Histoire | | 26/02/2020
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A Villiers-sur-Marne, Jean Villeret, déporté résistant de 97 ans, témoigne devant 400 jeunes

A Villiers-sur-Marne, Jean Villeret, déporté résistant de 97 ans, témoigne devant 400 jeunes © FB

A 97 ans, Jean Villeret n’a pas ménagé ses efforts pour venir, encore une fois, de son vivant, témoigner de la résistance et de la déportation devant une salle pleine à craquer de jeunes ados, à Villiers-sur-Marne. Un travail de longue haleine et sans relâche pour ce passeur de mémoire originaire de Maisons-Alfort.

Pendant près d’une heure, Jean Villeret, invité par la ville dans le cadre du 75ème anniversaire de la fin de la guerre de 1939-1945, ne sera pas interrompu une seule fois pour reprendre son souffle ou de désaltérer. Rôdé à l’exercice, il déroule le roman de sa jeunesse comme s’il avait remonté le temps. Né en décembre 1922, il avait à peu près l’âge de son auditoire lorsque les prémices de la seconde guerre mondiale se sont manifestés. «Je me souviens avec effroi avoir entendu à la radio la voix du chancelier Hitler en 1933, puis, les puissances européennes n’ont fait que lui céder pour éviter le conflit jusqu’à ce qu’il éclate en 1940 et que la France finisse par être occupée», relate-t-il.

Tourneur dans des ateliers, il craint alors d’être envoyé en Allemagne où la main d’œuvre manque depuis que la Werhmacht s’est lancée à la conquête de l’URSS. Réfractaire de la relève, il décide avec une poignée de copains de son quartier de Charentonneau, à Maisons-Alfort, de passer en zone libre, en novembre 1941. Il a alors 18 ans. «Après le choc de la défaite, l’appel du général de Gaulle à résister nous avait convaincus mais il était difficile de trouver un réseau. Nous avions pour projet de travailler en zone libre pour gagner suffisamment d’argent pour rejoindre les Forces françaises libres en Afrique du Nord».

“Les plus dangereux sont ceux qui se contentent de ne rien faire”

Mais en novembre 1942, les Nazis envahissent la zone non occupée pour contrer l’avancée des alliés qui ont débarqué au Maghreb, anéantissant le projet initial de la bande de Maisonnais. Entre temps, l’Etat français institue le Service du Travail Obligatoire et Jean Villeret est recherché. Fin 1943, revenu en région parisienne, il parvient à obtenir de faux papiers et entre dans la résistance armée en rejoignant un groupe de Francs-tireurs. «Ils m’ont prévenu que si nous étions arrêtés, je risquais d’être fusillé. J’ai quand même accepté», poursuit-il, rappelant aux jeunes spectateurs son mantra : «Il faut prendre ses responsabilités et oser dire non. Les plus dangereux sont ceux qui se contentent de ne rien faire».

Un mois plus tard, il est arrêté par la police française avec ses camarades, avant d’être remis aux autorités militaires allemandes. Jean Villeret est alors interné à la prison de Fresnes, privé d’eau pendant trois jours, puis envoyé en juillet 1944 au camp de concentration de Natzweiler-Struthof, en Alsace. «Une fois arrivé, on nous a prévenu que nous serions des Nacht und Nebel, des Nuits et brouillard, que nous allions rentrer par la porte et sortir par la cheminée».

Un documentaire : La voix du rêve
Les ultimes témoignages des résistants déportés du camp Natzweiler-Struthof ont fait l’objet d’un très récent documentaire de Pascal Crépin, La voix du rêve, dans lequel Jean Villeret revient sur son passé. Ce mardi, ce documentaire vient d’être validé par le Ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Un plaidoyer pour la paix

A peine deux mois après, son camp est évacué devant l’avancée des troupes alliées et il se retrouve au camp de concentration de Dachau, plus à l’est. Pendant quelques mois, il est contraint de travailler avec d’autres déportés pour l’industrie de guerre allemande. «Entre temps, j’ai attrapé le tiphus puis l’erysipèle. Il y avait une épidémie dans le camp. Cela m’a peut être sauvé la vie parce que j’étais dispensé de prendre part aux appels quotidiens dans le froid. Nous étions devenus insensibles à ces camarades qui mourraient autour de nous et dont on chargeait les corps comme des sacs de patates».

Fin avril 1945, des troupes américaines parviennent à la libérer le camp de Dachau. «A ce moment là, je m’étais dit que nous en aurions fini avec les guerres mais déjà des camarades me riaient au nez. La Corée, l’Indochine, l’Algérie et tout un tas de guerre inutiles ont depuis éclaté», se désole le vieil homme, enjoignant son jeune auditoire à se battre pour la paix.

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