Solidarité | Paris | 12/11/2020
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Paris – La Goutte d’Or: la Table ouverte à l’épreuve du reconfinement

Paris – La Goutte d’Or: la Table ouverte à l’épreuve du reconfinement © Pablo Girard

10h30 ce mardi 10 novembre. Au 19 de la Rue Léon, dans le quartier parisien de la Goutte d’Or, les bénévoles de la Table Ouverte se posent quelques minutes autour d’un café, avant le coup de feu du midi. L’association du 18e arrondissement s’est fixée une mission : remplir les estomacs de 300 bénéficiaires chaque jour : 150 le midi, 150 le soir.

Créée en 2009, la Table ouverte fait d’ordinaire de l’aide à la personne et gère le café de l’ICI, un restaurant associatif rattaché à l’Institut des Cultures de l’Islam dans le même bâtiment. Les menus de ce resto (entrée plat dessert à dix euros) permettent de financer les distributions alimentaires pour les plus précaires, sans-abris, les toxicomanes,.

Mais depuis le début de la crise sanitaire, l’association a dû drastiquement changer de rythme. Si le resto associatif est provisoirement fermé, les distributions de repas, elles, ont explosé pour répondre aux personnes en détresse sociale. Une plateforme de recrutement en ligne de bénévoles a été mise en place et le service de distribution alimentaire s’est taylorisé.

Alors que midi s’approche, chacun s’affaire. Souhila, en cuisine, prépare le tajine du soir. Nabil remplit une à une les barquettes de bœuf et haricot blanc, au menu aujourd’hui. Mohammed achemine les repas vers la friche située à deux pas du restaurant, là où se déroulera la distribution.

“On a même d’anciens clients du restaurant qui viennent à la distribution”

Avec le second confinement, la demande a encore accru. « Il n’y a pas que des gens du quartier qui viennent, il y a des gens de partout de Paris, même de la banlieue. Surtout, ces derniers temps, on voit des gens de la classe moyenne, des étudiants et des retraités, ce sont de nouvelles têtes, on sent que la précarité se renforce. On a même d’anciens clients du restaurant qui viennent à la distribution », témoigne Nabil.

Rendez-vous à la friche

Longé par le passage Ramey et la rue Marcadet, “la friche” est habituellement un espace de jeux et de jardinage pour enfants, elle sert aujourd’hui exclusivement de lieu de distribution alimentaire.

Sur cet ancien terrain vague, une deuxième équipe prend le relais. La plupart se connaissaient d’avant leur engagement associatif et sont quasiment tous passés par ce quartier. « Moi je vois des gens qui souffrent. On essaye de les aider, en leur donnant un repas chaud», motive Hakim qui gère l’ensemble de la distribution. Saïdou, gardien d’immeuble rue Ordener, à côté de la mairie du XVIIIe, entame son premier jour de bénévolat. « J’ai grandi ici donc ça me fait plaisir de donner un coup de main. Pour moi l’aide, le soutien, c’est quelque chose de primordial surtout dans un quartier où certaines personnes n’ont rien», insiste-t-il. Ce-sont les commerçants du quartier qui fournissent des produits ou qui font des remises.

Depuis le premier confinement, la Table Ouverte a aussi reçu un coup de pouce de la ville qui subventionne 20% du budget de l’association.

De gauche à droite, Tarek, Abdel et Mohammed en pleine préparation

Deux lignes se forment : une pour les femmes et enfants, une autre pour les hommes de tout âge. « C’est très bien ici, je ne venais pas avant mais depuis le confinement je suis obligé », confie un retraité. Hakim prend la traditionnelle vidéo du jour qui sera relayé sur les réseaux sociaux et la distribution peut commencer. Badr-Eddine, en chômage partiel, est venue faire respecter les distances et le port du masque. Tarek distribue les repas. Mohammed supervise et Stéphanie Chazalon, directrice de l’ICI, donne des masques à la sortie. Certains bénéficiaires remercient chaleureusement, d’autres s’esquivent, furtivement. De temps en temps, quelqu’un s’en va avec un repas en plus, comme cette dame âgée qui échange quelques mots en arabe avec Tarek. « On la connaît. Ils sont plusieurs à la maison », explique-t-il.

En l’espace d’une demi-heure, plus d’une centaine de personnes ont été servies. Une autre équipe prendra le relais pour la distribution de 17h.

De gauche à droite Tarek, Hakim, Badr-Eddine et Saïdou

Alors que l’association ne peux plus assurer certaines de ses activités non confinées, comme les cellules de soutiens psychologiques aux femmes seules, l’aide administrative ou l’orientation, elle se projette dans d’autres initiatives pour survivre à la crise sanitaire et sociale provoquée par l’épidémie de coronavirus.

A venir : restaurant solidaire et vestiaire

Au menu : l’ouverture d’un restaurant solidaire dans un hall d’exposition de l’ICI, inutilisé pendant le confinement. « L’idée est qu’une quarantaine de personnes puissent manger au chaud et assises. Parce que, vous l’avez vu, il y a une queue assez importante et donc de l’attente pour les personnes fragiles et âgées », justifie Stéphanie Chazalon. L’ouverture de cet espace devrait se jouer d’ici à la fin de la semaine ou au début de la semaine prochaine.

Autre idée : la création d’un magasin de distribution vestimentaire. « On a fait le recensement des gens, on est en contact très avancé avec des distributeurs qui vont nous faire un prix dérisoire, de 10 à 20% des prix de vente. On va voir si la mairie peut nous donner un petit local parce que l’intimité des gens est très importante », explique Nabil.

   

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