Education | Val-de-Marne | 10/12/2018
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Le point sur le mouvement lycéen en Val-de-Marne

Le point sur le mouvement lycéen en Val-de-Marne

(Dernière minute, à 10h50 : incidents signalés à Créteil, devant Saint-Exupéry, et à Maisons-Alfort, devant Paul-Bert et Delacroix) Les blocus lycéens devaient se poursuivre dans de nombreux établissements du Val-de-Marne ce lundi tandis que l’organisation lycéenne UNL appelle à un mardi noir demain. Samedi, presque tous les lycées du département sont resté fermés après les dérapages et interpellations de vendredi. Des professeurs sont mobilisés pour éviter les débordements. Proviseurs et fédérations de parents d’élèves appellent au calme. Le point sur la situation en Val-de-Marne.

Alors que les gilets jaunes restent peu visibles dans le Val-de-Marne, en dehors de mobilisations sporadiques autour de quelques carrefours le weekend, les habitants sympathisants préférant se joindre aux manifestations parisiennes, le mouvement des lycéens s’est propagé très vite la semaine dernière. De moins de cinq lycées mobilisés le mercredi, ce-sont plus d’une vingtaine d’établissements, dont les plus gros, qui ont été bloqués vendredi avec, en marge, des débordements dans la rue et des affrontements contre les forces de l’ordre qui ont conduit à 59 interpellations dans le département, essentiellement à Créteil, du côté de Saint Exupéry, à Alfortville, Maisons-Alfort, Saint-Maur-des-Fossés, Fontenay-sous-Bois ou encore Villeneuve-Saint-Georges. Une quarantaine de jeunes ont été présentés à un juge des mineurs ce weekend. 33 fonctionnaires de police ont pour leur part été légèrement blessés, indique-t-on en préfecture. Plusieurs élèves ont aussi été blessés par des tirs de flashball.

Une situation jugée suffisamment sensible pour que quasiment tous les proviseurs des lycées du Val-de-Marne décident de fermer samedi. “Les graves événements qui se sont déroulés aujourd’hui à Saint-Maur devant certains lycées (D’Arsonval, Condorcet, Mansart, Gourdou-Leseur, Teillard de Chardin), conduisant à des violences physiques, des agressions, des atteintes aux biens publics (bâtiments, mobilier urbain… ) comme privés (véhicules… ) ont conduit les directions de ces établissements à répondre à l’invitation du Préfet de ne pas ouvrir les lycées demain. (…) Aussi, bien que le lycée Berthelot n’ait pas eu à subir d’événements aussi graves, mais parce que les moyens (internes et externes) d’assurer la sécurité de tous ne peuvent être mobilisés dans les meilleures conditions demain matin, j’ai donc décidé de fermer le lycée samedi 8 décembre”, motivait ainsi le proviseur de Berthelot dans un courrier aux parents d’élèves vendredi soir.

Ce lundi matin, les blocus devraient se poursuivre, partiels ou totaux. “Notre mouvement est pris au sérieux mais pour l’instant nous n’avons pas obtenu gain de cause. Il ne faut pas lâcher prise”, invite une lycéenne de Louis Armand, à Nogent-sur-Marne. Alors que le mouvement social a démarré avec les gilets jaunes en colère contre la hausse du prix à la pompe, le débat s’est pour l’instant focalisé sur la fiscalité et le pouvoir d’achat. Principales revendications concernant l’éducation : le renoncement à la suppression des 2600 postes de professeurs dans le secondaire, l’abrogation de Parcoursup, de la réforme du bac et de la hausse des frais d’inscription des étudiants étrangers.

Les discussions avec le ministère de l’Education nationale s’amorcent néanmoins. Ce lundi soir, le syndicat UNL (Union nationale lycéenne) est attendu au cabinet du ministre Jean-Michel Blanquer, et ce mardi soir, une autre réunion au ministère doit se tenir avec les trois syndicats lycéens UNL, FIDL et SGL. Dans ce contexte, l’UNL a appelé à un “mardi noir” des blocus. “Nous ne sommes pas contre les blocus ce lundi, toute mobilisation est utile, mais nous appelons à une mobilisation totale mardi” invite un porte-parole de l’UNL. Une manifestation parisienne est d’ores et déjà prévue à midi depuis la place Saint-Michel.

Dans leur majorité, les lycéens mobilisés ne sont toutefois pas engagés dans un syndicat lycéen, et ils apprennent l’organisation de la mobilisation sur le tas. “Au lycée Louise Michel, il y a quelques militants de l’UNL et le mouvement est plus structuré avec des mégaphones, des banderoles, des tracts”, remarque un professeur de Langevin-Wallon, à Champigny-sur-Marne. Pour les jeunes organisateurs, l’une des difficultés est d’éviter les débordements et de garder le contrôle sur le sens de la mobilisation afin d’éviter que la situation ne parte en vrille à cause de camarades qui ont surtout envie de s’amuser à brûler une poubelle ou jouer les provocations en brouillant le message initial, comme cela s’est passé à Fontenay-sous-Bois ce vendredi matin. “Nous devons nous approprier notre barricade, parler, discuter”, insiste l’une des animatrices du mouvement à Louis Armand. “Mais ce n’est pas toujours facile de dire “ne jetez pas de cailloux” quand il y a un tel climat de défiance envers la police, nourri par des violences policières qui sont réelles aussi, poursuit l’élève de terminale. A Pablo Picasso, j’ai un camarade qui s’est fait taper par d’autres lorsqu’il leur a dit d’arrêter, moi on m’a juste dit “Ta gueule” parce que je suis une fille sans doute.

Sans être affilié à un syndicat lycéen, les élèves se fédèrent malgré tout, que ce soit par connaissance d’un tel ou tel dans le lycée d’à côté, via les réseaux sociaux, ou lors des manifs qui font converger les groupes. Vendredi, une AG s’est ainsi tenue à l’issue de la manif parisienne, permettant aux différents lycées engagés de se présenter.

Dans ce contexte tendu, certains professeurs, déjà mobilisés par ailleurs contre les suppressions de postes à venir dans le secondaire et les réformes en cours, veillent spontanément sur le mouvement pour éviter les débordements. “Vendredi, les élèves n’étaient pas en classe mais dehors et la circulation sur l’avenue Salengro, qui est une quatre voies, n’avait pas été coupée alors qu’il y avait environ 350 lycéens éparpillés par paquets. Notre souci a été d’éviter que l’un d’eux ne se prenne une voiture”, indique un enseignant du lycée Langevin-Wallon de Champigny-sur-Marne. Par ailleurs, des enseignants de Langevin Wallon et Louise Michel ont appelé à faire grève ce lundi matin pour soutenir les revendications des élèves. A Créteil, les enseignants des différents lycées de la ville se sont constitués en collectif dès jeudi dernier, au-delà des syndicats d’appartenance des professeurs, certains d’entre eux n’étant du reste affilié à aucune organisation, pour accompagner les lycéens dans leur mobilisation. Et au lycée Léon Blum, une dizaine de professeurs ont accompagné quelque 200 lycéens à l’Inspection académique, après que ces derniers aient organisé un blocus partiel de leur établissement. “Les élèves n’ont pas bloqué la circulation. On aurait dit une grande sortie scolaire”, témoigne une professeure. Après le rassemblement au rectorat, quelques élèves ont été manifester à Paris et la plupart sont revenus au lycée où les profs ont fait cours. “A Blum, la hausse des frais d’inscription des étudiants étrangers est très concrète pour les élèves car tous n’ont pas la nationalité européenne et il y a plusieurs très bons élèves qui vont se retrouver bloqués par des tarifs à 3000 euros par an”, détaille la professeure. A Vitry-sur-Seine encore, une enseignante du lycée Jean Macé indique qu’elle sera au lycée plus tôt ce lundi, dès 7h15-7h30, pour veiller sur les élèves. Vendredi, des professeurs de Romain Rolland, à Ivry-sur-Seine, ont accompagné des élèves de leur lycée et de celui de Vitry à la manifestation parisienne de Stalingrad.

Du côté des fédérations de parents d’élèves, on essaie de calmer le jeu. Dans un courrier commun avec les proviseurs des lycées d’Arsonval, Berthelot, Condorcet, Gourdou-Leseur et Mansart de Saint-Maur-des-Fossés, adressé ce dimanche 9 décembre, Peep, Fcpe et associations de parents indépendants ont dénoncé des débordements de la semaine passée et invité les parents à la vigilance : “Quand, dans ces mêmes messages incitant à entraver la liberté d’accès à son lycée – avec comme motivation « si le blocus fonctionne y’aura plus cours jusqu’aux vacances » – figurent des appels à des actions violentes contre les forces de l’ordre (« on les caillasses, on les rend fou ») ou à menacer la vie de tous (« on casse tout, on brûle tout, ramenez de l’essence et des briquets… », « J’annonce il y aura des blessés ») on ne peut qu’être particulièrement inquiets des dérapages à venir. Nous vous invitons donc, par un dialogue avec votre enfant, à l’informer des conséquences de tout ceci et, si nécessaire, à le dissuader de s’engager dans de telles actions incontrôlables”, prévient le courrier.

Alors que le mouvement est très mobile d’un lycée à l’autre, que les blocus vont du simple filtrage au blocus complet, et qu’il est difficile d’anticiper un incident pour intervenir ici ou là, les forces de l’ordre sont pour leur part sur le qui-vive ce matin tandis qu’en préfecture, on multiplie les points d’étape avec le rectorat.

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