Société | | 12/06/2018
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Faut-il censurer le rappeur Niska à Ivry-sur-Seine?

Faut-il censurer le rappeur Niska à Ivry-sur-Seine? © Essonne Info

C’est le grand débat en ville depuis l’annonce de la venue du rappeur essonnien adulé de la jeunesse, sur la scène d’Ivry en fête ce samedi 16 juin. Une nouvelle qui réjouit les fans mais qui froisse des défenseurs de la lutte contre le sexisme.

Ancien gamin d’Evry (né à Villeneuve-Saint-Georges), Niska raconte le monde avec un langage cru qui ne s’embarrasse du politiquement correct.  “Il y a tous les vautours en bas de la tour Et dans l’escalier c’est chacun son tour Copine rentre dans le bloc On te fera du X et non pas l’amour”, “Les filles égarés se prennent pour Madonna Faut les enfermer à coup de cadenas” , “Elle veut des loubous, elle fait le tapin”  Premier ou deuxième degré ? Revendication ou observation ?

Pour le collectif d’agents communaux et de citoyens ivryens qui ont lancé une pétition contre la venue de l’artiste, sa programmation à Ivry est une fausse note. Et le collectif a été rejoint par Femmes Solidaires dans sa requête auprès du maire d’Ivry de demander à ce que “le soir du concert, le répertoire de Niska ne comporte aucune chanson appelant aux violences envers les femmes, ou à la dévalorisation de l’image des femmes“, et “que la municipalité s’engage à faire respecter un cahier des charges incluant les valeurs d’égalité femmes-hommes et de lutte contre les violences pour tous les artistes qui seront amenés à venir à Ivry“. Le collectif Femmes solidaires rappelle son engagement depuis plusieurs années à travailler sur le respect, à mener des campagnes estivales “cet été c’est respect“, expliquant qu’un rapport non consenti est un viol, qu’un non c’est non, et s’inquiète de la venue d’un artiste qui va “à l’encontre de ses valeurs et de ses actions”.

Interpellé par le collectif, le maire indique qu’il est “bien évidemment choqué et scandalisé” par les “propos sexistes” contenus dans certains textes de Niska, “propos qu’aucune liberté de création artistique ne peut justifier“. Il évoque toutefois  l’objectif d’Ivry en fête de rassembler toute la population. “Le samedi soir notamment, on s’adresse plus au jeune public. Je peux regretter que certaines formes de rap et certaines expressions plaisent autant à la jeunesse mais peux aussi témoigner que tous les gamins d’Ivry, notamment les adolescents et les collégiens, sont fous à la perspective de la venue de Niska et m’interpellent dans la rue pour me dire que c’est génial, y compris des gamins que je connais et dont les valeurs familiales ne sont pas du tout tournées vers le sexisme ni une quelqu’une forme de domination masculine.” Et puis, peu d’artistes qui tournent bien acceptent de venir jouer devant un public qui ne paie pas son billet (la prestation est payée par la ville mais le concert est gratuit).

Alors, faut-il demander au chanteur de filtrer sa programmation? “C’est compliqué de demander cela à un artiste“, convient le maire, qui indique néanmoins avoir demandé à ses services de regarder ce qu’il était possible de faire, “mais cela ne peut pas être une condition”.

“Cela me rappelle ce qui est arrivé il y a quelques années avec Enrico Macias. On nous avait demandé de le déprogrammer car il soutient le gouvernement israélien et chante pour Tsahal, et cela était considéré comme incompatible avec notre combat pour la liberté du peuple palestinien. A l’époque, nous ne l’avions pas déprogrammé. De ma même manière, ce n’est pas parce que Niska  vient chanter à Ivry que cela constitue un recul de notre politique contre le sexisme, l’homophobie ou les violences faites aux femmes“, se souvient l’élu.

Juge-t-on plus sévèrement les paroles des rappeurs ?

Tout en condamnant certaines paroles de Niska, le maire pointe également les différences d’appréciation de sexisme en fonction des chanteurs. “Je crains fort que l’on soit beaucoup plus enclins à fouiller sévèrement dans la discographie des rappeurs de banlieue qu’envers des formes plus policées mais qui ne sont pas plus valorisantes pour l’image de la femme“, lâche le maire, citant Julien Clerc et sa chanson Mélissa, “Ouh, matez ma métisse Ouh, ma métisse est nue” dans laquelle le narrateur tire un profit de la  nudité de sa métisse en vendant des longues vues. “Il a une bonne petite tête de gendre idéal mais moi personnellement, je trouve que ce qu’il dit dans sa chanson est tout aussi choquant.” Dans un autre registre, le maire se souvient de “Dans la bouche de Daniela Il y a toujours de la place Pour les copains qui passent”, d’Elmer Food Beat, à l’époque clairement perçue comme de second degré.

A lire chez Essonne Info, la toute première interview de Niska, alors qu’il était encore dans son groupe Mineurs enragés…

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