Justice | Val-de-Marne | 15/05/2020
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Val-de-Marne: les agresseurs de personnes asiatiques écopent de 3 à 6 ans de prison

Val-de-Marne: les agresseurs de personnes asiatiques écopent de 3 à 6 ans de prison © Fb

Le groupe d’agresseurs de personnes d’origine principalement asiatique de Paris, Ivry-sur-Seine et Vitry-sur-Seine jugé jeudi et vendredi lors d’une audience spéciale a écopé ce vendredi de peines d’emprisonnement allant de 3 à 6 ans de prison. Les juges de la dixième chambre du tribunal correctionnel de Créteil ont admis le caractère raciste de cette série de vols violents.

«Des peines exemplaires» ont réclamé plusieurs avocats des parties civiles lors de leurs plaidoiries ce vendredi matin au tribunal correctionnel de Créteil pour la seconde journée de procès des trois jeunes hommes accusés d’une série de vols aggravés essentiellement sur des personnes d’origine asiatique.

Tour à tour, les conseils des associations représentées à l’audience ont justifié le mobile raciste de ces actes délictuels caractérisés. «Ils ont terrorisé des quartiers entiers, ciblés parce qu’ils étaient très fréquentés par la communauté asiatique et ont eu la lâcheté de s’attaquer aux plus vulnérables, les femmes et les personnes âgées. Vous leur avez ôté leur humanité en les réduisant à une origine supposée et les avez traités comme des animaux. Il ne faut plus que l’on laisse penser que le racisme contre les personnes d’origine asiatiques serait moins grave que d’autres formes», a insisté l’avocat de la Licra, qui, avec les SOS Racisme, le Mrap et Vigil’ance, ont demandé plusieurs milliers d’euros de dommages et intérêts.

J’ai l’impression qu’au-delà de l’appât du gain, c’était aussi un jeu pour eux”

Soc Lam, avocat de 6 victimes, a montré à nouveau des photographies de visages tuméfiés d’une femme et d’un homme pour rappeler la violence voire l’acharnement qu’ont pris ces vols à l’arrachée. «Ce n’est pas un délire de jeunesse mais quelque chose qu’ils ont pratiqué régulièrement et comme nous avons pu le voir, le sang ne les a pas arrêtés. Une fois, ils n’ont pas hésité à s’attaquer à une femme avec une poussette. J’ai l’impression qu’au-delà de l’appât du gain, c’était aussi un jeu pour eux».

A plusieurs reprises, les avocats ont encouragé les juges de la dixième chambre du tribunal correctionnel de Créteil à envoyer un message pour à la fois décourager de futurs auteurs mais aussi en direction des victimes encore trop méfiantes. Seulement deux personnes sont venues témoigner lors de ce procès dont une femme non-asiatique, une dizaine de personnes ont demandé réparation pour un nombre de victimes identifiées d’environ 30 individus. C’est dire si des progrès restent à accomplir.

Le parquet requiert des peines de 5 à 8 ans de prison

Le parquet de Créteil a fait de ce dossier une priorité et le ministère public s’est illustré par un réquisitoire particulièrement sans concessions à l’encontre des prévenus tous âgés de 20 ans. «Sur les 28 victimes identifiées, 17 ont été blessées et 13 ont refusé de se rendre en unité médico-judiciaire par résignation ou peur mais il y a eu des cris, des larmes, des blessures, des séquelles physiques et psychologiques. En procédant à ces agressions, ils ont contraints leurs victimes à se renfermer sur elles-mêmes, à les renvoyer à leurs communautés et à leur renier le droit au vivre-ensemble».

Le procureur a ainsi requis 8 ans de prison contre I. qui a reconnu 11 des 23 faits récriminés dont des vols à l’arrachée, et qui avait été condamné en février 2019 à une peine de 10 mois prison avec sursis pour vol avec effraction. Huit ans également contre M. qui a reconnu son implication pour 12 faits de vol aggravé en fournissant notamment les véhicules, et a été condamné en janvier 2018 à une peine de prison aménagée pour complicité dans un vol avec extorsion. Pour J., qui a reconnu 3 faits de vol à l’arrachée et dont le casier judiciaire est vierge, le parquet a requis 5 ans de prison. A noter que les deux premiers sont incarcérés en détention provisoire depuis 7 mois l’un à Fresnes, l’autre à Villepinte, alors que le troisième a pu bénéficier d’une libération sous contrôle judiciaire.

La défense tente d’abaisser le quantum de la peine

Le parquet s’est rapproché dans son réquisitoire de la peine maximale encourue pour ces faits fixée à 10 ans. Cette perspective inattendue a désarçonné les avocats de la défense qui ont plaidé pour des durées d’emprisonnement moins longues et aménageables. «Ils ne sont pas très intelligents, un peu simplets. Ils s’expriment avec des mots maladroits quand ils désignent une personne. A 20 ans, on ne choisit pas toujours ses fréquentations avec parcimonie. J., malgré l’opposition de son père a voulu continuer à fréquenter M. qu’il connaissait depuis l’enfance. Il a pleinement conscience de la gravité des faits mais il faut le traiter en primo-délinquant et lui permettre d’aménager la peine que vous lui infligerez», a insisté son avocate.

«Si M. a eu du mal à reconnaître les faits, c’est parce qu’il a eu du mal à comprendre. La peine qui a été requise est forte et il sait qu’il ne sortira pas demain de prison mais il faut apporter de la justesse à la justice. Si vous le condamnez à 8 ans de prison, vous le traiterez comme un animal en le mettant au ban de la société pour un temps indéterminé, sans espoir de reconstruction», a poursuivi l’avocate de M.

«Mon client ne doit pas être traité comme le coupable expiatoire d’un contexte indiscutablement anxiogène à l’égard de la communauté asiatique. La peine doit être une projection dans l’avenir et ce principe aux fondements du droit est bafoué par le parquet qui n’en fait qu’une punition, un assommoir. A 19 ans, faire 8 ans de prison est une tragédie, un arrêt de mort sociale», a plaidé l’avocat d’I.

Un quatrième membre du groupe, mineur, sera jugé par un tribunal pour enfant.

Presque cinq heures de délibéré

A l’issue des plaidoiries de la défense, les juges se sont retirés pour délibérer sur cette audience spéciale pendant environ cinq heures. De retour dans la salle habituellement occupée par la cour d’assise du Val-de-Marne, le président Cocquio a introduit son jugement. «Nous avons jugé des atteintes à des valeurs de notre société telles que le respect de l’intégrité physique (…) Notre but n’est pas de faire des exemples mais de juger». Au final I. a été condamné à 6 ans de prison ferme, M. à 5 ans de prison ferme dont 12 mois avec sursis et J. à 36 mois de prison dont 18 mois de sursis.

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