Créations sur mesure pour des designers, commandes de grandes enseignes de luxe ou demandes de particuliers… Sous leurs mains expertes, le cuir, le skaï, ou le tissu peuvent tout habiller. A Ivry-sur-Seine, les artisans de Selaneuf sont des références et depuis un an, l’entreprise est dirigée par Nathalie Bourgouin qui, après avoir tout appris de son prédécesseur Michel Pochon pendant 25 ans, souhaite transmettre sa passion.
Un véritable cabinet de curiosité s’offre aux visiteurs de l’atelier de sellerie Selaneuf. Sous des bâches, des voitures de collection attendent le remplacement de leurs capotes. Les artisans s’activent autour des éléments qui doivent recouvrir des chaises vendues par la maison de maroquinerie de luxe Louis Vuitton. “C’est un métier de passionné. Les matières ne se travaillent pas de la même façon. Alors à chaque pièce, le sellier se lance dans un défi. Je dis souvent aux personnes que je forme qu’il y a certaines choses qu’ils ne peuvent comprendre que par la pratique. Michel Pochon estimait qu’il fallait une dizaine d’années pour devenir un bon sellier mais après 25 ans, j’ai l’impression d’apprendre tous les jours”, explique Nathalie Bourgouin qui compte 3 apprentis parmi ses 7 collaborateurs. “C’est important de transmettre, sinon ce métier rare risque de disparaître. Au manque de vocation s’ajoute le peu de candidats à la reprise des ateliers. Lorsque mon patron me l’a proposé, c’était un moment compliqué de ma vie mais j’ai accepté. C’est très prenant, parfois il faut travailler 70 heures par semaines mais je prends toujours autant de plaisir et n’ai aucun regret. Si la transmission s’est passée sans encombre, c’est aussi parce qu’avant de me confier “son bébé”, Michel a pris le temps de bien me former”, poursuit-elle.
Quelques jeunes se prennent de passion pour ce métier mais au prix de véritables parcours du combattant. “J’ai découvert la sellerie en regardant des émissions de décoration à la télévision. J’ai fait un CAP de cuisine puis j’ai cherché un employeur pour pouvoir m’inscrire en bac pro sellerie mais je n’ai pas trouvé. Alors, j’ai commencé une formation qui s’en rapprochait avec un bac pro tapisserie, puis un diplôme des métiers d’arts en tapisserie d’ameublement. Entre temps, j’ai découvert la sellerie Selaneuf, une petite voix m’a dit d’appeler, et j’ai finalement été prise et j’en profite à fond. Avec le recul, je suis contente de ce parcours qui m’a permis de découvrir différents horizons. J’espère dans les années à venir voyager à l’étranger pour m’enrichir des techniques de sellerie pratiquées ailleurs”, détaille Waldnie, en première année d’apprentissage dans un centre de formation de Joué-lès-Tours.
“Lors de mon stage de troisième, j’ai passé une semaine chez un sellier et j’ai découvert la beauté d’un métier où l’on se sert de ses mains. Je voulais faire le CAP équivalent mais les professeurs m’en ont dissuadé et j’ai fait une seconde en arts appliqués, mais cela n’a pas marché. J’ai finalement rejoint les Compagnons du devoir et c’est maintenant ma deuxième année d’apprentissage. On ne se rend pas compte que ce métier est à la base d’un nombre illimité d’applications. Les tenues des personnes qui pratiquent le wingsuit (sport extrême consistant à sauter dans le vide et se laisser planer à l’aide d’une combinaison), les bâches qui couvrent les camions, des voiles de bateaux. Une fois que j’aurais assez d’expérience, je me vois bien créer ma propre entreprise”, explique Morgane.
Téo, le troisième apprenti de l’atelier Selaneuf est également chez les Compagnons du devoir. Passionné par les intérieurs des automobiles, il a également été orienté dans l’enseignement général sans s’y plaire. “Mon rêve, c’est de travailler pour Pagani, un constructeur italien de voitures de prestige. Il faudra peut être que j’apprenne l’italien parce que leurs ateliers se situent là-bas“.
A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, l’atelier Selaneuf et sa cheffe d’entreprise ont reçu la visite des députés Brigitte Bourguignon et Sylvain Maillard ainsi que de Bernard Stalter, président de l’Assemblée permanente des chambres des métiers et de l’artisanat, des présidents des chambres régionales et départementales. “Nous ne voulons plus entendre les enseignants, les conseillers d’orientation ou les familles dire à leurs enfants qu’ils peuvent “faire mieux”, lorsqu’ils disent vouloir s’orienter dans les filières professionnelles. Il y a encore un travail énorme à réaliser au niveau de l’orientation pour infléchir cette tendance”, juge Nicole Richard, présidente de la chambre des Métiers et de l’Artisanat du Val-de-Marne.
Petit retour d’expérience: voici quelques temps, avant la transition de propriétaire, j’ai confié une auto (petite anglaise) à Selaneuf pour un intérieur complet. Tous les matériaux (principalement la moquette et le ciel de toit) étant fournis par moi-même, la voiture est livrée prête pour les travaux (pare-brise, glace arrière et portes démontés). Tous les joints étaient aussi fournis neuf, Michel avait initialement proposé de les remonter à la place des anciens.
Après de nombreux appels, mails, le rendez-vous convenu chaque fois repoussé pendant des mois et des mois d’attente, la date butoir étant alors le week-end suivant, le début des travaux est enfin annoncé. Je suis passé à l’atelier un mardi midi avant les travaux, et la voiture était livrée le lendemain soir: Nathalie était encore à l’œuvre, finissant de mettre en place la moquette, tandis que Michel refaisait les petits caches pour les panneaux arrières, ceux d’origine ayant été endommagés au démontage.
Rapidité d’exécution : rien à dire pour les deux tâches principales (moquette et ciel de toit), même si certains travaux (couverture du volant, des pare-soleil, coffre, remontage des joints …) ont été reportés à une date ultérieure, pour n’être finalement jamais faits chez Selaneuf, trouver du temps pour les finitions payées d’avance s’avérant impossible au fil des mois, et un dialogue toujours plus difficile…
Qualité d’exécution : si le ciel de toit était bien posé sans pli, des traces de colle ont été laissées en de nombreux endroits autour du pare-brise et de la glace arrière, des coups de cutter traversant la peinture aussi en plusieurs endroits (non seulement la personne n’avait pas compris ce qui serait sous le joint et ce qui serait visible, mais elle a coupé au cutter sur la carrosserie et la peinture neuve au lieu de couper le tissu de toit aux ciseaux) !
La moquette coupée au hasard – et non selon le patron que j’avais pris la peine d’imprimer ou le modèle d’origine – n’a finalement pas suffit car les morceaux restant auraient du être ré assemblés pour le coffre… Plus grave, le surplus de moquette laissée libre à l’avant s’emmêlait autour du verrou bas de colonne de direction, risquant de bloquer celle-ci avec un danger potentiel si cela se produisait pendant la conduite…
De même, la moquette dépassait et obturait presque complètement les bouches d’aération arrière, les panneaux latéraux étant collés dessus : la réouverture de l’aération a demandé de reprendre complètement les panneaux arrière.
Le coût d’ exécution était élevé (env. 200€/h si une seule personne a travaillé sur la voiture, et c’est très difficile de travailler à 2 dans une voiture 2 places l’une posant la moquette et l’autre le ciel de toit… si tel était le cas cela peut expliquer la qualité très approximative du résultat), mais même dans ce cas les défauts de pose sont très loin de justifier un tel tarif ou un tel service.
Et ensuite pendant des mois et des mois j’ai du réclamer le volant et les pare-soleil, que j’ai fini par retrouver en cherchant sur place mais non refaits, ainsi que les caches arrières d’origine (avec les trous de fixations au bon endroit). Apparemment Selaneuf se concentrait sur le mobilier contemporain, le secteur du luxe étant la promesse d’une forte marge… pourquoi alors s’engager sur des travaux de sellerie automobile, et surtout les réaliser de manière aussi médiocre?
Je ne suis pas près d’y retourner.
N'envoyez que des photos que vous avez prises vous-même, ou libres de tout droit. Les photos sont publiées sous votre responsabilité.