Un litige financier de quelques milliers d’euros, un sentiment d’humiliation, la panique d’être pris, un pétage de plomb, de la pure haine ? Qu’est-ce qui a provoqué l’explosion de violence de Guy envers Pierrette, âgée de 83 ans, ce jour de janvier 2016 ? Voilà l’un des enjeux du procès aux assises qui se tient au tribunal de Créteil jusqu’à ce vendredi. Mardi, des premiers éléments ont permis de situer le contexte.
Dès sa première phrase, l’homme qui se tient dans le box des accusés reconnait le meurtre de l’octogénaire : « Je m’appelle Guy …, j’ai 55 ans, et je reconnais le meurtre de Pierrette ». Les épaules basses, les cheveux gris mi-longs, il porte un pull délavé et répond d’une voix chevrotante. Incarcéré à Fresnes depuis le 14 janvier 2016, il est décrit comme un détenu modèle, au comportement « calme et respectueux » envers les prisonniers et le personnel.
Le 7 janvier 2016, les pompiers entrent dans la maison de Pierrette, rue Carnot, à Nogent-sur-Marne, un quartier résidentiel qui a conservé une ambiance village et dans lequel la vieille dame de 83 est très impliquée. Un voisin les a appelés, inquiet de voir ses volets fermés depuis plusieurs jours, d’autant « qu’elle le prévient toujours lorsqu’elle s’absente ».
Sur place, la découverte est macabre. Le corps de la victime gît au sous-sol, recouvert d’une épaisse poudre de ciment, d’une bâche et d’un parpaing. Très vite, les enquêteurs s’intéressent à Guy. Dès les premières constatations, le voisinage a décrit aux enquêteurs les relations tendues que ce dernier entretenait avec l’habitante. Interpellé cinq jours après les faits, il reconnaît immédiatement le meurtre.
« Il se sent rabaissé par les autres »
Depuis 2013, Guy effectue de menus travaux chez des voisins, dont Pierrette, pour arrondir ses fins de mois. Licencié en 2012 pour faute, il ne touche plus d’allocations chômage et ne bénéficie pas du RSA.
Selon l’enquêtrice de personnalité mandatée pour en savoir plus sur lui, « il se sent rabaissé par les autres, de par son niveau scolaire, inférieur à celui du milieu qu’il fréquente, et de sa situation professionnelle ». La perte de son travail semble avoir renforcé son sentiment d’infériorité. Son ex-compagne, qui le décrit comme « un homme qui rend service, toujours là pour les autres », affirme qu’« à partir de 2015 il était devenu aigri, il vivait mal sa dépendance financière ».
Entre lui et Pierrette, la relation s’est dégradée pour des raisons financières. D’abord, Pierrette lui a prêté 2000€, « pour ouvrir un restaurant », que Guy met du temps à rembourser. Le jour du meurtre toutefois, il ne lui reste plus que quelques centaines d’euros pour s’acquitter de sa dette. Mais d’autres enjeux ont envenimé leur relation. Pierrette a aussi demandé à Guy de réaliser des travaux, comme elle l’a déjà fait par le passé, mais cette fois, elle n’est pas satisfaite de l’isolation qu’il a effectuée dans son sous-sol, moyennant 2000€. Plusieurs altercations, physiques ou verbales, les ont opposés sur le sujet. Très agacée, Pierrette l’a traité de « voleur » à plusieurs reprises dans la rue et giflé deux fois en public.
Explosion de violence
C’est dans ce contexte déjà tendu que le 5 janvier 2016, Guy se rend chez sa voisine pour fixer une poignée de porte. La vielle dame souhaite en profiter pour discuter avec lui des malfaçons de ses travaux. Mais le ton monte et selon le meurtrier, ils se querellent à tel point qu’elle finit par le gifler. Selon ses dires, il réplique et c’est ce coup qui fait tomber Pierrette qui dévale la quinzaine de marches qui mène à la cave. S’il nie l’avoir poussé intentionnellement, il admet ne pas avoir tenté de la rattraper. La chute brise le poignet de la vielle dame, qui, selon Guy, est à ce moment là toujours bien vivante, et menace cette fois de le dénoncer à la police. C’est à ce moment que Guy pète littéralement les plombs. Au lieu d’appeler immédiatement les pompiers pour secourir Pierrette, il saisit alors un parpaing rectangulaire de 29 kilos et le jette sur la tête de l’octogénaire. Il déclarera aux enquêteurs avoir éprouvé« une colère jamais ressentie auparavant » et explique aussi avoir paniqué à l’idée d’être dénoncé.
Guy se saisit ensuite d’un sac de mortier et vide son contenu sur le visage de sa victime jusqu’à la recouvrir d’une épaisse poudre blanche, « pour ne plus la voir ». Il replacera ensuite le parpaing sur sa tête. S’il nie toute préméditation -cette charge n’a d’ailleurs pas été retenue contre lui – il confirme qu’il avait l’intention de tuer lorsqu’il a lâché le parpaing. On imagine mal qu’il put en être autrement…
Après le meurtre, le vol
Après l’avoir tuée, Guy garde suffisamment de sang froid et de suite dans les idées pour remonter à l’étage voler le chéquier de la victime. Il affirme que l’idée de voler Pierrette ne lui est venu qu’après le meurtre. « Je n’ai pas eu le temps de réfléchir à ce que je faisais », témoigne-t-il.Pourtant, il avait déclaré aux policiers être resté « entre 45 minutes et une heure sur place ».
En falsifiant sa signature, il rédige deux chèques, l’un de 6000€ et l’autre de 1500€. En interrogatoire, il déclarera aux enquêteurs « avoir libellé les chèques pour maman, qui en avait vraiment besoin ». Pourtant il a une procuration sur le compte de sa mère, et, le lendemain, c’est bien lui qui utilise cet argent pour faire les soldes.
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