Directeur du Groupement des Ehpads publics du Val-de-Marne, qui compte 13 sites et gère aussi des services à domicile, Dominique Perriot rend compte de la gestion de la crise coronavirus dans ses établissements. A ce jour, deux pensionnaires sont décédés. L’heure est au confinement des résidents, à la gestion tendue des approvisionnements, à l’accompagnement d’un personnel qui n’est pas épargné… Interview.
Y-a-t-il à ce jour des résidents atteints de coronavirus Covid 19 dans les établissements du Groupement des Ehpads publics du Val-de-Marne?
Sur nos 13 sites, le plus touché est celui de la Dame Blanche (photo de une), à Fontenay-sous-Bois. Les deux personnes qui ont été hospitalisées il y a une dizaine de jours sont décédées et 6-7 résidents ont de la fièvre mais restent chez nous. Par mesure de précaution, nous avons procédé au confinement de tous les résidents.
Y-a-t-il d’autres cas suspects dans d’autres établissements ?
Il y a des résidents qui ont de la fièvre, mais ce n’est pas forcément le Covid. Nous avions déjà des gens malades avant l’épidémie de coronavirus.
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Comment se passe le confinement en Ehpad ?
Chacun reste dans sa chambre et les repas sont servis en chambre. Les personnes sortent néanmoins une par une pour effectuer leurs activités de psychomotricité. On s’organise pour qu’elles ne se croisent pas.
Comment organisez-vous le maintien du lien avec les familles et les proches, alors que les visites des résidents en Ehpad sont interdites?
Nous étions heureusement bien équipés en tablettes et portables et les animateurs et soignants vont dans les chambres pour organiser des face-à-face en vidéo, une fois par semaine et par personne. C’est moins intime mais cela permet de se voir et de garder le contact.
Disposez-vous de suffisamment de matériel dans vos Ehpad ?
Nous avons suffisamment de masques pour le personnel mais nous inquiétons pour les blouses. Nous fournissons un masque par jour par personne et deux pour ceux qui travaillent 10-12 heures dans la journée. Les personnes qui sont en contact avec des suspects de Covid, disposent de masques supplémentaires pour pouvoir en changer en sortant de la chambre. Nous avons également des lunettes et du gel hydro-alcoolique. Ce qui nous inquiète est l’approvisionnement des tabliers et des sur-blouses car nous avons des soucis de fournisseurs et de livraison, et le stock s’amenuise vite, à raison de 200 par jour.
Quid de l’accompagnement à domicile ?
Nous avons 268 places à Bry-sur-Marne, Ormesson-sur-Marne, Fontenay-sous-Bois et Alfortville. La situation est plus compliquée. Pour les personnels, il est plus anxiogène d’aller à domicile qu’en Ehpad. D’autant que nous n’avons pas eu les masques tout de suite pour les soins à domicile, les choses ne se sont réglées que cette semaine. Les familles sont aussi inquiètes, certaines exigent des sur-blouses mais nous ne disposons pas des stocks suffisants. Certaines familles ont pris le relais elles-mêmes. Pour d’autres, se pose le problème de l’isolement très important. Dans les Ehpad, il y a la visite des personnels. Je suis beaucoup plus inquiet pour les personnes très dépendantes à domicile. Ce contexte révèle la limite de la très grande dépendance à domicile.
Avez-vous suffisamment de personnel pour faire face ?
Le personnel est aussi durement touché. 25 à 30 personnes sont à l’arrêt même si tout le monde n’a pas été testé. Une infirmière est hospitalisée, en observation. Pour autant, le personnel est très mobilisé et les villes se sont aussi très bien organisées pour que les enfants soient accueillis durant la journée, nous n’avons donc pas de problème de garde à ce jour. Nous mettons par ailleurs en place un partenariat avec une compagnie de taxis les weekends et le soir pour permettre aux personnels de venir travailler. Les deux premiers sites que nous allons tester sont Ormesson-sur-Marne et Vitry-sur-Seine.
Comment vivez-vous la situation?
J’essaie de ne pas sombrer dans l’apocalyptique. J’ai conscience que notre groupement dispose de médecins et d’infirmières sur place, ce qui n’est pas forcément le cas dans des petits Ehpad isolés. Surtout, je félicite l’extraordinaire mobilisation des personnels et leur union sacrée, des informaticiens aux soignants. Il est très émouvant de constater cet engagement.
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