Depuis la rentrée scolaire, huit classes de CE2 d’écoles de Chennevières-sur-Marne et Champigny-sur-Marne, situées dans le quartier du Bois l’Abbé, bénéficient d’un programme original pour prendre de bonnes habitudes alimentaires et d’hygiène de vie. Une initiative portée par des animateurs et associations des deux villes dans le cadre d’un appel à projets de l’Agence régionale de santé (ARS), et évaluée en temps réel par des universitaires.
«J’adore le taekwondo!» lance Sarah. Depuis la rentrée scolaire, elle fait partie des 250 élèves de CE2 du quartier à suivre régulièrement un atelier d’initiation au sport et un autre dédié à la nutrition. «On apprend à manger équilibré, explique-t-elle. J’ai pris l’habitude de manger des yaourts.» Imane, elle s’applique à manger cinq fruits et légumes par jour. «Moi, maintenant, j’adores les légumes!» lance aussi Mélissa. Et le soda ? «Ah non ! On n’en prend pas! »répondent les élèves en chœur. «Moi, si. Je n’ai pas changé mes habitudes», se distingue Lorenzo.
Ce vendredi après-midi, les huit classes de CE2 se sont retrouvées au gymnase Léo Lagrange pour fêter officiellement ce programme avec les élus locaux et représentants de l’ARS à l’occasion de démonstrations sportives suivies d’un goûter de brochettes ananas-kiwi et gâteau de riz préparé par l’école voisine Cuisine mode d’emploi (s), une association qui forme des demandeurs d’emploi aux métiers de la restauration.
L’objectif de ce projet : prévenir le surpoids qui constitue un véritable enjeu de santé publique en raison de son augmentation dans la population et des pathologies qui en découlent (diabète, maladies cardiovasculaires…). En travaillant sur ses deux causes : le manque d’activité physique et l’alimentation déséquilibrée, trop grasse et trop sucrée. Alors que la prévalence de l’obésité est plus importante dans les quartiers socialement défavorisés, le choix a été fait d’ancrer l’expérience dans un quartier politique de la ville, ce qui est le cas du Bois l’Abbé. Au-delà des enfants, cette sensibilisation vise aussi à influer sur les habitudes des familles, y compris des adultes, en laissant aux enfants jouer les prescripteurs ainsi qu’en organisant des ateliers avec les familles. «Ces ateliers sont notamment destinés aux familles d’enfants qui ont été repérés comme étant déjà en surpoids. Ces derniers bénéficient aussi d’ateliers plus spécialisés, éventuellement accompagnés d’une prise en charge médicale», explique Matthieu Boussarie, médecin spécialisé en santé publique et médecine sociale, délégué départemental adjoint de l’ARS (Agences régionale de santé).
Initié par l’ARS dans le cadre de son PRS2, Projet régional de santé, le dispositif illustre une nouvelle manière de travailler de l’agence consistant à s’appuyer sur des coopératives d’acteurs locaux. «L’ARS finance mais est aussi partie prenante avec un chef de projet qui participe à toutes les réunions de pilotage», explique Matthieu Boussarie. Dans le cas présent, sont ainsi impliquées les deux communes qui se partagent le quartier du Bois l’Abbé, Champigny et Chennevières, lesquelles interviennent via les animateurs des ateliers. Sont aussi parties prenantes des associations d’entraide sociale locales, Rayon de soleil et Femmes relais, qui font le lien entre les acteurs et les familles. Deux universités sont par ailleurs partenaires, Paris VI Sorbonne et l’Université de Créteil (Upec) pour mesurer l’impact concret sur les enfants et aussi pour évaluer l’organisation interne du projet. Pour Camille Noël, qui prépare son doctorat après neuf années d’étude de médecine, cette expérience est même l’objet de sa thèse. «J’évalue les enfants avant et après, en comparant un groupe témoin ayant un poids considéré comme normal et un autre présentant un surpoids. Je mesure à la fois l’évolution de l’indice de masse corporelle* mais aussi des indicateurs d’ordre médico-social comme l’estime de soi ou la représentation qu’ils se font de leur corps», explique la jeune médecin.
Reste désormais à pérenniser l’initiative dans le temps et la déployer plus largement. Concernant les 8 classes concernées au Bois l’Abbé, l’opération, initiée en 2017 pour un déroulement durant cette année scolaire, a coûté 40 000 euros.
La visite des directeurs régional et départemental de l’ARS dans le quartier du Bois l’Abbé s’est prolongée dans deux centres municipaux de santé de Champigny, occasion pour le maire, Christian Fautré, qui projette d’ouvrir trois cabinets médicaux, de demander à l’ARS la possibilité d’étendre les aides à l’installation en quartier politique de la ville aux quartiers limitrophes, ce qui sera le cas des trois futurs centres dont le premier est prévu du côté de la fourchette de Joinville d’ici à la fin de l’année. Un enjeu majeur pour la ville qui a vu sa démographie médicale diminuer de moitié ces dernières années.
* L’IMC se calcule en divisant son poids (en kg) par le carré de sa taille (m). Un IMC normal se situe entre 18,5 et 25.
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