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Société | | 19/02/2019
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Fontenay-sous-Bois : l’ex-directeur de l’Opfra (protection des réfugiés) raconte

Fontenay-sous-Bois : l’ex-directeur de l’Opfra (protection des réfugiés) raconte

Directeur de l’Ofpra (Office de protection français des réfugiés et apatrides), basé  à Fontenay-sous-Bois, de fin 2012 à fin 2018, Pascal Brice raconte dans un livre qui vient de sortir chez Fayard :«Sur le fil de l’asile», ses six années intenses durant lesquelles les conflits syriens, soudanais, la dictature érythréenne ou encore la situation en Afghanistan ont contribué à accroître le flux des réfugiés. 

Entré en fonction en décembre 2012, Pascal Brice a commencé par installer dans son bureau -derrière lui- la photo de ses grands parents réfugiés en Bolivie en 1940 pour fuir le nazisme, «afin qu’ils ne cessent jamais de m’accompagner – de me surveiller si nécessaire»,  confie l’ancien directeur en préambule. «Le droit d’asile, rien que le droit d’asile, tout le droit d’asile», telle est la ligne de crête qu’il s’impose en acceptant la mission confiée par Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, à l’aube de ses soixante ans. Une ligne difficile à tenir dans le contexte d’une politique migratoire nationale corsetée et d’une croissance de la demande. «Depuis les années 1970, en France et en Europe, la politique d’immigration n’a cessé de se durcir. L’asile et l’Ofra avec lui- en subit les conséquences. Il est resté l’une des rares portes encore ouvertes, si bien que de plus en plus de candidats à l’immigration – ceux que l’on va bientôt appeler les «migrants» – y tentent leur chance», confie l’ancien directeur à qui il revient d’assurer la distinction entre les deux. «L’accueil des étrangers qui ne correspondent pas au droit d’asile (…) relève d’autres indispensables débats et actions (…). C’est le registre de la politique migratoire. L’un n’est pas supérieur à l’autre. Mais ils sont distincts. Il n’est d’ailleurs écrit sur le front de personne : «réfugié» ou «migrant économique», insiste Pascal Brice.

Ces principes énoncés en prologue, le directeur plonge dans la réalité, celle de la «jungle» de Calais, où il veut inciter ceux qui relèvent du droit d’asile à déposer leur demande en France, sans pour autant rien pouvoir leur garantir, celle du quotidien de l’office basé à Fontenay , où 400 personnes racontent chaque jour leur histoire dramatique dans plus d’une centaines de langues différentes, celle des campements de fortune parisiens et leur démantèlement sous haute tension. L’occasion de dépeindre quelques parcours de vie, tous fracturés, de leur rendre leur singularité,  raconter leur épopée, les suivre dans le temps, eux et ceux qui les accompagnent. L’occasion aussi de témoigner de ces cases dans lesquelles ils ne peuvent pas toujours rentrer, pointant notamment la quadrature du cercle des accords de Dublin qui empêchent de déposer sa demande dans un autre pays que le premier dans où l’on a laissé ses initiales, lequel se trouve rarement être le plus éloigné des frontières de l’Europe.

La machine Opfra a aussi du mal à suivre, passée en 2007 de la tutelle du Quai d’Orsay à celle du ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale puis de l’Intérieur,  brouillant la distinction essentielle qui la caractérise. En 2012, elle ne délivre que 9% de réponses positives. «La juridiction qui statue sur les recours, la CNDA (Commission nationale du droit d’asile), protège plus l’office», se souvient Pascal Brice. L’office, débordé, peine à instruire les dossiers en moins de neuf mois, avant même la crise de 2015.

Parmi ses premiers chantiers, l’ex-directeur de l’Ofpra décide de modéliser les profils de demandeurs d’asile pour harmoniser le traitement, avec des groupes de référents pour chaque pays d’origine ou motif spécifique. Des rencontres sont également organisées avec les associations d’aide (le Nid, le bis de femmes, le Comede, le centre Primo Levi, France terre d’asile…). L’office obtient aussi des moyens, qui passe de 470 à 840 agents, de quoi lui permettre de doubler les demandes traitées, passant de 60 000 en 2012 à 120 000 en 2018. Le taux de réponses positives augmente aussi, passant de 9% à 30%. A ce taux, s’ajoute ensuite 10% obtenus via le recours à la CNDA.

Pascal Brice n’a pas été renouvelé pour un troisième mandat en 2019 mais aucun nouveau directeur ou nouvelle directrice n’a encore été nommé à ce jour.

Ecouter aussi l’entretien avec Pascal Brice, dans la matinale France Inter de ce samedi 17 février. L’ancien directeur y dénonce toute tentative d’externalisation de la politique d’asile européenne à des pays tiers.

Infos pratiques
«Sur le fil de l’asile» Pascal Brice
Editions Fayard, 19 euros en version imprimée

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