Pompiers et police sont intervenus le 18 novembre dernier à Villeneuve-Saint-Georges, au siège de l’entreprise Autocars Suzanne pour une tentative de suicide d’un chauffeur. Selon plusieurs témoignages, ce jeune employé n’aurait pas supporté la culture d’autorité et les pratiques punitives de la direction, laquelle réfute ces accusations.
Ce chauffeur âgé d’une trentaine d’année s’était vu imposer pendant un mois d’effectuer tous les jours un trajet aller-retour entre le garage et son domicile situé à 50 kilomètres dans l’Essonne pour des permanences de quinze minutes. « En région parisienne, on ne peut rien faire en quinze minutes. C’était donc uniquement pour l’obliger à venir inutilement », explique un salarié dont il est proche. Pourquoi est-ce qu’on infligeait cela à ce chauffeur ? « C’est un employé sérieux qui a longtemps accepté les demandes de la direction même lorsqu’elles étaient abusives. Ils ont commencé à le sanctionner quand il s’y est opposé », poursuit-il. A bout, le chauffeur s’est rendu, le 18 novembre dernier, au siège de l’entreprise dans un bureau de la direction et s’est aspergé d’essence afin de s’immoler. Sa tentative a néanmoins échoué et les secours sont arrivés pour le prendre en charge. Il est depuis en arrêt maladie.
La Cfdt, syndicat majoritaire dans la société, s’est émue de cet événement dans un courrier à l’attention du personnel. Plusieurs signalements à l’inspection du travail ont été effectués et une enquête a été diligentée. « Nous attendons le résultat. Le mal-être que vivent certains salariés depuis longtemps doit cesser, nous demandons que toutes les mesures soient prises afin d’éviter tout autre accident et qu’un climat social serein règne au sein de notre entreprise », réclame le syndicat.
Pour des salariés qui ont accepté de témoigner anonymement, la direction de l’entreprise a instauré depuis des années une « culture de l’autorité » qui pèse lourd sur ceux qui osent critiquer le management. « Des sorties scolaires aux services VIP, nous avons un assez large choix de missions avec différentes gammes de véhicules. En théorie, lorsque l’on a de l’ancienneté, que l’on est fréquemment ponctuel et que l’on accroche pas le bus, on devrait pouvoir éviter les services les plus galère. Ce n’est pas ce qu’il se passe. Il suffit d’être un peu trop regardant sur la législation ou de demander des comptes à son chef pour que des sanctions soient prises », raconte un chauffeur aguerri qui cite des négligences sur les temps de repos ou des emplois du temps communiqués la veille au soir.
Selon les employés, la crise épidémique est venue accroître les tensions avec une baisse d’activité qui a contrait l’entreprise a mettre certains employés au chômage partiel. «Dans ce contexte, ils se sentent tout permis. La conjoncture est le prétexte à toutes les requêtes et pour éviter que nous nous réunissions pour faire grève, ils jouent sur la division des employés. Certains sont en chômage partiel et n’ont pas de travail pendant que d’autres font leur 7 à 8 heures quotidiennes », ajoute un autre salarié.
La direction récuse totalement les faits de harcèlement
«La direction de notre établissement ne souhaite pas commenter à ce stade les tenants et aboutissants de cette malheureuse affaire qui fait l’objet actuellement d’une enquête interne de la commission sécurité du CSE de l’entreprise et qui n’est à priori pas la conséquence d’un quelconque problème lié au management. Il s’agit d’un sujet interne à l’entreprise et tant la médecine du travail que l’inspection du travail ont été saisies par nos soins pour accompagner notre société et les Institutions représentatives du personnel sur le sujet. Bien évidemment, nous nous inscrivons en faux de toutes les accusations relatives à un prétendu management autoritaire ou à des faits de harcèlement de la part du management de l’entreprise à l’égard de salariés. L’entreprise se réserve donc le droit de poursuivre les auteurs de ces accusations mensongères en dénonciation calomnieuse”, réagit pour sa part la direction.
Une enquête pénale pour harcèlement contre le management
“Ces accusations sont d’autant plus inadmissibles qu’une enquête pénale est actuellement menée par les services de police concernant des faits graves, concordants et établis de harcèlements, commis à l’encontre de certains membres du management, et qui impliqueraient certains salariés de la société. Dans la période actuelle de pandémie, beaucoup de monde, malgré les mesures mises en place par le gouvernement et relayées par notre entreprise, se retrouvent en difficulté, cette situation pèse bien évidemment sur la psychologie des personnes, comme sur les finances de notre entreprise qui, en l’absence totale de tourisme, souffre énormément du manque d’activité. Par conséquent, il nous semble que l’heure doit être à la solidarité et à l’apaisement et non à la polémique stérile autour de la situation individuelle d’un salarié qui se retrouve bien malgré lui instrumentalisé par certaines personnes qui cherchent visiblement à en tirer un intérêt personnel», poursuit la direction.
Entreprise familiale installée à l’entrée nord de Villeneuve-Saint-Georges la société Autocars Suzanne existe depuis cent ans et ses bus bleus parcourent la France entière. Elle fut longtemps dirigée par Claude Suzanne, laquelle, à 72 ans, a passé le relais à sa fille, Emmanuelle Mille, qui s’occupait auparavant d’une autre compagnie active dans le sud francilien, les Cars bleus.
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