Comment engager la transition écologique ? Mercredi 13 février, c’est devant un parterre d’une quarantaine d’entrepreneurs et représentants institutionnels que la question a été posée par le Codev du Val-de-Marne, à l’invitation de la CCI du Val-de-Marne, dans le cadre du Grand débat national.
Tous les voyants sont au rouge mais rien ne change. Face à l’inertie du dérèglement climatique et de l’épuisement des ressources, même les citoyens les plus impliqués semblent désabusés. «J’ai toujours eu des préoccupations écologiques. Dès les années 70, mon père a posé des panneaux solaires sur le toit de la maison. Aujourd’hui, je fais du compost, je trie, j’essaye d’être la plus vertueuse possible mais avec tout ce que je lis, j’ai l’impression que les petits pas dans la vie quotidienne ne sont pas suffisants et c’est assez décourageant», déplore Pascale, directrice d’une société d’enseignement à Maisons-Alfort. «C’est au plan national, voire international, qu’il faut intervenir auprès des entreprises. Il semble que notre système basé sur la croissance n’ait pas de limite et nous pousse à produire toujours plus, quel qu’en soit le prix», regrette de son côté l’architecte d’une collectivité locale. Pour un cadre d’EDF, c’est l’idée même de transition qui est à bannir. «Transition est un terme utilisé par les entreprises dans le cadre de la maîtrise du risque. Or, nous devons désormais gérer l’inévitable ! La catastrophe arrive et notre seul espoir est de l’atténuer un peu en opérant une révolution copernicienne.»
Engagements de l’Etat et objectifs clairs pour les entreprises
Passé ce sombre état des lieux, les participants avancent des solutions. «Il est capital que les gens continuent de consentir à faire des efforts même s’ils sont tout petits. Ce que je ne comprends pas, c’est que nous avons un arsenal de règlements et de lois pour encadrer nos pratiques et qu’ils ne sont pas appliqués», regrette Sylviane, auto-entrepreneuse enseignant le yoga. Un autre entrepreneur estime pour sa part que les Etats et les industriels sont capables de trouver des solutions pour adapter des pratiques plus vertueuses en citant l’exemple de l’élimination des chlorofluorocarbones présents notamment dans les aérosols, réfrigérateurs, emballages après la signature du protocole de Montréal en 1987. «Les industriels sont prêts à s’engager dès lors qu’ils ont des objectifs clairs à moyen terme. Les Etats peuvent mettre en place des mécanismes incitatifs, d’autres fois, il faut recouvrir à la voie réglementaire.»
Pour réduire les déchets, un étudiant propose le retour et la généralisation de la consigne. Un autre participant, en reconversion professionnelle après avoir travaillé dans une entreprise spécialisée dans les connecteurs électroniques, suggère d’imposer aux constructeurs de fournir des pièces de rechange jusqu’à dix ans après l’achat pour lutter contre l’obsolescence programmée. «Il existe aujourd’hui des clauses environnementales dans les commandes publiques mais les taux sont trop bas pour permettre aux entreprises dont c’est la préoccupation d’être concurrentielles. Il faudrait augmenter ces seuils», avance un entrepreneur spécialisé dans les déchets.
La mobilité en question
Alors que le mouvement des gilets jaunes a débuté suite à la hausse des taxes sur le carburant, la question de la mobilité s’impose dans le débat. «Pour les habitants des zones péri-urbaines, vivant à une trentaine de kilomètres des pôles d’activité, ces mesures de fiscalité écologique étaient stigmatisantes et difficile à appliquer. Pour un automobiliste réalisant 40 000 kilomètres par an, une augmentation de 50 centimes du litre de carburant correspondait à un mois de salaire en moins. En parallèle, ils n’avaient pas de moyens de transport alternatifs», rappelle Georges Mercadal, ancien vice-président de la CNDP (Commission nationale du débat public). Lui estime qu’il faudrait attendre l’émergence de nouvelles technologies et sources d’énergie pour inviter les habitants des territoires non maillés à des réseaux de transport collectifs performants à se déplacer autrement qu’avec leurs voitures. un responsable de la formation auto et poids lourds du CFI d’Orly réagit pour sa part en indiquant qu’il existe déjà des technologies pour rendre nos moyens de transport moins polluants et tout aussi efficaces. «Les camions aux normes d’émission Euro 6 sont si performants qu’ils dépolluent l’air ingéré par leurs filtres à particules d’admission du moteur. A l’heure actuelle, les poids lourds les plus récents polluent 5 à 6 fois moins que les automobiles en proportion de poids. D’ici une dizaine d’années, l’électrique, l’hydrogène et le solaire vont bouleverser l’industrie auto. Peut être même que nous verrons les premières voitures volantes», projette-t-il.
Une entreprise rembourse le forfait Navigo à 100%
Plusieurs participants soulignent le rôle déterminant joué par les entreprises. «Il est ahurissant de voir autant de véhicules de société en région parisienne. Je peux comprendre que des commerciaux qui se déplacent beaucoup en bénéficient mais cela concerne aussi des actifs qui n’en n’ont pas réellement besoin», pointe une créatrice d’entreprise qui propose le remboursement à 100% du pass Navigo à ses employés, «parce que le seuil fixé à 50% par la loi n’est pas suffisamment intéressant.» Depuis le 1er janvier 2018, la loi de transition énergétique impose également aux établissements de plus de 100 salariés d’adopter un plan de mobilité. “Nous accompagnons notamment Aéroport de Paris qui souhaite mettre en place une plateforme de covoiturage pour ses employés sur les zones d’Orly”, illustre Elisabeth Wallerand, conseillère de la CCI du Val-de-Marne.
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