Etaient-ils 75 000 selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, ou 350 000 selon ceux de la CGT. Quoi qu’il en soit, la manifestation République-Nation de ce 17 décembre a connu sa plus forte affluence depuis le début du mouvement contre la réforme des retraites.
“J’entame ma quatrième journée de grève, commente Nathalie, professeure d’italien venue avec ses deux enfants. L’école fermait aujourd’hui alors je suis venue avec mes filles. Je veux leur montrer qu’il faut savoir protester contre les injustices car c’est une réforme injuste. La démission de Delevoye est une bonne nouvelle, porteuse d’espoir ; elle montre un des premiers craquèlements d’une réforme contestable. Ce-sont les profs les grands perdants de l’histoire alors que nous sommes quand même chargés de former les générations futures.”
“C’est le ciel qui pisse sur la réforme ! “scande justement la jeunesse alors que s’annoncent quelques gouttes de pluie. Parmi eux, Joanna, qui démarre une carrière d’enseignante en lettres modernes. “Je ne veux pas d’une retraite à 1000€ après avoir cotisé toute ma vie. Et je ne suis pas là uniquement pour défendre les intérêts de ma profession, je soutiens les grévistes de la RATP et de la SNCF parce qu’il faut être solidaire les uns des autres.” Un soutien qui s’exprime quelques instants plus tard par l’applaudissement des représentants de la RATP qui essayaient de rattraper le peloton de tête.
Alors que la SNCF entame son 13ème jour de grève. Guillaume, conducteur de train, demande le retrait complet de la réforme, condition sine qua non à la trêve hivernale. “Je ne comprends pas tout à fait qu’une partie de l’opinion veuille nous retirer notre régime spécial, étant donné qu’il ne comporte déjà quasiment plus d’avantages avec la privatisation. Aujourd’hui, ce statut ne représente plus rien. Il n’y aura pas de trêve hivernale, ni rien de ce genre. Et même si on sait que ça ne plait pas à tout le monde, que c’est les fêtes de fin d’année et que nous privons soit disant les familles de se retrouver. Si on s’arrête, c’est foutu. Nous sommes dans un bras de fer avec le gouvernement donc nous sommes obligés de tenir bon. C’est pour nos retraites, alors il vaut mieux un petit sacrifice aujourd’hui qu’un trop gros plus tard.”
Adel, avocat, est aussi vent debout contre la suppression du système spécifique à sa profession. “Notre système marche très bien. On verse 300 millions d’euros chaque année au régime général, alors pourquoi ont-ils besoin de réformer ? Nos cotisations vont doubler, ce qui va entraîner la fermeture de petits cabinets.”
Tandis que des fourgons de police bloquent les rues perpendiculaires à la foule, certains, une fois à leur niveau, prêtent leur voix : “La police avec nous ! Tous ensemble !” D’autres sirènes retentissent, celles des soldats du feu. Un pompier du Val d’Oise, confie : “Nous sommes évidemment venus pour soutenir ceux qui protestent contre la réforme. Mais nous sommes également là pour dénoncer notre situation : nous en sommes en sous-effectif, et ce n’est pas vivable, avec tout ce que cela engendre.”
En dehors des retraites, les différentes causes affleurent rapidement. “Nous nous battons pour les personnes mal logées ou qui payent des loyers trop cher. Nous sommes là pour un enjeu de solidarité entre associations, en convergence avec les retraités qui, eux aussi, n’ont souvent pas les moyens de se loger correctement. Les chômeurs et les SDF font également partie de notre quotidien, et c’est pour eux aussi qu’il faut protester aujourd’hui, car ils sont partie prenante de ce système injuste. Les loyers sont trop chers à cause de la spéculation des prix, ce que le succès d’Airbnb est loin d’arranger”, défend ainsi Michel, de l’association Droit Au Logement (DAL).
Ci-dessous le reportage en images de Pierre-André Pelaz
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