Le transfert de la transplantation hépatique de l’hôpital Henri Mondor de Créteil vers l’hôpital Paul Brousse de Villejuif est une réalité depuis le 1er juin. Si l’étape opérationnelle a été franchie, les aspects politiques et économiques restent en revanche à traiter. Au-delà de cette étape traumatique, Mondor va devoir désormais rebondir et ce sera l’enjeu de la nouvelle gouvernance installée pendant l’été. Point d’étape.
Pour très bref rappel des épisodes précédents, le transfert de la transplantation hépatique de Mondor vers Brousse dans le cadre d’une fédération de services, a été décidé par la direction de l’AP-HP il y a environ un an, dans un double contexte de restructuration et de querelle de mandarins au sein du service concerné à Mondor. Alors que des personnels de l’hôpital cristolien avaient mobilisé les élus pour protester, dans le cadre de la coordination Mondor qui avait déjà réussi à maintenir la chirurgie cardiaque à Créteil il y a quelques années, c’est finalement la querelle de mandarins qui a eu raison de la greffe hépatique à Mondor (voir article sur le retournement de situation). Depuis le 1er juin, toutes les greffes hépatiques des patients de Henri Mondor sont donc effectuées à Paul Brousse. Entre 12 et 15 patients ont déjà été greffés, précise le professeur Didier Samuel, doyen de la fac de médecine Paris Sud et chef de pôle à Paul Brousse. Parmi ces transplantations, deux ont concerné des greffes foie-rein et ont été réalisées avec la venue à Brousse d’équipes d’urologie de Mondor. “Nous procédions déjà de cette manière avec l’hôpital Bicêtre.”
“Nous avons d’abord mis en place des consultations à Paul Brousse pour informer les malades. Pour qu’ils ne soient pas surpris, tous les patients ont rencontré un hépatologue et un anesthésiste de Paul Brousse, et ont vu notre centre hépato-biliaire. Nous nous sommes mis d’accord sur le fait que les patients initialement pris en charge à l’hôpital Henri Mondor y retourneraient après la phase post-opératoire initiale, soit une dizaine de jours environ pour les suites simples. Les patients de Mondor ont été identifiés dans une filière Mondor Brousse Mondor, détaille le professeur. Nous souhaitons désormais mettre en place une vraie fédération de services pour officialiser ce parcours mais dans les faits, cela se passe bien. Il n’y a pas eu d’accrocs et il y a eu une bonne coopération des services.” La fusion des listes d’attentes des deux hôpitaux doit encore faire l’objet d’un travail avec l’agence de biomédecine qui établit le rang de tous les patients en attente de greffe, au niveau national, en fonction notamment de la pathologie et du niveau d’urgence. (Voir la synthèse 2017 de l’évolution des demandes et de l’activité de greffe hépatique en France, réalisée par cette agence) “Nous avons fait très attention à ce qu’aucun patient, de Mondor comme de Brousse, ne soit pénalisé concernant sa place sur la liste d’attente, et ne perde pas de points”, pointe le chef de pôle de Paul Brousse.
Transfert de moyens ou budget supplémentaire ?
Reste désormais à officialiser l’opérationnel. Une étape qui est loin d’être une formalité car elle pose tout d’abord la question des moyens. Pour l’instant, un hépatologue de Mondor est parti opérer à Brousse mais le transfert n’est pas encore officialisé. Pour les chirurgiens, un transfert est aussi en discussion concernant deux personnes, témoigne Didier Samuel. Au-delà des chirurgiens, d’autres personnels médicaux et paramédicaux sont nécessaires pour assurer les opérations et leur suivi. “Ces questions sont en négociation avec les directions de chaque groupement hospitalier et avec le siège de l’AP-HP“, indique Didier Samuel. A moins de procéder à de nouveaux recrutements, la question d’un transfert de personnels de Mondor à Brousse risque donc de se poser rapidement, une autre ligne rouge à ne pas franchir pour la coordination Mondor. Alors que l’hôpital cristolien a de son côté procédé au recrutement d’un nouveau chirurgien hépatique, l’enjeu est désormais de renforcer son service de chirurgie hépatique pour pérenniser le positionnement pluri-disciplinaire d’excellence du CHU et éviter un repositionnement en hôpital généraliste de proximité. Un enjeu stratégique. Pas question donc de laisser filer les équipes. “Notre souci est de maintenir un dialogue avec Paul Brousse pour finaliser dans les meilleures conditions la collaboration entre Brousse et Mondor, de maintenir les moyens du service hépatique et de positionner cette problématique dans un cadre plus large, notamment celui du projet national Ma santé 2022“, résume Fabien Cohen, porte-parole de la coordination Mondor. “Il faut que l’hôpital exprime ce qu’il veut devenir dans le grand tout qu’est le paysage francilien”, estime pour sa part Jean-Luc Dubois-Randé, ancien doyen de la fac de médecine désormais président de l’université de Créteil. “Il y aura sûrement des groupements hospitaliers. Est-ce que cela fera que nous serons moins en difficulté à l’hôpital ? La réponse est non, estime l’ancien doyen, toujours chef de service à Mondor. Il y a un vrai contraste entre cette approche et la réalité. En réunion de service, les problèmes que l’on aborde, c’est le manque d’aides-soignantes, profession paupérisée en grande difficulté, le manque d’anesthésistes… On n’est pas dans l’espace mais dans le concret, dans la souffrance au quotidien. Il y a aujourd’hui 200 millions d’euros de déficit à l’AP-HP et bientôt 400 millions d’euros, mais ce n’est pas en faisant des regroupements ou en supprimant des services que l’on va régler le problème. La potion est pire que le mal car le problème est structurel“, analyse le professeur qui a une proposition radicale pour changer la donne : “que les hôpitaux ne soient plus dirigés par des directeurs d’hôpitaux. Car il y a une approche gestion et une approche projets, et lorsque l’on met à la gestion et les finances en premier, on ne raisonne plus en projets.” Pour ce qui est du transfert de la greffe hépatique de Mondor à Brousse, l’ex doyen de la fac de médecine rappelle en revanche qu’il s’agit d'”un échec des hommes”, interne à Mondor. “Nous n’aurions jamais du perdre la transplantation. Nous avions tous les moyens. Au moment de la menace sur la chirurgie cardiaque, on était tous uni. Les cardiologues étaient aussi dans la rue. Cette fois, non seulement ils n’étaient pas dans la rue, pas auprès des politiques, mais en plus ils se battaient entre eux et je n’ai jamais pu séparer les belligérants. J’ai soutenu le maintien de la transplantation jusqu’au moment où l’un des chirurgiens a déclaré forfait.”
Quelle conséquence pour la fac de médecine ?
Parmi les questions qui inquiètent Mondor, l’une concerne le devenir de la faculté de médecine, solidaire du devenir de l’hôpital, dans un contexte de regroupement de facultés déjà engagé à Paris. Un point sur lequel Jean-Luc Dubois-Randé est confiant dans l’avenir. “La faculté de médecine de Créteil est très à la pointe sur de nombreux sujets, qu’il s’agisse de l’urologie, la cardiologie, le métabolisme, la psychiatrie… Nous allons bientôt avoir un nouveau bâtiment de biologie, actuellement en cours de programmation et voté d’ici à la fin de l’année, qui sera un atout majeur. Nous avons par ailleurs très bien réussi l’approche territoriale avec notamment les maisons de santé universitaires, des antennes universitaires en Seine-et-Marne. La faculté est très tournée sur le territoire y compris sur le plan hospitalier avec non seulement Henri Mondor mais aussi le Centre hospitalier intercommunal de Créteil (Chic), celui de Villeneuve-Saint-Georges, nous sommes présents jusqu’à Fontainebleau, Coulommiers… Je ne suis pas du tout inquiet mais il y a des cycles et il faut penser l’avenir, se repenser sur le plan stratégique“, estime le nouveau président de l’Upec.
Un défi pour la nouvelle équipe de direction de l’hôpital Mondor
Alors que la crise de la transplantation hépatique a créé des tensions fortes au sein de l’hôpital, la rentrée 2018 s’effectue avec une nouvelle gouvernance. Edith Benmansour a remplacé Martine Orio à la direction de l’hôpital, avec également un nouvel adjoint, Benoît Sevcik. Télécharger le nouvel organigramme. La présidence de la communauté médicale d’établissement (CME) a également changé, Bertrand Godeau succédant à Ariane Mallat. Suite à l’élection de Jean-Luc Dubois-Randé à la présidence de l’Upec, le doyen de la fac de médecine intérimaire est désormais Pierre Wolkenstein, qui pourrait être prochainement confirmé dans son statut. Une nouvelle équipe à qui il revient d’écrire la suite. De son côté, la coordination Mondor, qui regroupe des personnels, syndicats et élus soucieux de préserver l’intégrité de l’hôpital, a demandé à rencontrer la nouvelle gouvernance et prévoit de se réunir ce vendredi 28 septembre à midi pour faire le point sur ses positions dans ce nouveau contexte local, et celui plus général cadré par le plan Ma santé 2022 annoncé par le ministère de la Santé mi septembre.
Je salue la qualité journalistique de Citoyens94. Amère pour le CHU Henri Mondor, pour ses patients, ses personnels, ses étudiants, sa recherche fondamentale et médicale, qui sont les responsables de se gâchis, la direction du CHU et Generale M. Hirsch en tête, deux mandarins avec la complicité d’une communauté médicale avide de notoriété, comme être président d’une Commission Médicale Établissement ou autre Directoire…
Merci à 94 citoyens pour la diffusion de l’organigramme de l’hôpital. On se rend compte ainsi de la complexité de cette organisation qui requiert une coordination de nombreuses compétences . Vraisemblablement les 10 directions ne fonctionnent pas en l’air . Faute de place il n’aura pas été possible de représenter les liens hiérarchiques et fonctionnels. C’est peut être aussi pour la même raison qu’on remarque l’absence de contrôle de gestion.
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