Environnement | Val-de-Marne | 27/02/2019
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Restriction des véhicules polluants dès juillet (ZFE) : le point en Val-de-Marne

Restriction des véhicules polluants dès juillet (ZFE) : le point en Val-de-Marne © Fotolia-Nicoletaionescu

(Mis à jour le 2 avril avec nouvelle position de Villejuif) Alors que la métropole parisienne connaît depuis une semaine un pic de pollution aux particules fines, la préfecture de Paris a imposé ce mercredi 27 février une restriction de la circulation à l’intérieur de l’A86, interdisant son accès aux véhicules classés Crit’Air 4, 5 ou non classés. Au-delà de cette journée, une zone de faible émission (ZFE), doit être instaurée tous les jours de semaine dans ce même périmètre dès le 1er juillet 2019, dans les communes qui le souhaitent. A l’échelle de la métropole, plus de la moitié des villes concernées ont décidé de franchir le pas. Dans le Val-de-Marne, la proportion est un peu moins importante, qui concerne à ce jour 10 villes sur les 24 concernées. Le point sur la question et détail par commune.

Mise à jour: la mesure est entrée en vigueur le 1er juillet 2019:

Pollution de l’air: 13 villes du Val-de-Marne interdites aux Crit’Air 5

Le pic de pollution aux particules fines qui sévit depuis une semaine autour de Paris, en raison d’une inversion de température qui favorise la stagnation des polluants, ne constitue en effet que la partie émergée de l’iceberg. C’est en effet tout au long de l’année que la concentration de particules fines, nocives car elles pénètrent facilement dans les bronches, et de dioxyde d’azote, reste globalement au-dessus des recommandations de l’OMS (Organisation mondiale de la santé). Une pollution qui constitue en ville le troisième facteur de risque de mortalité prématurée après le tabac et l’alcool, évalué à 7 000 morts prématurées chaque année en Ile-de-France (6600 dans la métropole), ainsi que 11 à 13 mois d’espérance de vie en moins en moyenne à 30 ans. Un dépassement qui a même conduit la Commission européenne à poursuivre la France, et d’autres Etats, devant la Cour de justice de l’Union européenne (Cjue).

Pour le rappel détaillé du contexte et les liens vers les différentes études de santé publique et de données statistiques, lire article publié au moment du vote de la ZFE, en novembre 2018.

Pour répondre à cet enjeu, l’Etat a adopté un plan de protection de l’atmosphère en Ile-de-France, dès 2017, et la Métropole du Grand Paris (intercommunalité à l’échelle de Paris et des 3 départements de petite couronne) a voté fin 2018 un plan climat air énergie. Objectif : réduire de 75% les émissions de gaz à effet de serre entre 2005 et 2050, et à ramener les concentrations de particules fines et de dioxyde d’azote au niveau des valeurs limites dès 2024, et au niveau des valeurs recommandées par l’OMS d’ici à 2030, en s’attaquant à leurs causes principales : le chauffage au bois et les transports routiers. L’un des axes forts de ce plan est l’instauration d’une zone de faible émission de polluants (ZFE).

Une instauration progressive

Cette zone correspond à un périmètre (en l’occurrence l’intérieur de l’A86, mais pas l’A86 elle-même) au sein duquel les voitures les plus polluantes n’auront plus le droit de circuler de 8h à 20h en semaine (tout le temps pour les camions). Cette interdiction doit se faire progressivement, en s’attaquant aux Crit’air 5 et non classés (principalement diesel immatriculés avant 2001) dès juillet 2019, puis en étendant cette interdiction  aux véhicules Crit’Air 4 (principalement diesel immatriculés avant 2006) en juillet 2021, aux véhicules Crit’Air 3 (principalement diesel immatriculés avant 2011 et essence avant 2006) en juillet 2022, aux véhicules Crit’Air 2 en juillet 2024 et à tous les véhicules thermiques en 2030.

Pas de verbalisation pendant 2 ans et une aide financière pour les pionniers

Alors que la mesure risque de ne pas être très populaire, il est aussi prévu de ne pas verbaliser durant les deux premières années, le temps d’installer le matériel pour vidéo-verbaliser, pour amorcer le dispositif de manière pédagogique et laisser aux conducteurs concernés le temps de s’organiser. Au-delà des primes d’Etat à la conversion, la Métropole a également lancé une aide financière pouvant aller jusqu’à 5000 euros pour aider à acheter un nouveau véhicule, mais cette aide est en revanche limitée aux 1000 premiers dossiers et 250 sont déjà en cours de traitement. «Les subventions seront attribuées annuellement dans la limite des crédits inscrits au budget de la métropole du Grand Paris, et dans la limite de 1 000 véhicules sur la mandature», précise ainsi la MGP dans son règlement d’attribution de la subvention. Les conducteurs intéressés ont donc intérêt à se dépêcher… Voir la page dédiée à cette offre sur le site de la Métropole du Grand Paris.

Une zone mouchetée

Contrairement à la restriction imposée ce 27 février par la préfecture, en raison du pic de pollution, cette zone de restriction votée par la métropole, doit être décidée au niveau de chaque commune, par un arrêté pris par le maire en vertu de ses pouvoirs de police. Le calendrier décisionnel recommandé par la MGP est de prendre un projet d’arrêté début 2019 pour le soumettre pour avis aux villes voisines, informer et concerter sa population au printemps et prendre l’arrêté en juin pour une instauration en juillet. Toutes les communes ne sont toutefois pas à l’unisson sur le sujet. Si, au moment du vote de la ZFE par la métropole en novembre 2018, seuls des élus communistes avaient voté contre, la proportion de maires réticents à passer à l’acte s’est révélée plus importante en pratique. Au-delà des considérations de principe de chacun, les données diffèrent d’une ville à l’autre, notamment la proportion de conducteurs impactés. (Voir tableau en bas de l’article) Le mouvement des gilets jaunes, qui a démarré suite à une hausse du prix à la pompe, a montré que la question du transport automobile était sensible. Dans un premier temps, la ZFE ne constituera donc pas un périmètre continu à l’intérieur de l’A86 mais plutôt une zone mouchetée. A noter, en outre, que l’A86 traverse beaucoup de villes au milieu, ce qui complique encore la tâche car dans nombre de communes, la ZFE ne concernera que certaines rues, ce qui obligera à une signalisation particulière.

Plus de 50% des villes passent le cap au niveau de la métropole

Locomotive, Paris a déjà mis en place sa propre ZCR (Zone de circulation restreinte) depuis janvier 2017 pour éviter les Cirt’air 5, et dès juillet 2019, ce sera au tour des Crit’Air 4 de ne plus circuler à Paris de 8h à 20h, du lundi au vendredi (et aussi le weekend pour les poids lourds et autocars). «Au niveau de la métropole, un peu plus de la moitié des collectivités ont enclenché la procédure (ndlr :43 sur 79). Sur les  un peu plus de 40% qui ne l’ont pas fait, environ 15% s’y opposent vigoureusement et  25% attendent de voir comment cela va se passer. La proximité des élections municipales contribue parfois à l’attentisme», observe Daniel Breuiller, vice-président EELV de la Métropole du Grand Paris, rappelant que, selon un sondage commandé par la MGP, 75% des habitants de la métropole sont favorables à la mise en place de la ZFE. Pour l’élu, cette première étape, limitée aux Crit’Air 5, ne représente pas un gros parc de véhicules car il y a un écart de un à cinq entre les le nombre réel de voitures  Crit’Air 5 et celles dont les propriétaires ont demandé la vignette, et sont donc considérées comme roulantes.

En Val-de-Marne, les élus communistes s’opposent en choeur

Dans le département, les positions ne sont toutefois pas à l’unisson. L’association des élus communistes du département (Adrecr 94) a du reste fait savoir tout le bien qu’elle pensait de cette proposition dans une résolution adoptée le 12 février pour suggérer «dix propositions plus efficaces». Les élus considèrent que les transports en commun de banlieue restent insuffisants ou déjà saturés et que les aides ne sont pas à la hauteur. «L’interdiction de circulation pour les véhicules les plus polluants pénalisera celles et ceux qui ne peuvent pas s’offrir d’alternative et touchera particulièrement les plus précaires. Sans mesures d’accompagnement réelles, la zone à faibles émissions (ZFE) est une mesure antisociale», estiment les maires PCF qui souhaitent conditionner le calendrier d’instauration de la ZFE à celui du Grand Paris Express, du prolongement des lignes de métro 1 et 10, du renforcement du réseau de bus, de l’abandon du projet CDG Express, de la gratuité des transports en commun et du développement du fret ferroviaire et fluvial. Ils proposent par ailleurs de revoir le développement de la métropole en «bassins de vie à taille humaine où chacun peut travailler à proximité de son lieu d’habitation» en prenant des mesures plus contraignantes pour le rééquilibrage économique ou la limitation de l’inflation immobilière qui rejette les gens plus loin en banlieue. Les élus exigent également des aides financières plus incitatives, ouvertes aux véhicules thermiques Crit’Air 1 et 2. Ils invitent néanmoins dès à présent à favoriser le covoiturage et développer des parkings-relais gratuits pour les détenteurs de titres de transport en commun. A Gentilly, le Conseil municipal a toutefois voté un avis favorable à l’instauration d’une zone de circulation restreinte dans le cadre de la ZFE, mais en la conditionnant à l’ensemble des éléments indiqués dans la motion de l’Adecr 94, faute de quoi la ville propose de reporter sa mise en place à 2021. Voir la délibération.

Les écologistes réagissent

Une position que ne partagent pas les écologistes, pour qui «la santé n’attend pas». Alors que la région parisienne traverse un nouvel épisode de pollution, EELV Val-de-Marne insiste sur l’urgence de réagir et indiquent que ce-sont aussi les plus pauvres qui souffrent le plus de ce fléau. «Le coût de la pollution en termes de santé est catastrophique. Ces personnes fragiles et les familles modestes sont les plus touchées, parce qu’elles n’ont pas d’échappatoire, pas de maison de campagne ou de possibilités de se mettre à l’abri de cette pollution. Parce que souvent elles vivent dans des HLM à proximité des autoroutes ou du périphérique», plaident les écologistes, en colère contre les positions attentistes conditionnant la ZFE à la réalisation de métros d’ici quelques années. «Ils auront sur la conscience des centaines de morts par année de retard», préviennent-ils, tout en rappelant militer également pour le développement des transports en commun, du vélo, du covoiturage, de l’autopartage, du fret fluvial et ferroviaire, du télétravail ou encore de la gratuité des transports en commun lors des pics de pollution. Et de pointer également la période de deux ans sans verbalisation, de nature à permettre une transition. Rappelant les aides votées par la métropole, les écologistes réclament de leur côté un prêt à taux zéro pour les conducteurs devant changer de véhicule. «Nous attendons la réponse de l’Etat», indique Daniel Breuiller.

Qui fait quoi en Val-de-Marne ?

En Val-de-Marne, moins de la moitié des communes ont décidé d’instaurer la ZFE. Outre les 7 villes communistes ou Front de Gauche, qui – à l’exception de Gentilly sous conditions qui ne seront pas remplies d’ici juillet- ont décidé de passer leur tour, beaucoup d’autres communes ont également souhaité attendre. A Créteil, ville préfecture, la municipalité fustige la frontière que constituerait cette zone à l’intérieur de la ville traversée en son cœur par l’A86. «D’un point de vue social, la mise en place de telles mesures de restriction conduirait, dès le 1er juillet 2019, à interdire l’accès d’une partie de la ville à certains habitants de Créteil, propriétaires de véhicules anciens. Aujourd’hui, Créteil compte un parc automobile de 50 406 véhicules, dont 3987 véhicules seraient, dès cette année, concernés par la mesure. Puis ce serait 12 268 en 2021 et 29 277 en 2022. On voit bien là que la question de l’aide de l’État pour faciliter la conversion du parc de véhicules de ces populations, souvent déjà fragilisées financièrement, se pose avec d’autant plus d’acuité», pose la municipalité. Voir la tribune de la ville sur le sujet.

A Rungis, ce-sont les enjeux économiques qui ont rendu le projet trop risqué. «Tout le MIN de Rungis et tout le parc hôtelier sont compris dans l’A86», explique le maire, Raymond Charresson (sans étiquette), rappelant l’important trafic de poids lourds dans la zone et la nécessité de prendre le temps de l’évaluation.

A Alfortville encore, on indique ne pas être contre le principe, bien au contraire, mais on voit aussi le parc de 500 voitures concernées en ville dès juillet 2019 et l’on exige des meilleures garanties financières de conversion avant d’enclencher le processus.

Même dans les communes qui ont décidé de jouer le jeu, personne n’y va tête baissée. «Ce sujet n’est ni connu, ni populaire», reconnaît-on au cabinet du maire d’Arcueil, tout en rappelant qu’il y a déjà 200  zones de ce type en Europe et qu’il faut avancer, évoquant aussi le pic de pollution actuel.

A Saint-Maurice, la ville a décidé aussi d’amorcer. «Nous avons envoyé notre projet d’arrêté en consultation à Charenton-le-Pont, Maisons-Alfort, Joinville-le-Pont et Paris et avons été saisis de notre côté par des projets d’arrêté à Paris et Charenton. Avec Charenton, nous nous sommes coordonnés pour rendre un avis favorable sous réserve d’un niveau d’aide financière suffisante, qu’il n’y ait pas de verbalisation dès le 1er juillet 2019 mais dans un délai de 2 ans, une assurance sur le développement en parallèle des transports en commun, en particulier de la ligne 15 Est…», détaille le maire, Igor Semo (LR), pointant notamment le fait que l’aide financière annoncée par la MGP ne soit disponible que pour les 1000 premiers demandeurs. Concernant l’arrêté de Paris en revanche, la ville compte émettre un avis défavorable. «Cela n’empêchera pas à la ville de le mettre en place mais nous considérons que Paris va trop vite car elle va interdire les Crit’Air 4 sur le périphérique et les deux bois, et les villes limitrophes risquent de devenir des parkings.» Reste ensuite à concerter la population. «J’ai déjà abordé la question un peu informellement lors de quatre réunions communales qui se tenaient en janvier et février, demandant à chaque fois l’avis des gens lors d’un vote à main levée. La majorité des gens découvraient le dispositif et ne se sont pas prononcés sauf dans une réunion, dans un quartier proche de Charenton, où une majorité de participants se sont montrés favorables. Nous allons désormais passer à une communication plus structurée, avec un dossier dans le Saint Maurice Infos du mois de mars puis une consultation au printemps.  Je vais demander aux propriétaires de véhicules Crit’Air 5 de se manifester auprès de la ville pour étudier les situations individuelles», poursuit l’élu. A Saint-Maurice, environ 300 véhicules sont en Crit’Air 5, dont la moitié de particuliers. Et sur les 150 particuliers, seuls 70 ont leur vignette.

A Saint-Mandé également la ville a démarré le processus, le conditionnant également à l’amélioration des aides financières et la mise en place d’un guichet unique d’accompagnement auprès de la MGP. «Nous sommes complètement entourés par Paris qui a déjà enclenché cette démarche et nous inscrivons nous-mêmes dans cette logique avec par exemple notre salon du développement durable et nos incitations à passer à la voiture électrique en installant des bornes. C’est un travail de longue haleine», indique le maire, Patrick Beaudouin (LR), qui souhaite malgré tout rappeler que l’exploitation de la lignite en Allemagne contribue aussi à la pollution de l’air en région parisienne.

Au Kremlin-Bicêtre encore, on est entré dans le dispositif en suivant le processus de concertation prévu par la MGP,  organisant même un débat en Conseil municipal. «On parle d’écologie punitive dès qu’il s’agit d’automobiles mais lorsque l’on fait des travaux d’isolation dans un parc HLM cela se traduit aussi par des augmentations de loyer. Qu’on le veuille ou non, la pollution est une réalité», motive le maire, Jean-Marc Nicolle. La ville a également donné un avis favorable à Arcueil, Gentilly et Paris qui lui ont soumis pour avis leur propre projet d’arrêté.

11 villes du Val-de-Marne ont enclenché le processus

Mis à jour le 2 avril. Au final, onze communes du département ont enclenché le processus à ce jour, en l’assortissant d’un certain nombre de conditions, et sous réserve d’une concertation avec les habitants : Arcueil, Cachan, Charenton-le-Pont, Fresnes, Gentilly, Le Kremlin-Bicêtre, Saint-Mandé, Saint-Maurice, Thiais et Vincennes. Villejuif a également annoncé qu’elle avait décidé d’adopter l’arrêté, lors du Conseil municipal du 1er avril.

Détail du nombre de voitures vignette Crit’Air 5 par ville à l’intérieur de l’A86 et décision ou non d’enclencher le processus de ZFE.

A noter que ces données ne concernent que les voitures qui disposent d’une vignette et pas celles qui relèvent du Cirt’Air 5 mais qui n’ont pas demandé leur vignette, qui sont beaucoup plus nombreuses, particulièrement dans cette catégorie Crit’Air 5 car un certain nombre ne roulent pas vraiment.

Voir aussi le parc complet des véhicules relevant des différents Crit’Air, qu’ils aient ou non la vignette.

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Vignette Crit’Air mode d’emploi

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