Santé | | 09/10/2019
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Créteil – l’avenir de l’hôpital Henri Mondor discuté au sommet de l’AP-HP

Créteil – l’avenir de l’hôpital Henri Mondor discuté au sommet de l’AP-HP

Une délégation de la coordination Mondor composée de représentants du personnel et de députés a été reçue le 2 octobre par les directions de l’AP-HP et de l’ARS Ile-de-France, dont Martin Hirsch et Aurélien Rousseau en personne. L’occasion de faire le point sur quelques sujets de préoccupation de l’hôpital, de la suppression des lits de gériatrie à l’avenir de la chirurgie cardiaque en passant par le devenir de l’hôpital dans la nouvelle organisation de l’AP-HP (Assistance publique des hôpitaux de Paris).

Voilà de longs mois que la situation est tendue sur plusieurs fronts entre les personnels de l’hôpital Henri Mondor et la direction de l’AP-HP. Organisée grâce à l’intervention de parlementaires du Val-de-Marne, cette rencontre permis de nouer un dialogue direct entre les directions franciliennes et les personnels de l’hôpital, en mettant en présence la coordination Mondor (qui associe notamment syndicats et élus), le directeur de l’AP-HP Martin Hirsch, celui de l’ARS (Agence régionale de santé) Ile-de-France Aurélien Rousseau, la directrice de Mondor Edith Benmansour, le direction de la délégation 94 de l’ARS Eric Véchard, ainsi que les députés Michel Herbillon (LR), Jean-François M’Baye (LREM) et Albane Gaillot (LREM). De quoi poser les problèmes – sans les résoudre à ce stade – et gagner un peu en visibilité immédiate. “On a pu débattre de tous les sujets durant deux heures”, reconnaît Fabien Cohen, porte-parole de la coordination Mondor, présent à la réunion.

Moratoire de fait sur la suppression des lits gériatriques à Limeil-Brévannes

Parmi les préoccupations immédiates : la suppression annoncée de 150 lits à l’hôpital gériatrique Émile-Roux de Limeil-Brévannes – qui fait partie du CHU Mondor – dans le cadre d’un plan de réduction de 30 % à 50 % des 2300 lits des unités de soins de longue durée de l’AP-HP d’ici à 2024. Pour l’institution, une partie de ces unités doit être remplacée par des Ehpad (Etablissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes). Pour les personnels de l’hôpital, cette proposition ne tient pas compte des besoins de prise en charge médicale spécifique des patients âgés accueillis à l’hôpital. “La diminution des lits de soins longue durée pèse directement sur les urgences”, pointe Fabien Cohen, rappelant que le PRS (Plan régional de santé) signé en novembre 2018 préconisait davantage de lits de soins longue durée. Ce transfert du médical au médico-social soulève aussi la question des places en Ehpad et du financement de ces établissements. Alors que ce projet de suppression de lits a provoqué une forte mobilisation des personnels, en plus de tous les fronts de colère au sein de l’AP-HP, et que les modalités opérationnelles sont encore loin d’être précisées, le sujet est suspendu de fait pour une période indéterminée. “La direction va nous faire des propositions de concertation sur l’évolution de la gériatrie à l’AP-HP”, indique le porte-parole de la coordination Mondor.

Sur le sujet, l’argument qui ne passe toujours pas est celui de la vétusté des lieux. “Depuis 27 ans, les responsables de la santé au plan régional comme de l’AP-HP ont maintenu « dans un état de vétusté insupportable » le bâtiment de SLD d’E.Roux au mépris des personnes âgées qui l’ont fréquenté. Sa rénovation devient l’argument aujourd’hui de la remise en cause de 150 lits SLD, devenus inutiles aujourd’hui, alors qu’ils étaient « indispensables » dans le Plan Régional Santé de l’ARS IDF fin 2018”, dénonce la coordination.

Lire aussi : Limeil-Brévannes : colère contre la suppression de 150 lits à Émile Roux (AP-HP)

Chirurgie cardiaque

Dix-huit mois après avoir perdu la greffe hépatique, la question de la chirurgie cardiaque est aussi été à l’ordre du jour, pour rappeler “la ligne rouge” après quelques inquiétudes indique Fabien Cohen. En 2011, l’hôpital avait failli perdre complètement son service de chirurgie cardiaque. A l’époque, l’Agence régionale de santé avait demandé à l’AP-HP de passer de 4 à 3 sites, motivant une prise en charge des patients impliquant moins d’opérations, la difficulté croissante de recruter des chirurgiens et encore la haute technicité des plateaux techniques relatifs à cette spécialité. S’en était suivie une très forte mobilisation des personnels mais aussi de tous les élus de gauche et de droite du département, à l’unisson pour défendre le service, dénonçant un choix qui sacrifiait à nouveau l’Est parisien au profit de la capitale et pointant l’impact d’une telle amputation sur le rayonnement du centre hospitalier et sa recherche universitaire.  Après deux ans de mobilisation, l’hôpital cristolien avait finalement obtenu gain de cause. “Nous avons rappelé qu’à l’époque, ce furent près de 100 000 signatures et l’intervention de tout un département pour que la chirurgie cardiaque reste à Mondor. Nous sommes prêts à renouveler, si nécessaire, une telle campagne”, prévient Fabien Cohen.

Si la question est venue au menu, c’est en raison d’une information ayant circulé à propos du départ de sept cardiologues. Lors de la réunion, il a aussi été question de la suspension momentanée de la greffe cardiaque. “La greffe a été suspendue en raison d’un nombre de décès plus élevé que la moyenne (5 sur 15 transplantations l’année dernière) nécessitant d’en comprendre les causes”, rapporte Albane Gaillot, présente lors de la réunion. “C’est nous qui avons décidé de suspendre les greffes pour prendre le temps de l’analyse, précise Emmanuel Teiger, chef du service cardiologie du CHU Mondor. Nous en avons conclu que les causes étaient essentiellement liées à des patients trop évolués dans la maladie et cela a été l’occasion de revoir complètement les procédures, ce qui vient de s’achever. La greffe a été suspendue en juin et devrait reprendre d’ici une semaine. Concernant les médecins, je n’ai pas eu connaissance de sept départs dans mon service. Une praticienne hospitalière est partie dans le privé mais elle a été remplacée. Sinon, il y a du turnover mais les postes sont bien pourvus”, poursuit le chef de service qui compte une soixantaine de médecins.

Hémorragie de médecins anesthésistes

Le médecin reconnaît en revanche l’hémorragie de médecins anesthésistes, phénomène commun à tous les sites de l’AP-HP en raison d’une forte tension sur le métier. “Depuis quelques années, 23 médecins anesthésistes sont partis, représentant près d’un tiers de l’effectif”, alerte sur le sujet Eric Tricot, délégué Sud Santé. “Les gens partent pour partir, pas forcément pour aller dans le privé. Il y a par exemple un médecin qui habitait à Créteil à côté de l’hôpital qui a préféré aller travailler à Ambroise Paré, beaucoup plus loin! Parce qu’au rythme de 11 gardes par mois, ils n’en peuvent plus”, poursuit le délégué syndical.

Greffe cardiaque

Concernant la greffe cardiaque, une étude serait en cours, selon plusieurs personnes présentes à la réunion, pour revoir son organisation à l’échelle de l’AP-HP. Or, Mondor n’est pas un gros centre pour les greffes de coeur, qui en réalise entre 15 et 20 par an contre 80-100 à la Pitié-Salpêtrière. Faut-il s’inquiéter ? “C’est plutôt l’ARS qui mène régulièrement des réflexions sur ce sujet. A l’échelle de l’AP-HP, il y a en revanche un groupe de travail sur la revalorisation de l’attractivité de la cardiologie interventionnelle, laquelle constitue déjà un axe très fort à Henri Mondor. Nous sommes au-dessus de la moyenne nationale des centres de greffe qui sont plutôt à 15 et je ne suis pas inquiet pour Mondor car il y a une grosse cohorte d’insuffisants cardiaques”, réagit Emmanuel Teiger.

Budget de l’AP-HP : la balle dans le camp du parlement qui vote le budget santé

Sur les questions de moyens financiers, la réunion a été l’occasion pour la direction même de l’AP-HP de renvoyer la question aux parlementaires, qui décident du budget de l’Etat. “Nous avons été étonnés de la manière dont les directeurs généraux de l’ARS et de l’AP-HP ont reporté les difficultés rencontrées à satisfaire des besoins légitimes par l’insuffisance du niveau de l’ONDAM (Objectif national des dépenses d’assurance maladie) devant les député.e.s qui nous accompagnés”, rapporte Fabien Cohen.

Quelle place pour Mondor dans la nouvelle AP-HP?

A moyen terme, un autre sujet de fond est celui du devenir de l’hôpital dans la nouvelle organisation de l’AP-HP qui a regroupé les différents hôpitaux en quatre groupes hospitalo-universitaires (Centre, Sorbonne, Nord, Paris Saclay). Seuls deux CHU n’ont pas encore trouvé leur place dans l’organigramme : Paris Seine-Saint-Denis et Henri Mondor. Le premier est toutefois “associé” à Paris Nord et le second à Saclay. “Nous aimerions bien savoir ce que recouvre le terme associé”, questionne Fabien Cohen, vigilant, rappelant le souhait du CHU de rester un hôpital de pointe, alors que le nouveau bâtiment RBI (Réanimations, bloc, interventionnel) sera inauguré en 2020. “La direction nous a parlé à plusieurs reprises d’axe géronto-chirurgical”, s’inquiète Eric Tricot pour qui une telle perspective réduirait le rayonnement de l’hôpital. “Pour l’heure, la place de Mondor dans le nouvel ensemble est toujours un peu dans la zone d’ombre, reconnaît le professeur Emmanuel Teiger. Plusieurs pistes sont en réflexion, sur demande de l’ARS, comme travailler avec le GHT (Groupement hospitalier de territoire) déjà constitué par le CHIC (Centre hospitalier intercommunal de Créteil) et le CHIV (Villeneuve-Saint-Georges), et/ou avec l’hôpital Bicêtre (ndlr qui fait partie du nouveau groupe Saclay) avec qui nous avons déjà des complémentarités et des coopérations.”

Etats généraux le 29 novembre

“L’important est de nous associer dans la réflexion”, insiste Fabien Cohen. En attendant, la coordination Mondor a d’ores et déjà lancé ses Etats généraux de l’hôpital et du médico-social dans le Sud de l’Ile de France, le 29 novembre à la Maison des Syndicats, à Créteil, avec le soutien du Conseil départemental du Val-de-Marne.

La grève des infirmiers de bloc se poursuit
Alors que les infirmiers de bloc opératoire (Ibode), en grève depuis le 3 octobre, ils viennent de décider d’inscrire le mouvement dans la durée en faisant grève une heure par jour pour tenir le coup. Une réunion s’est tenue avec les infirmiers anesthésistes pour faire grève et manifester ensemble le 15 octobre, dans le cadre de l’appel du collectif urgence. La sénatrice Laurence Cohen (PCF) a écrit sur le sujet des infirmiers de bloc à la directrice de l’hôpital Mondor, pour lui demander d’écouter leur demande, après avoir débloqué des postes aux urgences. “Je sais que la direction est consciente de cette situation et reconnait qu’il manque 7 IBODE et 6 cadres de santé. La situation est d’autant plus préoccupante que 21 postes de médecins anesthésistes ne sont pas pourvus au bloc. Ces problèmes ne sont pas propres à I’hôpital Henri Mondor et se retrouvent au contraire dans de nombreux établissements. (…) Aussi, je suis certaine que vous saurez examiner avec attention les requêtes des IBODE pour leur permettre d’exercer leur métier dans de bonnes conditions, et ce dans I’intérêt des patient.e.s.”, plaide la parlementaire.

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