Jouets, livres ou objets de décoration… Sur 1200 m2de surface de vente, la boutique d’Emmaüs Défi de la rue Riquet (Paris 19ème) propose de tout. En coulisse, 150 salariés en parcours d’insertion, majoritairement issus de la rue, s’activent pour trier, nettoyer et remettre en circuit ces futurs cadeaux de Noël avant les ouvertures des mercredi et samedi.
“C’est un lieu d’espoir pour les personnes cassées par la vie“, résume Emmanuel Ravanas, le président d’Emmaüs Défi.
Quand le recyclage s’imposera définitivement dans les moeurs
Au-delà de son objet de réinsertion sociale, l’association poursuit aussi son combat pour le recyclage, parmi les pionnières historiques. “Il est important de faire changer les habitudes des gens, notamment en imprégnant un automatisme de donner les objets ou produits qu’ils ne veulent plus au lieu de les jeter“, défend Emmanuel Ravanas.
Un défi qui s’adresse aussi aux professionnels. D’ores et déjà, l’association a réussi à nouer des partenariats pour récupérer les invendus des entreprises au lieu de les détruire. “Près de 7 tonnes d’objets sont collectés à Paris quotidiennement”, précise le président de l’association.
Ces produits neufs, à moindre coût, sont principalement destinés aux personnes et familles les plus démunies. Ce fut le cas lors de la vente “Super Noël” du 5 décembre, lors de laquelle quelque 14 000 jouets neufs ont été proposés aux familles.
Depuis la réouverture de la boutique le 28 novembre, la foule est revenue. “On était surpris de voir que les gens étaient au rendez-vous. Et ils étaient prêts à faire de 2 heures de queue sans rechigner“, se réjouit Philippine Garde, chargée de mission. “On a reçu deux fois moins de clients mais les gens ont acheté plus de produits.”
Un atelier de tri de près de 5 500 m²
Au sous-sol, un entrepôt de 5 500 m² permet aux salariés de réceptionner, trier, réparer et valoriser les produits reçus. La collecte de dons est quotidienne et passe par le quai central où les camions déposent les objets récoltés. En plus du dépôt des particuliers dans les locaux, l’association peut compter sur les collectes solidaires de quartier. Grâce au réseau Amistock, les particuliers peuvent notamment déposer des dons auprès de points relais qui se chargeront de les transmettre à Emmaüs Défi (chez un particulier, une mairie, des magasins Bio C’Bon…).
Dans l’atelier textile, des mains s’affairent à trier et ranger les vêtements reçus. “Ici, on accueille principalement des personnes énergiques et patientes, car le tri est long et le rythme soutenu“, explique l’encadrante de ce pôle. « Ils sont formés aux métiers de la grande distribution“. Objectif : faciliter la transition vers un salariat plus classique. Rosa, salariée depuis près d’un an, travaille en parallèle sur un réseau social solidaire et espère y travailler à plein temps.
En plus de la vente d’objets d’occasion, des ateliers de création, notamment du tissu et du bois, réinventent de nouveaux objets et forment aux métiers manuels. Dans l’atelier de menuiserie, ce-sont des chutes de bois qu isont transformées en meuble. Dans l’atelier de couture, les vêtements non sélectionnés sont transformés en housse ou en poche.
Un afflux de volontaires depuis la crise sanitaire
“On accompagne 150 personnes en parcours d’insertion“, précise Antoine Broto, le directeur général d’Emmaüs Défi. “La demande est en constante augmentation. On ressent une hausse des besoins“, constate quotidiennement la chargée de mission. “On est obligé de mettre en place une liste d’attente.”
Une affluence consécutive de la crise sanitaire, sans filet pour les plus précaires. C’est dans ce contexte que le plan de relance a prévu un enveloppe pour les structures de réemploi, de réparation et du recyclage de plus de 1 500 salariés. Confiée à l’ADEME, cette aide financière représente 1,46 million d’euros répartis entre 37 recycleries franciliennes, dont 187 753 euros pour Emmaüs Défi. “Cela va permettre d’approfondir les actions déjà mises en place“, note Antoine Broto. Ce vendredi, le préfet de région Marc Guillaume et directeur de l’Ademe Ile-de-France, Michel Gioria, sont venus voir sur place le travail de l’association, accompagnés de François Dagnaud (PS), maire du 19ème et de Florentin Letissier, écologiste, adjoint à la maire de Paris en charge de l’économie sociale et solidaire et élu dans le 14ème arrondissement.
L’occasion de rappeler les différents dispositifs qui contribuent à l’équilibrer économique de cette activité, comme le Dispositif première heures (DPH) mis en place par la ville de Paris pour accompagner des personnes exclues socialement vers une reprise progressive d’activité à travers le Contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI).
De son côté, Emmaüs défi a mis en place des initiatives complémentaires pour attaquer la précarité sous ses différents angles, via notamment la Banque solidaire d’équipement (BSE) qui aide les personnes, identifiées par les travailleurs sociaux, à s’installer dans leur nouveau logement, ou Emmaüs Connect qui lutte contre la fracture numérique ou encore le RADIS (Restauration Anti-Gaspi à Double Impact Social), en partenariat avec l’association Baluchon, qui propose des repas cuisinés avec des produits invendus à destination des personnes plus démunies dont des salariés d’Emmaüs Défi.
Encore au stade de projet, l’association souhaite désormais ouvrir un local similaire dans la capitale afin de pouvoir aider une centaine de personnes à sortir de la rue à travers cet accompagnement d’insertion adapté.
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