C’est une première en France. A partir du 14 février, le CHIC (Centre hospitalier intercommunal de Créteil) accueillera un centre de téléconsultation complémentaire à ses activités, qui sera optionnel pour les patients, en partenariat avec le groupe Livi. Une expérience pilote que la rareté des médecins généralistes de ville pourrait multiplier si les patients y trouvent leur compte. Explications avec Stéphane Pardoux, directeur du CHIC, et Maxime Cauterman, directeur médical France de Livi.
Depuis le 15 septembre 2018, la consultation à distance de médecins généralistes est remboursée par l’Assurance maladie dans le cadre d’un suivi entre le médecin traitant et le patient ou en cas de délai trop important pour avoir un rendez-vous avec son médecin, voire lorsque le patient n’a pas de médecin traitant. Voir le détail des conditions sur Améli. Enjeu majeur de cette mesure : la désertification médicale qui entraîne une augmentation des visites aux urgences avec des conséquences parfois dramatiques comme l’a illustré récemment l’actualité à l’hôpital Lariboisière. “L’augmentation des consultations adultes a encore augmenté de 5% cette année et ceci est directement lié à l’affaiblissement de la médecine de ville. Le Sami nous dit la même chose. Cette année, nous avons ajouté douze postes supplémentaires (6 aides-soignants et 6 infirmiers) mais nous ne pouvons pas le faire chaque année“, témoigne Stéphane Pardoux, directeur du CHIC. En 2018, plus de 100 000 personnes sont venues aux urgences du CHIC.
C’est dans ce contexte que l’hôpital a accepté de tester l’ouverture d’un centre de téléconsultation suite à une sollicitation du groupe Livi, une société suédoise créée en 2015 et installée en France depuis 2017, qui propose déjà ses services directement aux patients via une application mobile. Elle s’appuie pour cela sur des médecins généralistes inscrits à l’Ordre des médecins. “Nous travaillons actuellement avec une trentaine de médecins un peu partout en France, y compris dans le Val-de-Marne. Tous sont également obligés d’avoir une activité présentielle. Cette activité leur permet de travailler aussi de chez eux. L’objectif est d’augmenter le temps médical disponible“, explique Maxime Cauterman, directeur médical France de Livi, par ailleurs praticien au CHIC. Les médecins télé-consultants peuvent échanger entre eux via une messagerie instantanée sécurisée.
Comment ça marche ?
Concrètement, le centre de téléconsultation va être installé dans un bâtiment situé à l’entrée de l’hôpital, au 40 avenue de Verdun à Créteil. Il ne sera donc pas situé dans les urgences mais accessible directement depuis la rue. Des infirmières seront présentes dans le centre pour accueillir les patients et celui-ci sera équipé pour pouvoir prendre les constantes des patients (pouls, tension, température) mais aussi en bandelettes urinaires pour détecter une infection urinaire ou en streptotests pour identifier l’origine bactérienne ou virale d’une angine et savoir s’il faut ou non prescrire des antibiotiques. En parallèle de cette présence infirmière, des médecins seront à disposition, à distance. Des patients pourront aussi être conduits à retourner aux urgences à l’issue de cette téléconsultation. “Nous avons travaillé en amont avec les urgentistes pour définir les critères préalables pour inciter à se rendre au centre de téléconsultation. Des panneaux seront installés dans la salle d’attente pour expliquer dans quelles conditions ils peuvent préférer aller au centre de téléconsultation plutôt que d’attendre aux urgences. Mais cela repose entièrement sur le choix du patient et les personnes qui ont attendu pour voir un médecin ne se verront pas renvoyées au centre de téléconsultation. Pour nous, il s’agit d’un test”, explique Stéphane Pardoux. D’un côté, il n’est pas sûr que les personnes qui ont pris la peine de se déplacer jusqu’aux urgences renoncent à voir un médecin. De l’autre, les heures d’attente aux urgences, d’autant plus longues que l’on ne présente pas des symptômes critiques, peut encourager des patients qui ne souhaitent pas passer leur journée à l’hôpital à se rendre au centre. “Nous ne nous sommes pas fixé d’objectif ni de temps d’expérimentation. Nous allons observer comment cela se passe“, reprend le directeur. Concernant l’enregistrement de la prise en charge par la sécurité sociale, il pourra se faire directement comme dans une consultation classique, à partir du numéro de la carte vitale.
Un modèle hybride pour pallier les déserts médicaux et soulager les médecins pris d’assaut
“Pour nous, il s’agit d’un premier partenariat, pilote. Sa vocation est de contribuer au désengorgement des urgences et des Sami. Nous pensons que ce modèle hybride peut aussi être une solution pour les déserts médicaux et allons aussi l’expérimenter dans l’Ouest de la France. La majorité des personnes qui viennent taper à notre porte aujourd’hui sont les élus locaux qui cherchent des réponses pragmatiques à la pénurie de médecins dans leur commune. Nous avons aussi des collègues qui viennent nous voir car ils sont dépassés par l’afflux de patients et ont besoin d’aide“, motive Maxime Cauterman.
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