Vélo | | 10/09/2020
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Créteil et Saint-Maur sonnent le glas des coronapistes

Créteil et Saint-Maur sonnent le glas des coronapistes

Conçue pour l’automobile à l’aube des années 1960, Créteil n’est pas prête de changer de braquet. Ce mardi, le maire, Laurent Cathala (PS), a écrit au président du Conseil départemental pour lui demander de supprimer l’intégralité des coronapistes créées dans sa ville au moment du déconfinement. Le lendemain, le maire de Saint-Maur-des-Fossés, Sylvain Berrios (LR), enclenchait lui aussi la marche arrière.

Evoquant un “engorgement persistant de la circulation”, le maire de Créteil rappelle la vocation temporaire des pistes situées sur la RD19, la RDD86 et le carrefour Pompadour, et invite à les supprimer pour redonner de la fluidité à la “circulation classique”. “Même si je m’inscris dans une démarche active pour déployer les voies de circulations douces sur l’ensemble du territoire communal et trouver un meilleur équilibre entre les modes de déplacement, les aménagements antérieurs sur la RD 86 et la RD 19 doivent rester la base de notre discussion pour des évolutions futures”, tranche l’édile.

De quoi donner le feu vert aux villes voisines pour effacer les pistes. “A l’instar de mon collègue Laurent Cathala, maire de Créteil, je souhaite appeler votre attention sur les encombrements persistants et les risques pour la sécurité des usagers que continuent de représenter les pistes cyclables temporaires implantées à l’issue du déconfinement”, commence ainsi la missive adressée par le maire de Saint-Maur-des-Fossés, Sylvain Berrios, ce mercredi, pour réclamer la suppression des coronapistes sur la RD86. Pour l’élu, le fonctionnement normal des transports en commun ne justifie plus les coronapistes. Le maire insiste par ailleurs sur la dangerosité aux abords du chantier Grand Paris Express où “deux-roues motorisés, voitures, bus et poids-lourds voisinent avec des cyclistes à peine visibles sur voie dédiée, les autres véhicules étant rejetés sur une voie unique, saturant de facto l’accès au Pont de Créteil.”

En contrepartie, le maire propose de faire passer certains axes comme le quartier Schaken en voie limitée à 30 km/h.

Pour les associations de cyclistes, la suppression des coronapistes est un “bond en arrière” comme l’exprime Louis Belenfant, directeur du Collectif Vélo Ile-de-France, qui regroupe une trentaine d’associations cyclistes de la région. Car ces pistes sont certes provisoires mais elles sont sensées préfigurer le futur RER V, un itinéraire sécurisé et sans coupure reprenant les grands axes RER pour inciter à se déplacer en vélo lorsque les distances le permettent.

Créteil : “un trou noir cyclable”

“La ville préfecture se transforme en trou noir cyclable, contribuant à détricoter le réseau autour. Cela revient à dire aux habitants : si vous ne voulez plus prendre les transports en commun, préférez la voiture!”, résume Louis Belenfant, qui regrette que les solutions de compromis qui ont pu être trouvées sur certains axes compliqués, comme par exemple des voies bus accessibles aux vélos, aient été “balayées”.

“C’est vrai que Créteil a été initialement conçue davantage pour l’automobile que pour les vélo, cela ne nous empêche pas de travailler aux circulations douces mais il faut tenir compte du plan de circulation et de la réalité sur le terrain. En ce moment, nous avons trois chantiers du Grand Paris Express à Créteil, ce qui crée quelques problèmes de circulation avec les camions. Les coronapistes occasionnent une situation paradoxale. En embolisant le trafic, elles pénalisent les bus. Or, les transports collectifs constituent un moyen important pour éviter que les gens ne prennent leur voiture”, argumente Laurent Cathala, joint par téléphone. Le maire s’engage en revanche à mieux sécuriser les pistes existantes sur les trottoirs de la RD19 et à développer la réflexion autour des zones 30.

Philippe Ungerer, co-président de l’association Partage ta rue 94. explique pour sa part comprendre la nécessité pour le maire de faire des arbitrages mais regrette que ce dernier n’ait pas “pris la peine d’écouter les cyclistes” comme il a écouté les autres usagers de la route en ville. Lui met en avant l’augmentation du trafic vélo, qui a plus que doublé depuis les coronapistes, avec 200 cyclistes à l’heure sur certaines portions comme la limite entre Créteil et Maisons-Alfort. “Et sur la D86, nous avons eu 150 cyclistes à l’heure en heure de pointe, comptés officiellement par les bornes du département”, insiste-t-il, témoignant également des nouveaux usagers du vélo qui affluent dans la vélo-école, des rayons vélo de Décathlon pris d’assaut. Un engouement dont doute le maire de Créteil, au point qu’il prépare une vidéo pour témoigner des coronapistes sans cyclistes à côté des voies automobiles engluées. “Les cyclistes sont petits, moins visible, on les voit beaucoup moins”, reprend Philippe Ungerer. Lui aussi a des éléments tangibles. “Cet après-midi, nous avons obtenu 250 signatures en 4 heures en nous postant aux abords des pistes cyclables cristoliennes, et pourtant, tous les cyclistes ne s’arrêtaient pas!”

A Saint-Maur-des-Fossés, François Rivailly, ancien président de Place au vélo Saint-Maur, a lui été surpris par la décision du maire. “Ces derniers temps, des signes témoignaient au contraire d’une réelle prise en compte des cyclistes. Nous avons vu se multiplier des accroche-vélo, des panneaux permettant aux vélos de tourner aux feux lorsqu’il n’y a pas de danger, nous y avons cru. Et puis, les cyclistes étaient au rendez-vous. Nous sommes passé en quatre mois d’une part modale de 1,5% à près de 12%, alors qu’il a fallu 10 ans pour arriver à cette proportion aux Pays-Bas. Et le jour de la rentrée des classes, la part modale des vélos devant le lycée a même été de 18%! Cela prend moins de place sur la chaussée que des parents qui déposent leur enfant en voiture”, témoigne l’associatif. Les zones 30, il n’y croit guère. “Devant le collège Ronsard, il y a un radar pédagogique et un plateau surélevé, la limitation n’est jamais respectée, et nous avons même vu des pointes à 100 km/h!”

“Le département a sondé les maires de Creteil et Saint-Maur au sujet de la piste temporaire implantée sur la RD86. Le retour a été unanime sur sa dangerosité pour les cyclistes aux abords du chantier de la gare du Grand Paris Express et sur les embouteillages monstres engendrés depuis le pont de Creteil jusqu’au Carrefour Pompadour”, détaille dans un texto le maire de Saint-Maur qui renvoie au préfet l’exercice de ses pouvoirs de police pour réglementer les axes à 30 km/h. “A ce jour la préfecture n’a pas statué”, pointe l’édile.

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