Le Conseil de Paris a voté mi-novembre l’organisation d’une conférence citoyenne pour plancher sur un revenu minimum universel dans la capitale.
A l’origine de ce projet, le triple constat d’un nombre de pauvres qui ne diminue pas, d’une grande complexité des aides existantes et d’un taux non négligeable de non-recours à ces aides. La capitale veut désormais se donner le temps de plancher sur le sujet avec les habitants.
Un nombre de pauvres qui ne diminue pas
“En 2018, le taux de pauvreté est de 14,7%, soit une hausse de 0,6 point selon les données provisoires publiées par l’Insee”, pose la ville de Paris dans l’exposé des motifs de la délibération actant l’organisation de cette conférence citoyenne.
Pallier le non-recours en droit
“Ainsi, selon l’Observatoire des non-recours aux droits et services (ODENORE), plus de 5 milliards d’euros de Revenu de solidarité active (RSA) ne sont pas versés à des personnes qui devraient en bénéficier chaque année. Récemment, une étude montre qu’à 70 ans, un tiers
des assuré·es n’a pas fait valoir tous leurs droits à la retraite (sources DREES septembre 2019). La question de l’automaticité de l’Aide Sociale est donc centrale : elle modifie profondément le rapport à la démarche d’accès aux droits”, note ainsi la ville de Paris.
Un bouquet complexe de dispositifs
Une des raisons de ce non-recours à ses droits : la multiplicité des dispositifs qui se formalise par un dédale d’aides. Rien qu’au niveau de la ville de Paris, ce-sont ainsi 33 aides extra légales que propose le Centre d’action sociale de la ville de Paris (CASVP). “L’ensemble de ces dispositifs mis bout à bout apportent des réponses mais les résultats sont imparfaits et disparates. Nous avons besoin d’un dispositif global, qui permette aux Parisien·nes de se retrouver sur un seul et même pied d’égalité, afin de leur garantir de
pouvoir vivre décemment à Paris”, indique la commune.
Les enseignements de l’expérience finlandaise
A ce jour, l’expérience la plus aboutie à laquelle la capitale fait référence est celle menée en Finlande sur 2000 personnes de 25 à 58 ans de 2017 à 2019, moyennant un investissement de 20 millions d’euros. Les premières conclusions font principalement état d’une meilleure confiance en soi et envers les institutions et la société ainsi qu’une meilleure concentration et capacité à se projeter dans de nouveaux projets, notamment entrepreneuriaux ou artistiques.
En France, Grande Synthe montre la voie
En France, la ville de Grande-Synthe (23 500 habitants dont 33% vivent en-dessous du seuil de pauvreté et 28% sont au chômage) a mis en place minimum social garanti de via son CCAS (Centre communal d’action sociale). Ce MSG vient en complément des aides existantes. Calculé sur l’ensemble des revenus des habitants composant le ménage, il s’appuie sur un ou plusieurs accompagnements individualisés basés sur un contrat signé pour flécher les dépenses en fonction de priorités définies. Ce MSG concerne 1 550 foyers pour un coût de 2,26 millions d’euros par an.
18 départements (Alpes-de-Haute-Provence, Ardèche, Ariège, Aude, Dordogne, Finistère, Haute-Garonne, Gers, Gironde, Hérault, Ille-et-Vilaine, Landes, Loire-Atlantique, Lot, Lot-et-Garonne, Meurthe-et-Moselle, Nièvre et Seine-Saint-Denis) ont également planché sur la question et ont fait déposer une proposition de loi visant à permettre cette expérimentation au niveau territorial mais celle-ci a été retoquée par le parlement en janvier.
L’association Mon revenu de base teste de son côté le dispositif auprès de 6 personnes tirées au sort suite à un financement participatif.
A Paris, une conférence citoyenne pour défricher le sujet
A Paris, qui comprend plus de 2 millions d’habitants, un tel projet constituerait en soi une expérimentation massive. D’où l’urgence de prendre le temps de la réfléchir avant, même si le principe pourrait être dans un premier temps limité à un échantillon de population. “La mise en place d’un RU (revenu universel) impliquerait un grand nombre de mutations et un investissement financier de la part de la ville de Paris”, reconnaît la ville.
C’est dans ce contexte que le Conseil de Paris a voté mi-novembre le lancement d’une conférence citoyenne à l’horizon 2020 pour envisager le dispositif avec les habitants. “Différentes études montrent que la question du RU soulève un grand intérêt. C’est pourquoi il nous semble essentiel d’associer les Parisien.nes à penser la faisabilité d’une telle mesure. L’organisation d’une conférence citoyenne qui répondra à la question « comment créer un nouveau dispositif qui s’apparenterait à un revenu universel à Paris ? » est l’outil qui permettra d’associer les Parisien·nes à ce changement de paradigme sur la question du travail”, motive la ville. Concrètement, les conférences de citoyennes sont des procédures relevant de la démocratie participative en s’appuyant sur une méthodologie précise en plusieurs étapes y compris celle de la formation des participants pour pouvoir traiter le sujet dans sa complexité.
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