Identifier les sols pollués du département, imposer leur «porter à connaissance» dans les documents d’urbanisme et prévenir les propriétaires et usagers des servitudes imposées par ces pollutions, tel est l’enjeu des secteurs d’information sur les sols (SIS). Dans le Val-de-Marne, 37 secteurs dans 16 communes font l’objet d’une concertation publique depuis le 5 avril jusqu’au 5 juin 2019. Détails, explications, enjeux.
Stations service, traitement de surface, récupération de métaux, fonderie, laboratoire, fabrique de lunettes, de cadrans luminescents, usine d’extraction de radium, cristallerie… Autant d’activités passées qui ont laissé des traces dans les sols mais aussi dans les nappes d’eau souterraines. Majoritairement, les pollutions identifiées dans les 37 secteurs du Val-de-Marne soumis à concertation publique concernent des hydrocarbures, des métaux lourds, des solvants chlorés, des Btex (Benzène, Toluène, Éthylbenzène et Xylènes) ou encore des PCB (polychlorobiphényles). Seuls trois sites sont concernés par une pollution radiologique. La plupart d’entre ont été traités en excavant parfois des milliers de tonnes de terre polluée, en procédant au venting (technique qui consiste à insuffler de l’air d’un côté pour le récupérer chargé des composants volatiles pollués de l’autre) et en ajoutant éventuellement une dalle de béton ainsi qu’une aération. Il reste en revanche souvent des pollutions résiduelles, considérées sans risque au regard des normes en vigueur pour l’usage retenu. Plusieurs sites font toutefois l’objet de restrictions d’usage comme par exemple l’interdiction de jardiner des comestibles ou de creuser le sol, ou encore l’obligation de conserver un usage industriel.
Si la majorité sont occupés, reconvertis en habitations, groupes scolaires, collège, programmes de logements ou entreprises, quelques uns sont encore en friche avec d’importants projets en suspens. La dépollution des sols peut en effet se chiffrer en millions d’euros et constitue un enjeu non négligeable dans les projets urbains, d’où la nécessité d’identifier immédiatement les problèmes et de ne pas les découvrir une fois la parcelle achetée. Les obligations de surveillance, notamment des eaux souterraines, constituent également une contrainte. En plongeant dans le détail des dossiers liés à chaque SIS, il n’est ainsi pas rare de trouver des remises en question de l’obligation de dépolluer ou de poursuivre une surveillance qui se terminent au tribunal administratif. Des contentieux qui laissent augurer des montants en jeu. D’autres conflits juridiques opposent les anciens propriétaires aux nouveaux, lorsque les informations sur la pollution ont été considérées comme erronées.
Au total, une centaine de sites devraient faire l’objet de SIS dans le département. Une dizaine ont déjà été identifiés l’année dernière lors d’une première vague. Lire à ce sujet : Des secteurs pollués bientôt annexés au PLU
Les SIS ne concernent pas les installations classées actuelles, qui font l’objet d’une surveillance particulière. Pour se repérer dans les enjeux liés à la pollution des sols et avoir un bref aperçu des dispositifs de repérage des sites concernés dans le département, au-delà des SIS, comme par exemple les bases de données Basias, Basol, installations classées…, lire également : Clefs pour comprendre la pollution des sols en Val-de-Marne.
Collège La Cerisaie à Charenton et groupe Pasteur à Villejuif
Parmi les 37 nouveaux SIS, deux concernent des établissements scolaires qui font partie des 107 établissements du Val-de-Marne recevant du jeune public situés sur d’anciens sites industriels identifiés comme tels. Ces 107 établissements devaient faire l’objet d’un diagnostic systématique dans le cadre du plan national Santé environnement 2009-2013 mais seulement 13 ont été effectués (voir article) et 94 sont restés en suspens (voir article). Les deux établissements dont il est question dans les SIS 2019, le collège La Cerisaie à Charenton-le-Pont, et le groupe Pasteur à Villejuif, font partie des 94 qui avaient été laissés en suspens.
Concernant le groupe scolaire Pasteur de Villejuif, le cabinet du maire, sollicité par la rédaction, indique que des campagnes de mesure de la qualité de l’air ont été effectuées au mois d’août et cet hiver, du 31 décembre au 4 janvier, qui ont pu constater que les niveaux de pollution résiduelle étaient inférieures, en moyenne cinq fois inférieures, aux premiers seuils de gestion de l’OEHHA (Office of Environmental Health Hazard Assessment). Un diagnostic que la mairie indique être attesté par un rapport du laboratoire central de la préfecture de police de Paris, en date du 14 février 2019.
Du côté du collège La Cerisaie à Cachan, le Conseil départemental du Val-de-Marne, en charge des collèges, fait également état de seuils inférieurs aux seuils de gestion et indique par ailleurs avoir programmé des mesures systématiques, annuelles, dans les crèches et les collèges, suite à la découverte de pollution au collège Saint Exupéry de Vincennes, afin d’appliquer un strict principe de précaution. Pour mémoire, une pollution aux solvants chlorés (liée à la présence d’une manufacture d’oeillets métalliques par le passé) y avait été identifiée par le département à l’occasion de travaux de réfection, fin 2017, et conduit à la fermeture de l’établissement. Voir tous nos articles à ce sujet. A noter que le collège ne figurait, pas, lui parmi les établissements à diagnostiquer, n’étant pas répertorié dans la base des anciens sites industriels. Depuis, la question du financement de la dépollution du collège n’est toujours pas réglée.
Ecole Marie Curie : vers la fin de la dépollution
Parmi les 37 SIS en projet, le cas de l’ex-école maternelle et élémentaire Marie Curie de Nogent-sur-Marne, construite à la fin des années 1960 en place de l’ancienne usine d’extraction de radium, de thorium et d’uranium utilisée par les époux Curie, constitue l’exemple le plus emblématique du non principe de précaution qui prévalait à l’époque. Dans les années 1990, il fallut que les parents d’élèves commencent par réaliser eux-mêmes des mesures en catimini pour prouver le niveau de contamination. «Nous avons été au sous-sol pour prendre des mesures, sans autorisation, avec un compteur Geiger, et j’allais la nuit escalader la grille pour récupérer de la terre afin de l’envoyer à la Crirad», se souvient encore Annie Lahmer, aujourd’hui conseillère régionale EELV. Finalement, c’est Ségolène Royal, à l’époque ministre déléguée à l’Enseignement scolaire, qui fera fermer l’école en 1998. Depuis, une partie du site a été dépollué suffisamment pour faire un parking, moyennant 3 millions d’euros. Un coût important lié à la nécessité de traiter par enfouissement profond les points les plus chauds où étaient stockés les minerais à même le sol. Reste une parcelle à traiter. «Il n’y a plus de points chauds sur cette parcelle et sa dépollution pour réaliser un parking qui accueillera le cas échéant des barnums le temps d’un événement en plein air est budgétée à 1,5 million d’euros. Nous ne l’avons pas encore inscrit au budget car nous avions des investissements prioritaires, notamment l’achèvement du stadium Christian Maudry, mais nous envisageons de le programmer sur 2020-2021», explique le maire de la ville, Jacques J-P Martin.
Détail des 37 SIS et modalités de concertation publique
Télécharger la présentation PDF des 37 SIS mise en ligne par la Driee (Direction régionale interdépartementale de l’environnement et de l’énergie).
Télécharger la plaquette d’information générale sur les SIS
Site Internet dédié pour recueillir les avis du public
Tableau réalisé à partir des données de la présentation de la Driee, pour avoir une vue d’ensemble. Des liens vers des fiches plus détaillées sont disponibles sur la présentation PDF, qui rendent compte de l’historique de chaque dossier.
Bizarre ne figure 0as cette liste les anciens laboratoire de CEA de Limeil-Brevannes
Cette concertation concerne la 2ème vague de projets de SIS. Au total, il en est prévu 3. Par ailleurs, ne sont pas indiquées les installations classées qui sont déjà répertoriées autrement.
Une concertation à ne pas négliger !
A Joinville-le-Pont, le projet de PLU révisé dont l’enquête publique s’est achevée fin mars avait opportunément “oublié” de mentionner dans l’inventaire des sites pollués l’ancienne friche dite “Essilor”, boulevard du Maréchal Leclerc ! Une école y a ouvert en janvier 2019 ; les gens commencent à emménager dans les appartements de la résidence construite par Cogedim. Malgré une double dépollution (car les écologistes ont fait intervenir l’Ineris) subsiste une faible pollution résiduelle, notamment au trichloroétylène. Il faut conserver la mémoire de ce site, et non l’effacer, comme certains le voudraient tant.
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