Education | Val-de-Marne | 16/06/2019
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Bac en Val-de-Marne : manifs, grèves et convocations massives des profs

Bac en Val-de-Marne : manifs, grèves et convocations massives des profs © Chaine humaine à Gentilly en avril

Convoqué pour aller surveiller les épreuves du baccalauréat au lycée Romain Rolland d’Ivry-sur-Seine, ce professeur de Darius Milhaud (Le Kremlin-Bicêtre) fera grève pour la première fois de l’année ce lundi 17 juin.  «Parce que cette fois-ci c’est visible.»

«Cela fait dix ans que l’on fait grève régulièrement pour alerter sur les inégalités sociales et territoriales dans l’éducation. On ne nous répond jamais. Idem pour la revalorisation salariale alors que nous sommes moins bien payés que les professeurs espagnols. Cette année je n’ai pas fait grève car personne n’écoute et c’est à chaque fois près d’une centaine d’euros de moins par jour de grève à la fin du mois. Mais cette action-ci, on en parle, car faire grève le jour du bac, c’est inédit. A force d’être pris pour des cons, on en arrive là. Je ne suis pas inquiet pour les épreuves, je pense qu’elles auront bien lieu au vu des moyens déployés. A Romain Rolland, les épreuves vont en partie se dérouler dans le gymnase pour augmenter le nombre d’élèves par professeur surveillant, et tous les enseignants ont été convoqués en réserve pour être sûr qu’il y ait un nombre suffisant de surveillants. Dans mon lycée, nous sommes une quarantaine à avoir décidé de faire grève», détaille le professeur. La réforme du lycée instaurée par le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, le professeur indique en avoir déjà vu les effets. «25 élèves de seconde sur 210 n’ont pas obtenu leur troisième option demandée», témoigne-t-il.

Au lycée Gutenberg de Créteil, une quarantaine de professeurs prévoient également de débrayer ce lundi, tout en se rassemblant devant l’établissement aux côtés d’autres enseignants grévistes du premier degré, pour faire cause commune contre la réforme sans bloquer en revanche l’accès aux épreuves. «Au début, les professeurs, qui sont pourtant régulièrement mobilisés à chaque mouvement, ont hésité à s’arrêter le jour du bac, mais le mépris qui s’est affiché vis-à-vis des élèves de seconde et de leur famille les ont convaincus. Dans notre lycée par exemple, nous n’avons pas obtenu la spécialité informatique alors que nous avions tout mis en oeuvre pour l’obtenir. Les élèves qui souhaitent suivre cette option n’ont donc d’autre choix que de changer d’établissement mais ils ne sont pas prioritaires car ce n’est pas leur secteur géographique et en plus ils n’aiment pas changer de lycée. Ce-sont des élèves fragiles issus de quartiers populaires, ils appréhendent ce changement», développe Fabrice, enseignant et délégué CGT. Le professeur de mathématiques s’inquiète par ailleurs de la diminution drastique du nombre d’élèves de première qui auront des cours de mathématiques en première, par rapport à l’année dernière, la présence de cette matière n’étant plus obligatoire comme avant en S et ES.  «Nous sommes passés de 120 élèves à 83 qui auront des cours de mathématiques. Les élèves sont assez faibles en maths et le dilemme s’est posé d’abandonner cette science quitte à se fermer un certain nombre de filières post-bac pour qui cette discipline constitue un critère de sélection, ou de risquer de ne pas suffisamment réussir dans cette matière. Il en résulte une poussée des élèves vers les filières technologiques, de ES vers SMTG notamment, car les élèves ont peur d’être mis en échec», détaille l’enseignant. Pour Fabrice, il n’y a pas d’hésitation. Ce lundi matin à 7h45, il sera devant le lycée, mais pas dedans. Et pourtant, il a préparé ses élèves au bac, sans relâche. «La semaine dernière, j’étais dans l’établissement tous les jours de 8h à 18h pour les accompagner. La grève, nous leur avons expliquée. Ils comprennent nos revendications, ils nous font confiance», ajoute le prof.

En dehors du Sgen-CFDT et de Snfolc (FO), presque tous les syndicats enseignants ont appelé à la grève ce lundi 17 juin, à savoir Snes-FSU, Sud, Solidaires, CGT, CFE-CGC, Snalc, ainsi que le collectif des Stylos rouges.

Rassemblement au rectorat puis à Paris

Après les rassemblements devant des lycées à 8 heures, un autre est prévu à 10 heures devant le rectorat. L’après-midi, une manifestation est programmée à partir de 14 heures rue du Bac.

Parents d’élèves et lycéens partagés

Du côté des parents d’élèves et des lycéens, on est partagé. La fédération Peep et Avenir lycéen, un syndicat lycéen créé fin 2018, ont appelé dans un communiqué commun à un appel à la responsabilité.  «Avenir Lycéen et la Peep respectent le principe constitutionnel qu’est le droit de grève. Cependant, il ne doit pas entraver le droit des élèves d’étudier ou que leur examen se déroule dans des conditions optimales pour la réussite de tous. Nous appelons, en ce sens, à la responsabilité de chacun des professeurs surveillant les épreuves du baccalauréat et du Diplôme National du Brevet, pour que chaque centre d’examen puisse fonctionner normalement. Les élèves, les professeurs, les parents d’élèves et toute la communauté éducative œuvrent chaque jour pour la réussite des collégiens et lycéens. Il serait bien dommage d’abîmer tout ce travail sur cette dernière ligne droite», y défendaient conjointement les deux associations de parents et d’élèves, fin mai, se mettant à la disponibilité du Ministère de l’Éducation Nationale pour assurer le bon déroulement des épreuves. Une mise à disposition qui n’a pas été nécessaire, l’Education nationale ayant convoqué massivement les profs de lycée en réserve pour s’assurer de la surveillance des épreuves.  «Localement, les parents ont demandé aux enseignants ce qu’ils comptaient faire et ils n’étaient pas forcément partants pour bloquer les épreuves. Nous sommes confiants dans le fait que les enseignants ont bien compris que l’enjeu n’est pas d’empêcher les épreuves», indique Myriam Menez, présidente de la Peep 94.

La Fcpe, tout en soutenant la mobilisation contre la réforme Blanquer, a choisi de ne pas prendre position par rapport au mouvement du 17 juin. «Mais pour nous, la responsabilité en incombe totalement au ministre Jean-Michel Blanquer et nous lui demandons de faire en sorte que les épreuves se déroulent dans de bonnes conditions», indique Nageate Belahcen,  De son côté, le syndicat lycéen UNL (Union nationale lycéenne) s’est pour sa part clairement engagée en soutien au mouvement dans un communiqué intitulé A nos profs. «Ces épreuves, même si elles étaient annulées, nous pourrions les repasser. En revanche, cette occasion de bloquer Blanquer, jamais nous ne retrouverons une telle opportunité», motive le syndicat.

Quelles épreuves du bac ce lundi 17 juin ?

En terminale, les élèves passant un bac général passeront tous la philo de 8h à 12h. Les élèves de première, eux, s’attaqueront au Français l’après-midi.

Les députés de La République en Marche dans l’arène

De leur côté, les députés LREM, qui ont déjà pris position pour défendre la réforme Blanquer, ont décidé de l’expliquer à nouveau dans le cadre de deux réunions publiques prévues ce lundi soir, l’une avec  Albane Gaillot (11ème circo) et Cécile Rilhac, députée du Val-d’Oise et membre de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation, à Arcueil à 20 heures (Centre Marius Sidobre, 26 rue Émile Raspail), et l’autre avec Guillaume Gouffier-Cha (6ème circo) à Vincennes à 20 heures (à l’atelier législatif du député au 76, avenue de la République).

«Ce projet de loi a éveillé de nombreuses craintes, suscitées notamment par des informations infondées qui ont circulé dans les médias. Afin d’expliquer les véritables tenants et aboutissants de ce texte de loi fondamental pour l’avenir du pays, deux députés du Val-de-Marne viennent à la rencontre des habitants lundi 17 juin», motivent les députés pour qui  «la justice sociale, l’équité, l’innovation territoriale et l’élévation du niveau général sont au cœur du projet de loi pour une École de la confiance.» Et les élus de citer «l’instruction obligatoire à trois ans, la simplification de l’obtention des bourses au lycée, l’obligation de formation jusqu’à 18 ans, le renforcement de la formation initiale et continue des équipes pédagogiques, ou encore la création du conseil d’évaluation de l’école et le renforcement des contrôles dans les cas d’instruction à domicile.» «Les assistants d’éducation qui se destinent à une carrière d’enseignant.e collaboreront aux missions pédagogiques avec les professeurs pour une meilleure efficacité en classe. La loi s’accompagne également d’une refonte ambitieuse de l’inclusion des élèves en situation de handicap ainsi que du statut de leurs accompagnants», insistent les parlementaires.

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