Lancée mi-mai, la concertation à propos de l’extension de l’incinérateur de Créteil s’achève ce samedi. Hier, la dernière réunion publique, qui se tenait à Nogent-sur-Marne, a été animée, précédée d’une manifestation d’opposants au projet. Sur Internet, une petite vingtaine de contributions ont été déposées depuis la mi-mai.
Pour rappel, le centre d’incinération de Créteil, opéré par Suez, doit augmenter sa capacité de traitement de 244 500 tonnes par an à 365 000 tonnes par an. Cette augmentation de la capacité de traitement de 50% s’effectuera en transformant la ligne de traitement qui était réservée aux déchets médicaux (Dasri, déchets d’activité de soin à risque infectieux) par une ligne mixte qui traitera également des ordures ménagères (OM) et des déchets d’activité économique (DAE). L’augmentation de capacité passera par l’installation d’un troisième four. L’incinérateur, qui alimente déjà le réseau de chauffage urbain de Créteil, augmentera son apport. Le projet prévoit également une station hydrogène, l’installation d’un puits de carbone (déjà opérationnel) et des serres où pousseront des tomates. Le projet s’inscrit dans le cadre du renouvellement de la délégation de service public attribuée par le Smitduvm (Syndicat Mixte Intercommunal de Traitement des Déchets Urbains du Val-de-Marne) qui regroupe 19 communes* du département à la société Valo’Marne, essentiellement détenue par Suez alliée à une filiale d’EDF. L’investissement est estimé à 128 millions d’euros dont 21,8 millions d’euros pour améliorer le traitement des fumées et 3,8 millions d’euros pour augmenter la capacité de production du réseau de chaleur urbain.
Gérard, Parisien, se réjouit d’une usine qui «ne pollue quasiment pas ni l’air, ni l’eau», et se déclare prêt à venir habiter autour de Créteil. David plébiscite également cette solution plutôt que l’enfouissement, tout comme Bernard, de Maisons-Alfort, qui vit en Corse une partie de l’année et décrit les sites d’enfouissement arrivés à saturation sur l’île de beauté. Un autre Bernard se réjouit de goûter les fruits et légumes qui pousseront dans la serre prévue dans le projet. La majorité des autres commentaires Internet sont plus critiques. Créteil en transition apprécie l’objectif de réduction des niveaux de rejets polluants mais suggère de l’atteindre sans augmentation des capacités de traitement, préférant oeuvrer à une réduction des déchets. L’association s’inquiète par ailleurs du faible volume de CO2 capté par le puits de carbone, pour l’instant expérimental, et de la viabilité économique de la filière hydrogène-carburant dont les conductions de production ne sont pas sans risque. Dominique estime pour sa part le projet surdimensionné au vu des projections établies par l’Etat et la région, et qualifie la dimension écologique du projet de green washing. Didier Lévy, élu à Fontenay-sous-Bois et représentant de la ville au Smitduvm estime que le 3ème four n’est pas nécessaire car il ne servira pas aux habitants des villes du syndicat et rappelle qu’un des scénarios présentés par Suez pour renouveler sa délégation de service public proposait à la fois le traitement sec des fumées et une augmentation de l’énergie fournie au réseau de chaleur de Créteil pour une redevance identique, à savoir 65 € la tonne de déchets traités. Jonh, qui vient d’emménager à 500 mètres du site, dans le nouveau quartier Neo C, s’inquiète de rejets supplémentaires de fumée alors qu’il a un bébé en bas âge.
Ce jeudi soir à 20 heures, avant le début de la réunion, une trentaine d’opposants au projet, dont des associations comme l’Alic (Affamons l’incinérateur de Créteil) ou le collectif 3R, qui se bat contre la reconstruction de l’incinérateur d’Ivry-sur-Seine, ainsi que des militants EELV et LFI se sont rassemblés avec les banderoles, avant d’investir la réunion et interpeller les maîtres d’ouvrage du projet sur tous les points. «Ce projet est ligne avec le futur Projet régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD) qui manque d’ambition», dénonce Annie Lahmer, conseillère régionale EELV. «Quid des camions supplémentaires qui vont circuler? Champigny-sur-Marne est déjà suffisamment impacté par les chantiers du Grand Paris Express», alerte Jeannick Le Lagadec, conseillère départementale et maire adjointe LFI de Champigny. «Quelle est la proportion exacte de particules très fines dans les rejets?», demande un autre participant. Un autre encore questionne sur la consommation de gaz naturel. Sur la soixantaine de participants à la réunion, une majorité mitraille de questions critiques parfois pointues. En face, Grégory Richet, directeur général délégué Suez R&V Energie pour l’Ile-de-France et le Grand Est, tente de répondre point par point. «Concernant le PRPGD, nous respecterons la hiérarchie des normes», insiste-t-il. Sur la nature des fumées, le directeur rappelle que l’usine fait l’objet d’un contrôle permanent ainsi que d’un contrôle externe, y compris par des entreprises pouvant être mandatées par le préfet. La directrice de l’usine, Marie-Christine Viratelle, apporte pour sa part des précisions sur l’usage du gaz naturel, dans le cadre du traitement des fumées, des déchets hospitaliers, et de la remise en route après maintenance. Le directeur général des services du Grand Paris Sud Est Avenir, Fabien Tastet, assis dans le public, défend son côté le modèle économique du projet qui permet de réduire de le prix de la tonne de déchets, de disposer d’un outil industriel et de créer des emplois. Pas de quoi convaincre les opposants, mais de quoi débattre en plongeant dans les détails du projet.
La concertation publique s’achève ce samedi 15 juin.
Voir le site de la concertation
*Villes du Smitduvm
Paris Est Marne et Bois :
o Bry-sur-Marne
o Champigny-sur-Marne
o Fontenay-sous-Bois
o Le Perreux-sur-Marne
o Nogent-sur-Marne
o Saint-Maur-des-Fossés
o Villiers-sur-Marne
Grand Paris Sud Est Avenir :
o Alfortville
o Boissy-Saint-Léger
o Bonneuil-sur-Marne
o Chennevières-sur-Marne
o Créteil
o La-Queue-en-Brie
o Limeil-Brévannes
o Le Plessis-Trévise
o Noiseau
o Ormesson-sur-Marne
o Sucy-en-Brie
Grand Orly Seine Bièvre :
o Villeneuve-Saint-Georges
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