Urbanisme | | 16/11/2018
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Surchauffe des promoteurs au Perreux-sur-Marne

Surchauffe des promoteurs au Perreux-sur-Marne

Villa Dallia, Florentina, Gabriella, Les Ormes, Elegance, Oxygène… Autant de jolis noms pour désigner les nouvelles résidences en projet au Perreux-sur-Marne. Depuis 2017, les promoteurs tiennent le haut du pavé avec pas moins de 17 chantiers en cours en ville. Mécontents, les riverains se constituent en collectifs pour protester et viennent de lancer une pétition à l’attention de leur édile. Maire LR de la ville, Christel Royer, indique comprendre cette colère et expose les mesures prises et les obstacles rencontrés pour calmer le jeu. Explications.

Située en bord de Marne, proche de Paris et desservie par les RER E et RER A, Le Perreux-sur-Marne fait partie des destinations qui ont la cote pour les projets résidentiels. Comme à chaque élaboration de PLU (Plan local d’urbanisme) dans une commune prisée, les promoteurs ont donc immédiatement calculé les opportunités découlant des nouveaux droits à construire, à peine le PLU voté à l’été 2016, et proposé à des particuliers des valorisations très intéressante de leur pavillon pour construire des immeubles à la place. Une mécanique bien organisée qui a donné lieu à un paquet de projets quasi concomitants, chaque acteur devant se dépêcher de prendre les meilleures places avant son concurrent. “Début 2017, nous avons vu affluer des promoteurs qui se sont littéralement jetés sur la ville, harcelant parfois les propriétaires au point que nous avons fini par leur écrire pour leur demander d’arrêter“, confie la maire, tout en rappelant que ce-sont aussi les habitants, propriétaires, qui vendent, en raison d’offres parfois “indécentes” et “déconnectées des prix du foncier“. Pendant que certains se désolent de la densification, leurs voisins font la culbute sur le prix de leur maison. Et parfois, les chagrins d’un jour se consolent le lendemain devant un joli chèque pour leur propre bien. Difficile de jouer la solidarité complète entre voisins quand des centaines de milliers d’euros sont en jeu…

Pourquoi le PLU a-t-il provoqué un tel appel d’air ? A-t-il été conçu sans suffisamment de garde-fous ? C’est ce qu’estiment les collectifs de riverains. Trois d’entre eux, Agir pour le Perreux, Ensemble Brossolette et Bien vivre au Perreux,  se sont associés pour lancer une pétition commune en ligne, dénonçant les 1500 nouveaux logements autorisés à construire depuis l’avènement de ce nouveau PLU alors qu’ils pensaient que seuls 170 par an étaient autorisés. “Le PLU a changé les règles, permettant de construire plus d’étages, ce qui a entraîné une multiplication des projets. Dans de nombreux quartiers, il n’est plus possible de se garer en raison de tous les chantiers en cours pour ériger des bâtiments de 60 appartements là où il n’y avait que deux pavillons”, témoigne Marylin Schmeler, présidente d’Ensemble Brossolette, qui s’inquiète de l’impact paysager de cette densification et de ses conséquences sur les équipements publics, à commencer par les écoles où l’on commence à pousser les murs. “Je sais qu’il va y avoir une nouvelle école dans le quartier nord mais nous sommes situés dans le sud”, témoigne-t-elle.

Nous avions effectivement proposé un PLH (Plan local d’habitat) à 170 logements par an, mais celui-ci n’a jamais été validé par le préfet qui considère que ce n’est pas suffisant. Le PLU, lui, n’indique pas de limitation du nombre de logements à construire. Et il ne permet plus, comme le faisaient les POS (plan d’occupation des sols) de définir un COS (Coefficient d’occupation des sols qui définit le nombre de mètres carrés de surface de plancher susceptible d’être construit sur un terrain) ni une surface minimum de terrain. Nous pouvons en revanche limiter les hauteurs en fonction des secteurs, les gabarits, et nous avons sanctuarisé 60% de la ville en zone pavillonnaire, en contrepartie d’une densification plus importante sur les grands axes comme Alsace Lorraine, De Gaulle, Brossolette, Ledru Rollin et 8 mai 1945. Nous avons également imposé l’intégration de 30% de logements sociaux dans les projets”, détaille l’élue. Depuis les années 2000, plusieurs lois se sont en effet succédé pour assouplir les règles d’urbanisme afin de favoriser la construction de logements, et des objectifs ont été donnés aux communes pour construire au total 70 000 nouveaux logements par an dans la région parisienne.  Le Perreux-sur-Marne, qui compte moins de 11% de logements sociaux alors que la loi SRU (Solidarité urbaine) en prévoit 25%, a par ailleurs des obligations de rattrapage. Et la ville fait partie des six du Val-de-Marne qui ont fait l’objet d’un constat de carence pour n’avoir pas respecté ses prévisions 2014-2016. Elle doit ainsi s’acquitter une pénalité renforcée de près d’1,4 million d’euros chaque année, en plus d’un pouvoir de préemption du préfet. Voir article spécifique sur ce sujet. “Nous avons un objectif de 737 logements sociaux supplémentaires d’ici à la fin 2019, soit environ 240 logements par an“, précise Christel Royer. En partant du ratio des 30%, cela impliquerait quelques 800 logements par an au total. “Nous marchons sur la tête et je comprends la colère des Perreuxiens. Nous aussi nous sommes révoltés par la manière dont l’Etat dessaisit les communes de leurs prérogatives en matière d’urbanisme, faisant fi de notre histoire. Le Perreux est historiquement une banlieue pavillonnaire”, reprend la maire qui souhaite renégocier ses quotas de logement avec la préfecture. Le problème reste de pouvoir loger tout le monde alors que la crise du logement sévit dans l’agglomération. “Il y a une politique nationale à repenser pour mieux répartir l’activité économique et arrêter d’hypertrophier nos métropoles pendant que certaines villes de province se meurent“, estime l’élue sur ce point.

Dans l’immédiat, la ville a commencé à réagir. “Dès la mi-2017, face à l’afflux des demandes de permis de construire, qui étais tous conformes au PLU, nous avons décidé d’arrêter complètement de délivrer les permis. Les 1500 logements autorisés l’ont quasiment tous été au premier semestre 2017.  Résultat, nous avons un promoteur qui a fait un recours, mais cela nous permet de gagner du temps. En outre, nous avons opéré une modification du PLU en 2017, pour améliorer l’épannelage et ajuster les hauteurs de construction par rapport à la largeur des rues. Nous avons aussi renforcé les zones de pleine terre“, précise la maire. Les riverains, eux, sont aussi passés à l’acte en lançant des recours en justice contre les projets. “Cinq projets concernant au total 200 logements font actuellement l’objet d’un recours contentieux dans la ville“, chiffre l’édile. “Rien que dans mon quartier, il y a trois recours contre des projets”, pointe pour sa part la présidente d’Ensemble Brossolette, qui rappelle que l’un des projets, qui prévoit de construire 48 logements sur la propriété d’un maire adjoint, avait fait l’objet d’un recours gracieux par les riverains auprès de la ville pour que ne soit pas accordé le permis de construire en raison de plusieurs points de non conformité comme l’installation d’une chaudière au deuxième sous-sol alors que le site est en zone inondable. “Malheureusement, nous n’avons pas eu gain de cause et le permis a été accordé en septembre 2017, donc après la mi-2017. Mais je reconnais que le PLU modifié de 2017 constitue un net progrès”, note toutefois la représentante de l’association qui regrette que cette réaction ne soit pas intervenue plus tôt pour éviter l’afflux initial des projets. “Tous les permis que nous avons accordés étaient conformes au PLU et le projet dont il est question a été traité comme les autres. Nous avons même exigé des contraintes supérieures à celles du PLU qui autorisait quelques logements de plus“, précise la maire.

Logements sociaux: la maire du Perreux-sur-Marne s’explique

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