Un dispositif simple et discret pour adapter sa salle de bain à la perte d’autonomie. Depuis quelques semaines, la jeune entreprise Manea hébergée à la pépinière Silver Innov’ d’Ivry-sur-Seine, a lancé en pré-commande la vente de son bras flexible de douche. Rencontre avec Cyrille Dalmar, l’entrepreneur à l’origine de cette aventure.
Cet article s’inscrit dans le cadre de la rubrique Histoires d’entreprises et d’entrepreneurs, rédigée – en toute indépendance – grâce au soutien de la CCI du Val-de-Marne, pour donner à voir la géographie entrepreneuriale du département. Voir tous les articles publiés dans cette rubrique.
Parce qu’une mobilité réduite transforme n’importe quel geste du quotidien en épreuve, il convient de trouver des outils adaptés pour se faciliter la vie. Mais quand ces équipements n’existent pas, il faut parfois faire preuve d’imagination. C’est ainsi que Cyrille Dalmar, opticien de formation dont le bras gauche a été très abîmé lors d’un accident, a conçu un support pour l’aider à prendre sa douche sans souffrir. «Un jour, fin 2017, alors que j’étais en train de me laver, une idée m’a traversé l’esprit. Je me suis précipité dans un magasin de bricolage pour tenter de donner vie à cette intuition, une barre flexible pour fixer n’importe où dans sa salle de bain son pommeau de douche», explique cet habitant de Gentilly.
Quelques années auparavant, il avait déjà tenté de lancer une société pour créer des lunettes par impression 3D sur-mesure mais le projet n’avait pas abouti. Mais grâce à cette première tentative entrepreneuriale, Cyrille Dalmar a noué de précieux contacts avec des professionnels qu’il a pu immédiatement solliciter pour son nouveau produit. «J’ai vu que dans le commerce, les seuls produits proposés étaient très volumineux, médicalisés et donc stigmatisants. Je souhaitais offrir une solution fonctionnelle et esthétique, alors, avec mes amis designers, nous avons travaillé sur des prototypes», détaille-t-il.
Gérant d’une boutique d’optique dans Paris, il peut difficilement s’investir dans son projet et négocie alors avec son employeur une rupture conventionnelle pour pouvoir se consacrer entièrement à sa création d’entreprise tout en bénéficiant d’un revenu. Si le jeune entrepreneur est parti de sa propre expérience pour concevoir cet équipement, Cyrille Dalmar a compris qu’il pourrait répondre aux besoins d’autres publics. C’est ainsi qu’il a fait appel à sa sœur, Séverine Fraval, animatrice socioculturelle en Ehpad (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) pendant 12 ans. «Elle a du changer de métier après s’être déchiré le biceps en déplaçant une personne âgée au cours d’une activité. Depuis, nous nous sommes associés et elle m’a beaucoup aidé à rendre le produit plus ergonomique. Séverine s’occupe de prospecter le champ de la gériatrie quand je me consacre à celui du handicap.» Au fur et à mesure, l’équipement évolue. Alors que la barre qui se fixe à l’aide d’une ventouse devait initialement se verrouiller à l’aide d’un bouton rotatif, ce mécanisme est par exemple abandonné au profit d’un levier après avoir pris en considération la préhension limitée des seniors.
Un coup d’accélérateur pour la concrétisation du projet
«Pendant que je réalisais des études de marché, je me suis rendu au salon des entrepreneurs à la porte Maillot à Paris en février 2018. En une journée, j’ai pu rencontrer des institutions et organismes qui m’ont permis d’y voir plus clair», se souvient l’entrepreneur qui rejoint alors le programme entrepreneur #Leader de la Chambre de commerce et d’industrie du Val-de-Marneoù il bénéficie d’aides et conseils pour monter son dossier financier. «Je suis ensuite passé devant le comité d’évaluation des projets (CEP). Une table ronde où des investisseurs, des entrepreneurs, des élus, des directeurs financiers ont validé mon projet. Cela m’a permis de rencontrer Val-de-Marne actif pour l’initiative (Vmapi) et d’obtenir un prêt d’honneur et des prêts bancaires.»
Pendant ce temps, Cyrille Dalmar se lance dans le sourcing des matériaux qui composeront son équipement. Il se rend au salon de l’industrie mais rentre bredouille. «Aucun industriel n’était vraiment intéressé. C’est un petit projet donc ça n’est pas intéressant économiquement pour eux. C’est par la suite que je suis parvenu à tisser de vrais partenariats avec des fournisseurs. Aujourd’hui, 90% du produit est réalisé en France mais je vise une fabrication intégralement française dès que nous aurons les ressources nécessaires pour le faire. A l’heure actuelle 70% des aides techniques à la perte d’autonomie viennent de l’étranger. C’est tout un challenge de prouver que l’on peut produire de tels équipements en France de manière éco-responsable. Ce sont des travailleurs handicapés en ESAT qui assemblent les produits », détaille le chef d’entreprise.Entre temps, Manea a fait breveter son invention qui est désormais en procédure d’extension pour l’international.
D’abors installée au domicile de son créateur, la jeune pousse a rejoint la pépinière Siliver Innov’ d’Ivry-sur-Seine spécialisée dans les solutions innovantes pour l’allongement de la vie et l’autonomie. «Cette étape m’a permis de faire avancer plus rapidement mon projet en échangeant avec d’autres entrepreneurs et en bénéficiant des ateliers comme les concepts crash, où nos produits sont testés par des panels de personnes âgées.»
Quasiment un an après la création de l’entreprise, Manea est désormais disponible en pré-commande sur le site internet de la société. “Refaire entièrement sa salle de bain pour l’adapter à sa perte d’autonomie coûte en moyenne 7000 euros. Avec notre équipement à moins de cent euros, plus besoin de faire de travaux !”, vente Cyrille Dalmar, qui envisage d’élargir la gamme et de commercialiser à terme d’autres produits.
Plus d’infos : http://www.manea-france.fr/
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