique. » C’est finalement à Créteil, hébergé par la tante et les cousins, que Badreddine officie. « Je recommence ma deuxième année au lycée Edouard Branly à Créteil. J’enseigne ma passion à des élèves en BTS maintenance. Les premiers mois étaient compliqués au niveau du cours et des programmes. Je restais toujours avec les anciens professeurs pour qu’ils me guident et me donnent des conseils. Ils étaient contents que je revienne cette année. Je suis le seul contractuel à être revenu ! »
Les syndicats réclament titularisation et vrai statut
A côté de la file d’attente du rectorat, l’intersyndicale de l’académie de Créteil (CGT Educ’action, SNFOLCFO, SNETAA-FO, SNES-FSU, SNUEP-FSU, SUD Education) était pour sa part mobilisée pour le statut des contractuels. “Alors que 13% des personnels de l’académie sont contractuels, le rectorat continue de traiter ces personnels comme une main d’oeuvre “kleenex“, dénonce l’intersydnciale. La rentrée 2017 s’annonce encore une fois bien difficile pour les non-titulaires de l’académie de Créteil, alors même que le recours à la précarité continue d’augmenter dans plusieurs disciplines (Maths, Espagnol…).“
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