Clap de fin pour les “gendarmes” de l’Arc boisé. Cette brigade équestre chargée de patrouiller dans ce massif forestier de 3000 hectares constitué de la forêt de Grosbois, Notre-Dame et de la Grange a été dissoute au début de l’été. Trop de communes partenaires s’en étaient désengagées financièrement. Au-delà, se pose la question de l’ensemble de l’application de la Charte de l’Arc boisé.
Difficile de gérer un massif forestier en lisière d’une zone urbaine à cheval sur trois départements (Val-de-Marne, Essonne et Seine-et-Marne). Alors, pour protéger cet espace naturel unique, l’office national de la forêt (ONF), l’Agence des espaces verts de la région Île-de-France, les conseils départementaux, communes et associations situées sur l’Arc boisé s’engagent sur des actions à mettre en œuvre à travers la signature d’une charte forestière de territoire reconduite tous les cinq ans.
En 2013, de nombreux partenaires de la charte de l’Arc boisé avaient souligné la recrudescence des dépôts sauvages et d’incivilités dans les forêts. Près de 19 collectivités avaient alors accordé une participation financière pour créer une brigade équestre. A raison de trois demi-journées par semaine en haute saison, les cavaliers en uniforme vert olive ont pu établir des points de signalement notoire, décourager de potentiels contrevenants par leur simple présence ou venir en aide aux promeneurs.
“A partir de 2016, nous avons constaté un essoufflement des volontés politiques et de 19 partenaires financeurs, nous sommes passés à 8. Nous avons tiré la sonnette d’alarme l’année dernière mais seulement une poignée de membres de la charte ont demandé à nous rencontrer. Le coût annuel de la brigade était d’environ 100 000 euros et il faut comprendre que les sentiers de promenades méconnaissent les limites communales. Ainsi, les cavaliers continuaient de patrouiller dans des collectivités qui ne payaient plus. Nous avons d’abord essayé de diminuer le nombre de tournées pour finalement dissoudre complètement la brigade au début de l’été”, explique Gaétane Hay, cheffe de service à l’agence territoriale de l’ONF à Fontainebleau.
Une présence plus symbolique qu’efficace
Si la présence des cavaliers rassurait les collectivités et les promeneurs, l’efficacité réelle de leur action restait difficilement quantifiable, reconnaît-on à l’ONF. D’abord du fait de la complexité d’un territoire sur lequel se trouve le massif forestier avec des responsabilités différentes en terme de sécurité. Quand ce n’est pas à l’État de l’assurer sur son domaine, c’est souvent du ressort des communes et les signalement de la brigade équestre restaient parfois lettre morte, ne débouchant pas sur des interventions de sécurité. Pour les villes, le sujet n’était pas forcément au dessus de la pile.
“Je n’ai pas participé à cette décision mais je peux la comprendre. Aujourd’hui, la situation financière de nos communes est de plus en plus difficile. Sur notre commune, nous sommes confrontés à des problèmes de dépôts sauvages mais pas sur la coulée verte. En pratique, le coût de la brigade n’était pas à la hauteur du service rendu”, considère Gérard Guille, maire LR de Villecresnes et co-président de la charte de l’Arc boisé en tant que vice-président du Grand Paris Sud Est Avenir. La question de l’efficience de ce dispositif s’est même posée parmi les communes qui l’ont financé jusqu’au bout comme à Santeny. “Nous faisons contre mauvaise fortune bon cœur en nous disant que cela avait son utilité. Je comprends qu’ils ne pouvaient pas être partout mais pour moi qui m’y promène souvent, nous ne les voyions pas beaucoup”, confie Sophie Del Socorro, maire-adjointe.
Que faire à présent ? De son côté, l’Office nationale des forêts réfléchit à des solutions alternatives comme par exemple une appli mobile pour signaler les incivilités.
Fin de la brigade : l’arbre qui cache la forêt ?
Au-delà de la brigade équestre, qui n’était qu’une des nombreuses actions déployées sur l’Arc boisé, se pose la question de l’ensemble de l’application de la charte 2015-2020 qui comprend une trentaine de mesures comme la commercialisation locale du bois, l’aménagement de la forêt, l’accueil du public ou l’amélioration des connaissances écologiques du massif. “Ce sont surtout les organismes d’État, les agences et les départements qui pilotent la plupart de ces programmes d’action. La brigade équestre était l’un des rares aspects sur lequel les communes étaient autant impliquées. Nous sommes en plein questionnement sur la façon dont nous pourrions encourager les élus à se remobiliser pour maintenir la continuité du service”, s’inquiète Gaétane Hay.
Le département du Val-de-Marne sur lequel se trouve la moitié sur massif forestier partage ses inquiétudes et replace les hésitations des élus locaux dans un contexte d’instabilité institutionnelle. “Nous traversons une période au cours de laquelle les communes ont transféré un certain nombre de leurs compétences aux territoires métropolitains. Ces établissements sont en train de monter en puissance. Désormais, les outils de planification urbaine et les PLU qui sont essentiels pour préserver l’Arc boisé seront validés par ces nouvelles collectivités. Nous sommes dans une période de latence qui démobilise et rend l’exercice plus difficile. Un comité partenarial de la charte se réunit une fois par an. Il ne s’est pas réuni en 2017, mais l’année précédente, il s’était réuni à trois reprises, le prochain est prévu d’ici la fin de l’année. Ce sera l’occasion de faire le point. Il faut que les collectivités continuent de s’engager”, insiste Olivier Berardi, chef du service projet à la direction des espaces verts et du paysage du Conseil départemental du Val-de-Marne.
Annulation de la fête de l’Arc boisé
Hasard ou coïncidence, la fête annuelle de l’Arc boisé qui devait se dérouler ce samedi vient d’être annulée. Le conseil départemental du Val-de-Marne indique que “les partenaires institutionnels et les associations se réuniront d’ici la fin de l’année et une nouvelle formule grand public sera proposée entre juin et octobre 2019”.
Consulter la charte forestière de l’Arc boisé 2015-2020
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La bonne qualité de la nature coûte à l’homme !!! Combien allons payer lorsqu’elle se sera vraiment vengée des supplices que nous lui faisons subir?
Quelles sommes seront-nous prêts à mettre pour la sauver??? il est si facile de déverser ses détritus au bord d’un chemin , au bord d’une lisière de forêt, quel courage alors que les dépôts en déchetterie sont gratuits.
Une application smart-phone “Promeneurs citoyens ” permettrait sans doute de pallier à ce manque de surveillance de ce massif boisé si agréable pour nous tous.
Encore un effet collatéral de la réduction des ressources des collectivités, mais aussi de l’éloignement des décideurs du fait des transferts de compétences vers les territoires.
C’est bien dommage que cette brigade disparaisse, quand on voit la multiplication des dépôts sauvages, y compris en pleine nature. J’aimerais bien connaitre la liste des collectivités qui se sont désengagées.
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