Alors que la 36 ème campagne d’hiver des Restos du coeur a démarré ce mardi 24 novembre, le nombre de bénéficiaires est déjà haut sur la jauge, avec le retour d’anciens habitués qui avaient réussi à s’en tirer, ou de nouveaux publics comme les étudiants. Reportage à l’antenne d’Asnières.
À l’arrêt de bus “Tour d’Asnières”, les personnes avec des caddies vides et des sacs de courses remplis se croisent. Signe que les locaux des Restos du cœur ne sont pas très loin. Dans les Hauts-de-Seine, l’association dispose de 15 antennes. Celle d’Asnières fait partie des plus importantes, avec notamment le seul centre bébé du département.
À proximité de la nouvelle gare du Paris Grand Express et de la ZAC Le Parc d’affaires, les Restos du cœur d’Asnières-sur-Seine accueillent les bénéficiaires depuis près de dix ans. Disposant de 600 mètres carrés, l’association accueille le public aussi bien pour la distribution alimentaire que pour une aide sociale.
« Le jour où ils m’ont donnée une poussette, j’ai pleuré de joie »
Dans le département, la singularité des Restos du cœur d’Asnières est son centre bébé. « Tous les centres distribuent des couches et du lait. Mais ici, on a des vêtements et on collecte des poussettes, des nacelles et tout le matériel de puériculture », explique Murielle Dappe, responsable des Restos du cœur d’Asnières. Une bouée pour Biallo, bénéficiaire depuis la naissance de son fils Adbullah de 5 mois et en attente d’une réponse pour sa demande d’asile. « C’est eux qui m’ont donné une poussette. J’ai eu une césarienne et je portais mon enfant sur un porte-bébé, ce qui était dur. Le jour où ils m’ont donnée une poussette, j’ai pleuré de joie. »
Une organisation millimétrée par la crise sanitaire
« La porte d’entrée c’est l’alimentaire, mais les Restos font plein de choses à côté », rappelle Murielle. Dès l’inscription, les bénévoles proposent aux nouveaux bénéficiaires des activités adaptés à leurs besoins. Français, soutien scolaire, informatique pour lutter contre la fracture numérique, établissement d’un budget, aide à rédiger du courrier administratif, ateliers tricot et de cuisine… l’activité des Restos du cœur ne s’arrête pas à l’aide alimentaire même si avec le confinement, les activités en groupe se sont arrêtées. « Mais c’est vrai qu’en règle général, les gens viennent là parce qu’ils ont faim. », se désole Murielle.
Pour les bénévoles, l’organisation en temps de confinement obère le lien social. « Il n’y a plus de contact avec les gens. C’est vraiment de l’administratif et de la distribution de sacs. Ça n’a pas beaucoup d’intérêt, mais je sais que ça aide beaucoup », confie Corinne, en charge de l’approvisionnement et de la section adulte. Les paniers distribués constituent une aide alimentaire pour tenir une semaine. Une aide indispensable pour ce père de famille soudanais, qui attend également une réponse de sa demande d’asile. « J’attends d’avoir mes papiers pour travailler. Et peut-être arrêter de venir ici. En attendant, l’association nous aide énormément », témoigne le réfugié.
L’association a complètement réorganisé son schéma de travail habituel pour répondre aux gestes barrières. « On prépare un sac en avance, en fonction du nombre de personnes dans la famille. Puis, on rajoute le frais et le surgelé », explique Marie-Christine, jeune retraitée et bénévole depuis un an et demi. « On a plus ou moins chacun son poste, on se spécialise en fonction de nos préférences. » Ouvert trois jours par semaine, les bénéficiaires sont convoqués à une heure fixe pour récupérer leur panier. En moyenne, c’est une centaine de familles qui viennent ici par jour.
« On est à 300 familles, et je pense qu’on finira à 400 »
Alors que la majorité des bénéficiaires sont d’ordinaire des familles monoparentales, les Restos du cœur d’Asnières ont vu débarquer de nombreux étudiants. « On les voit arriver, parfois à 4 ou 5 en même temps. C’est une période dure pour eux. Ils doivent étudier chez eux, donc ils n’ont pas accès à la cantine universitaire. En plus, ils ont perdu leur petit boulot. » Revoir des visages familiers, une autre situation qui désole Murielle. « On a aussi des gens qu’on ne voyait plus. Ils avaient trouvé des petits boulots qui leur suffisait pour vivre, et ils n’avaient plus besoin de venir. »
« Dans tous les centres du 92, on a en moyenne une augmentation de 20 à 25% des bénéficiaires. À mon avis, dans deux mois ça commencera à être compliqué. Ici, on est à 300 familles, et je pense qu’on finira à 400. » Corinne ressent déjà la limite des stocks de l’association. « On distribuait 1,5l de lait. On vient de nous dire de passer à 1l.» Heureusement, l’association bénéficie de dons toute l’année. « On vient de recevoir un énorme don de légumes frais. On a aussi reçu beaucoup de boissons de la part de cinémas et de cafés fermés pendant le confinement. C’est très agréable car on en a bien besoin ! » À côté, l’association peut aussi compter sur le fond européen d’aide au plus démuni (FEAD).
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